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- 26. La Fédération nationale des travailleurs du Bangladesh (Jatiya Sramik Federation) a présenté sa plainte dans une communication en date du 13 juin 1975. L'organisation plaignante a soumis des informations complémentaires à l'appui de sa plainte dans des communications datées du 20 juin et du 12 août 1975. La plainte et les informations complémentaires ont été envoyées au gouvernement du Bangladesh pour qu'il transmette ses observations.
- 27. Le 20 octobre 1975, l'organisation plaignante a officiellement demandé au comité de suspendre l'examen du cas pour le moment, étant donné les changements politiques qui s'étaient produits au Bangladesh et l'effet de ces changements sur l'exercice des droits syndicaux. A sa session de novembre 1975, le comité a demandé à l'organisation plaignante de l'informer en temps opportun sur le point de savoir si elle souhaitait que l'affaire soit examinée ou que la plainte soit retirée et de donner les raisons de sa décision. Le comité a répété sa demande à chacune de ses réunions jusqu'en novembre 1977 lorsque, notant qu'il n'avait reçu aucune confirmation de la part des plaignants, il a demandé une nouvelle fois au gouvernement de lui transmettre ses observations sur la plainte. L'organisation plaignante, dans une communication datée du 10 décembre 1977, a confirmé qu'elle ne souhaitait pas que l'affaire soit examinée plus avant par le comité.
- 28. Le Bangladesh a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. A. Allégations des organisations plaignantes
A. A. Allégations des organisations plaignantes
- Résumé des allégations
- 29 Dans leur communication du 13 juin 1975, les plaignants décrivaient l'emprisonnement arbitraire sans jugement d'un certain nombre de syndicalistes, ainsi que le licenciement de nombreux salariés et syndicalistes, y compris des membres de l'organisation plaignante, qui avaient eu lieu en 1972 à la suite de la promulgation de certains arrêtés présidentiels (nos 8 et 9 de 1972). En particulier, les plaignants ont exposé la situation à l'usine d'allumettes de Dacca (Dacca Match Factory) où, au début de 1972, tous les membres du bureau exécutif du syndicat et 400 membres de ce syndicat avaient été privés de leur emploi, et les locaux du syndicat occupés par le syndicat officiel du gouvernement. Il y avait également l'exemple, au dire des plaignants, de la Société du Bangladesh pour le développement industriel (Bangladesh Industrial Development Corporation) où le gouvernement a annulé, par un arrêté présidentiel pris en avril 1972, une convention légalement conclue entre la BIDC et la Fédération des travailleurs de la BIDC. A la suite des protestations élevées contre cette mesure, plusieurs membres de cette fédération ont été licenciés. Les plaignants donnaient d'autres exemples encore à l'appui de leurs allégations concernant la politique du travail répressive menée par le gouvernement et le refus du droit de grève.
- 30 Les plaignants alléguaient en outre qu'en 1973, plus de 200 travailleurs et membres dirigeants du Syndicat de l'usine de tissage de jute RR (RR Jute Mills), à Chittagong, ont été tués par une patrouille de l'armée semi-officielle, sous le commandement d'un dirigeant du parti au pouvoir. Selon les plaignants, des meurtres du même genre ont eu lieu dans d'autres usines et fabriques dans tout le pays. Par exemple, au dire des plaignants, le secrétaire général du Syndicat de l'usine nationale de tissage du jute, à Ghorashal, et le secrétaire à la propagande de la Fédération nationale des travailleurs du Bangladesh (Jatiya Sramik Federation) ont tous deux été tués par des patrouilles armées. De plus, les plaignants alléguaient que l'ordonnance no 23 promulguée en novembre 1973 portait annulation de toutes les conventions, arrêts judiciaires, règlements, etc. et a mis fin à la négociation collective au Bangladesh.
- 31 En 1974, selon les plaignants, la répression des activités syndicales s'est poursuivie et des milliers de syndicalistes ont été emprisonnés en vertu de la loi de 1974 sur les pouvoirs spéciaux. L'état d'urgence a été proclamé le 28 décembre 1974 et, en vertu de l'ordonnance sur les pouvoirs d'urgence, les fonctions des tribunaux ainsi que tous les droits constitutionnels ont été suspendus.
- 32 Le 7 janvier 1975, le droit de s'affilier à des syndicats dont jouissaient 82 pour cent des travailleurs du pays a été aboli et les réunions, défilés, manifestations, etc. ont été interdits. De plus, toujours au dire des plaignants, il y a eu de nouveaux meurtres et plus de 5.000 militants syndicalistes ont été licenciés dans différentes branches d'activité. Enfin, ajoutaient les plaignants, le gouvernement a dissous toutes les organisations syndicales nationales, à l'exception de la centrale officielle, la Ligue Jatiya Sramik, que le gouvernement soutient directement. Les plaignants décrivaient plusieurs exemples dans lesquels les syndicats qui soutiennent le parti au pouvoir ont été favorisés alors que les membres des syndicats affiliés à la Fédération nationale des travailleurs (Jatiya Sramik Federation) étaient tués, arrêtés ou licenciés.
- 33 Dans sa communication reçue le 20 juin 1975, l'organisation plaignante a transmis un complément d'information et de documentation pour soutenir ses allégations concernant la répression syndicale, y compris l'interdiction des grèves, le meurtre des syndicalistes et le licenciement du secrétaire général de la Fédération nationale des travailleurs (Jatiya Sramik Federation).
- 34 Dans une autre communication reçue le 12 août 1975, l'organisation plaignante a transmis de la documentation montrant qu'elle avait été interdite et illustrant la manière dont ses membres étaient persécutés dans tout le pays.
- Demande des plaignants de mettre fin à l'examen de la plainte
- 35 Dans une communication datée du 20 octobre 1975, l'organisation plaignante a déclaré que le Président Khandakar Mustague Ahmad, de la République populaire du Bangladesh, dans un récent discours adressé à la nation, avait annoncé le ferme engagement de son gouvernement de restaurer la vie démocratique normale d'ici au 15 août 1976 et de tenir des élections générales au début de 1977. De plus, au dire des plaignants, il semble qu'après les récents changements survenus dans le gouvernement, il n'y ait pas eu d'ingérence de l'Etat dans les activités syndicales de base. Dans ces conditions, les plaignants ont demandé de suspendre l'examen de l'affaire jusqu'à nouvel avis.
- 36 L'organisation plaignante, dans une communication datée du 10 décembre 1977, a indiqué que, comme le gouvernement était en train de discuter avec elle la restauration des droits syndicaux, elle ne souhaitait pas que le comité poursuive l'examen de l'affaire.
B. B. Conclusions du comité
B. B. Conclusions du comité
- Conclusions du comité
- 37 Dans des cas précédents où le comité a été saisi d'une demande de retirer une plainte, il a considéré que le désir manifesté par une organisation plaignante de retirer une plainte, tout en constituant un élément dont il doit tenir le plus grand compte, n'est cependant pas en lui-même un motif suffisant pour qu'il se trouve automatiquement dessaisi de l'examen de cette plainte.
- 38 Dans lesdits cas, le comité a estimé devoir s'inspirer en cette matière des principes établis par le Conseil d'administration en 1937 et en 1938 dans les affaires soumises respectivement par le Syndicat des travailleurs du textile de Madras (Madras Labour Union of Textile Workers) et par la Société de bienfaisance des travailleurs de l'île Maurice, en application de l'article 23 (aujourd'hui article 24) de la Constitution de l'Organisation, selon lesquels dès le moment où il était saisi d'une réclamation, il avait seul qualité pour décider de la suite qu'elle comportait et "le désistement de l'organisation requérante n'est pas toujours une preuve que la réclamation n'est pas recevable ou est dénuée de fondement".
- 39 Se fondant sur cet article, le comité a décidé qu'il était seul compétent pour peser en toute liberté les raisons fournies pour justifier le retrait de la plainte et pour chercher à établir si ces raisons semblaient suffisamment plausibles pour donner à penser que ce désistement était la conséquence d'une décision prise en toute indépendance. A ce propos, le comité a fait observer qu'il pourrait se présenter des cas où le retrait d'une plainte par l'organisation plaignante serait la conséquence non pas du fait que la plainte est devenue sans objet, mais d'une pression exercée par le gouvernement sur le plaignant, ce dernier étant menacé d'une aggravation de la situation s'il ne consentait au retrait de sa plainte.
- 40 Dans le cas d'espèce, le comité a tenu compte du fait que l'organisation plaignante a considéré la question du retrait de sa plainte depuis le 20 octobre 1975. Le comité a tenu compte également du fait que les allégations, bien que d'une nature très grave, se rapportent principalement à la période comprise entre 1972 et 1975 et que, depuis lors, il y a eu d'importants changements politiques dans le pays.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 41. Dans ces conditions et étant donné la déclaration du plaignant selon laquelle des discussions sont en cours avec le gouvernement au sujet de la restauration des droits syndicaux, le comité recommande au Conseil d'administration de décider qu'il serait sans objet de poursuivre l'examen du cas.