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Interim Report - REPORT_NO118, 1970

CASE_NUMBER 492 (Mexico) - COMPLAINT_DATE: 15-JUL-66 - Closed

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  1. 98. Le dernier rapport soumis au Conseil d'administration au sujet de ce cas, que le comité a examiné lors de sa session de février 1969, figure aux paragraphes 135 à 146 du 110e rapport du comité.
  2. 99. Plusieurs communications émanant de M. Rubén Carlos Esguerra, de son avocat et du gouvernement mexicain sont parvenues après la soumission dudit rapport. Les communications de M. Esguerra sont datées des 23 septembre et 24 octobre 1969; celle de son défenseur a été envoyée le 15 novembre 1969; quant à celles du gouvernement, elles sont datées des 16 juin et 29 septembre 1969 et des 12 janvier et 24 mars 1970.

A. A. Allégations des organisations plaignantes

A. A. Allégations des organisations plaignantes
  1. 100. Le comité rappelle que, quand il a examiné le présent cas à sa session de février 1969, M. Esguerra, qui avait exercé les fonctions de représentant syndical, et plusieurs autres personnes étaient poursuivis en justice sous l'inculpation, pour ce qui est de M. Esguerra, de tentative d'homicide et de fraude. Selon une communication de la Confédération mondiale du travail en date du 10 janvier 1968, la détention de M. Esguerra était due à ses activités syndicales. Le gouvernement ayant indiqué que le procès se terminerait prochainement et qu'il communiquerait le texte de la sentence rendue, le comité avait recommandé au Conseil d'administration de prendre note de cette déclaration, de prier le gouvernement de bien vouloir communiquer également le texte des considérants dudit jugement et d'ajourner l'examen du cas en attendant d'être en possession de ces éléments d'information.
  2. 101. Le 16 juin 1969, le gouvernement a fait savoir que M. Esguerra avait été condamné et qu'il enverrait le texte du jugement. Celui-ci a été transmis le 29 septembre 1969.
  3. 102. Aux termes du jugement en question, M. Esguerra a été condamné à sept ans de prison pour les délits de fraude et de tentative d'homicide. Le délit de fraude a consisté dans le fait qu'il a reçu de l'argent d'un groupe de travailleurs contre la promesse, qu'il n'a pas tenue, de leur procurer des emplois dans l'entreprise Petróleos Mexicanos, et celui de tentative d'homicide dans le fait qu'après avoir incité plusieurs travailleurs et dirigeants syndicaux à appuyer leurs revendications en faisant une grève de la faim devant les bureaux des Nations Unies à Mexico il s'est opposé, contre la volonté des intéressés (d'après ce que ceux-ci ont déclaré postérieurement), à ce qu'ils mettent fin à la grève. Selon le jugement, l'analyse des éléments de preuve montre que, s'il est vrai que les personnes en question ont participé volontairement et en sachant ce qu'elles faisaient à la grève de la faim que M. Esguerra les avait poussées à déclencher, il y a eu cependant tentative d'homicide, en ce sens que, malgré le fait que leur vie était en danger, M. Esguerra les a empêchées d'arrêter la grève, comme elles en avaient manifesté le désir. Outre qu'il s'est abstenu de donner aux grévistes les aliments et les soins dont ils avaient besoin et qu'ils n'étaient plus en état d'obtenir eux-mêmes, M. Esguerra s'est opposé formellement à ce que les aliments et les soins en question leur soient donnés par d'autres personnes. Finalement, grâce à l'intervention de la police, les grévistes ont été emmenés à l'hôpital où ils ont reçu les soins que nécessitait leur état.
  4. 103. M. Esguerra a fait appel de ce jugement, appel dont est saisi le Tribunal supérieur de justice. Selon une communication du gouvernement en date du 12 janvier 1970, une audience devait avoir lieu le 14 du même mois avant que le tribunal précité ne rende son arrêt. Le gouvernement a indiqué qu'il tiendrait le comité au courant des suites de cette affaire après la date susmentionnée. Jusqu'à présent, il n'a pas envoyé les informations en question.
  5. 104. Le 23 septembre 1969, M. Esguerra a écrit directement au BIT pour l'informer du traitement dont il fait l'objet à la prison et signaler, en particulier, que l'on mettait des entraves aux visites de ses défenseurs. Dans une autre communication datée du 24 octobre 1969, M. Esguerra insiste sur le fait qu'il éprouve des difficultés à rencontrer ses défenseurs. Il indique également que les témoins qui ont déposé contre lui (les personnes qui avaient participé à la grève de la faim) l'ont fait sous la pression des autorités, alors qu'ils se trouvaient à l'hôpital. Il s'agirait, dans son cas, d'un procès politique. Par une communication du 15 novembre 1969, un de ses défenseurs, Me Sánchez Ramirez, a signalé au BIT qu'il avait demandé qu'on lui transmette des pièces du dossier relatif au procès de M. Esguerra afin de préparer la défense de son client, mais qu'il n'avait pas reçu lesdites pièces du fait qu'elles avaient disparu du dossier.
  6. 105. Ces diverses communications ont été portées à la connaissance du gouvernement, qui a envoyé sa réponse le 24 mars 1970. La communication du gouvernement est très détaillée, et le comité prend note des explications qu'elle contient. En ce qui concerne les défenseurs de M. Esguerra, le gouvernement indique que celui-ci a toujours eu la possibilité de communiquer avec les personnes auxquelles il a confié sa défense et qui sont légalement accréditées en qualité de défenseurs. L'autorisation d'entrer dans la prison n'a été refusée que deux fois à l'avocat désigné par ses soins, cela parce qu'il n'avait pu (peut-être à la suite d'un oubli) justifier de sa qualité de défenseur. Les visites de l'avocat qui avait été nommé d'office n'ont jamais soulevé de difficulté. Lorsque M. Esguerra a désigné de nouveaux défenseurs, un seul d'entre eux (Me Sánchez Ramirez) a demandé à être reconnu comme tel, ce qui a été fait. En revanche, le gouvernement ne donne aucune indication au sujet des allégations formulées par Me Sánchez Ramirez dans sa lettre du 15 novembre 1969.
  7. 106. En ce qui concerne les assertions de M. Esguerra au sujet de son procès, le gouvernement déclare qu'il s'agit d'appréciations personnelles et partiales. Il ajoute qu'il ne pense pas que l'OIT considère que l'un de ses objectifs est de s'ériger en instance suprême chargée de résoudre les affaires dont sont saisis les tribunaux des Etats Membres de l'Organisation, en précisant à ce propos que « si une personne, qui est accusée d'un délit caractérisé prévu par le Code pénal, jouit de toutes les garanties qui lui sont nécessaires pour assurer sa défense et si, d'autre part, les poursuites entamées contre elle ne sont pas motivées par des activités proprement syndicales il ne fait aucun doute que l'OIT devra s'abstenir d'intervenir dans l'action des tribunaux locaux car, dans un régime juridique comme celui du Mexique, même les autres pouvoirs de la nation ne peuvent s'immiscer dans les fonctions du pouvoir judiciaire ».

B. B. Conclusions du comité

B. B. Conclusions du comité
  1. 107. Le comité tient à rappeler l'importance qu'il a toujours attachée au principe selon lequel, chaque fois que des syndicalistes sont détenus, y compris lorsqu'ils sont accusés de délits politiques ou de délits de droit commun que le gouvernement estime sans rapport avec leurs fonctions syndicales, les intéressés doivent être jugés équitablement et dans les plus brefs délais par une autorité judiciaire impartiale et indépendante. Quand il est apparu au comité que, d'après les informations qui lui avaient été fournies, les intéressés avaient été jugés par les autorités judiciaires compétentes, qu'ils avaient bénéficié des garanties d'un procès régulier et qu'ils avaient été condamnés pour des actes qui n'avaient aucun rapport avec les activités syndicales ou qui débordaient le cadre des activités syndicales normales, le comité a estimé que le cas n'appelait pas un examen plus approfondi. Il a cependant insisté sur le fait que la question de savoir si le motif des condamnations prononcées relevait d'un délit criminel ou de l'exercice des droits syndicaux n'était pas de celles qui peuvent être tranchées unilatéralement par le gouvernement intéressé, mais que c'était au comité qu'il appartenait de se prononcer sur ce point, après examen de toutes les informations disponibles et, surtout, du texte du jugement.
  2. 108. Pour ce qui est du procès et de la condamnation de M. Esguerra, le comité a examiné soigneusement les informations et les observations qui lui ont été soumises par le gouvernement, et en particulier le texte du jugement. Il considère que les faits qui sont reprochés à M. Esguerra et qui ont motivé sa condamnation pour délit de fraude sont manifestement étrangers à toute activité syndicale.
  3. 109. Il n'en va pas de même en ce qui concerne les faits qui ont motivé sa condamnation pour tentative d'homicide. Dans le cas particulier, il s'agit du rôle que M. Esguerra a joué dans une manifestation de protestation, à laquelle ont participé plusieurs travailleurs et dirigeants syndicaux, et qui était destinée à appuyer leurs revendications. L'action de l'intéressé a consisté, en premier lieu, à inciter lesdits travailleurs à déclencher une grève de la faim, ce qu'ils ont fait de leur plein gré. Par la suite, M. Esguerra aurait essayé d'empêcher que les grévistes cessent de faire la grève ou qu'on leur donne des aliments et des soins, mettant ainsi leur vie en danger. Sur ce point, le jugement relève qu'il a fallu que la force publique intervienne pour que l'on puisse emmener les grévistes à l'hôpital. Le comité constate cependant que le gouvernement avait indiqué précédemment (communication du 12 janvier 1968) que « sept personnes avaient participé à une grève de la faim aux portes de l'immeuble où se trouvent les bureaux de l'ONU. En raison du manque d'aliments, elles ont mis leur vie en danger, ce qui les a amenées à abandonner leur attitude et à demander des soins médicaux. » Sur ces sept personnes « six furent emmenées à leur demande par le personnel de la Direction de l'assistance sociale » et admises à l'hôpital général de la ville de Mexico. Quant à la septième personne, elle a préféré se rendre dans une clinique privée.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 110. Etant donné que la sentence condamnatoire fait l'objet d'un appel devant le Tribunal supérieur de justice et que le gouvernement n'a pas encore envoyé les informations qu'il doit faire parvenir à cet égard, le comité recommande au Conseil d'administration d'ajourner l'examen du cas et de prier le gouvernement de bien vouloir lui communiquer le texte de l'arrêt rendu par ledit tribunal, y compris le texte de ses considérants.
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