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- 213. Le cas no 437, qui consiste en une plainte de 1965 de la Confédération générale du travail du Congo, a déjà été examiné par le Comité à sa quarante-deuxième session, tenue en février 1966, à l'occasion de laquelle il a présenté au Conseil d'administration un rapport intérimaire contenu aux paragraphes 82 à 89 de son quatre-vingt-neuvième rapport. Ce rapport a été adopté par le Conseil d'administration lors de sa 165ème session (mai 1966).
- 214. Le cas no 500 consiste en une plainte de la Confédération générale du travail du Congo contenue dans une communication du 21 novembre 1966, complétée par deux communications des 31 décembre 1966 et 10 janvier 1967, et en une plainte portant sur les mêmes faits présentée par la Fédération syndicale mondiale, contenue dans une communication du 26 novembre 1966 et complétée par une communication du 7 janvier 1967.
- 215. Du fait que, d'une part, ces deux cas consistent l'un et l'autre en des allégations relatives aux mesures qui auraient été prises à l'encontre de la Confédération générale du travail du Congo et de ses dirigeants et, d'autre part, que les dernières observations du gouvernement consistent en une explication de l'attitude des autorités à l'égard de cette organisation, il a été jugé opportun, à ce stade, d'examiner simultanément les deux affaires.
A. A. Allégations des organisations plaignantes
A. A. Allégations des organisations plaignantes- 216. Lors de son examen du cas no 437 à sa session de février 1966, le Comité a pris connaissance des allégations de la C.G.T.C selon lesquelles, contrairement à ceux des autres organisations, ses dirigeants se seraient vu refuser l'autorisation de quitter le pays en vue de se rendre à l'étranger pour y prendre part à des réunions internationales. Le Comité, ayant constaté que, dans ses observations, le gouvernement se bornait à déclarer que le refus opposé aux personnes en cause résidait dans le fait que celles-ci n'étaient pas en règle avec le service d'immigration en indiquant n'avoir « pas d'autres observations à formuler », a estimé que la réponse du gouvernement était trop sommaire pour lui permettre d'apprécier si, en l'occurrence, il y avait eu ou non violation des droits syndicaux. Il a en conséquence recommandé au Conseil d'administration de prier le gouvernement de bien vouloir lui préciser les motifs exacts pour lesquels les personnes nommément désignées dans la plainte s'étaient vu refuser l'autorisation de quitter le pays.
- 217. Cette recommandation ayant été approuvée par le Conseil d'administration, la demande qu'elle impliquait a été portée à la connaissance du gouvernement par une lettre en date du 7 juin 1966. Par ailleurs, dans une communication en date du 4 novembre 1966, l'organisation plaignante citait deux nouveaux cas de dirigeants qui se seraient vu refuser l'autorisation de quitter le pays. Le texte de cette communication a été transmis au gouvernement pour observations par une lettre en date du 22 novembre 1966.
- 218. Les allégations objet du cas no 500 portent essentiellement sur le fait que huit dirigeants et militants de la C.G.T.C auraient été arrêtés dans l'exercice de leurs fonctions syndicales (M. J. H. Malhonga, premier secrétaire général, MM. P. Botuli, P. Sassa et A. Wabaka, secrétaires confédéraux, M. A. Ngoy, vice-secrétaire administratif et MM. G. Mafwa, T. Mbomu et J. Kitambala) et que les locaux de l'organisation auraient fait l'objet d'une perquisition.
- 219. Toutes les communications des plaignants mentionnées au paragraphe 214 ci-dessus ont été transmises au gouvernement pour observations à mesure de leur réception.
- 220. Par une communication en date du 21 mars 1967, le gouvernement a présenté ses observations sur l'ensemble des plaintes de la C.G.T.C et de la F.S.M.
- 221. Dans cette communication, le gouvernement indique tout d'abord que, depuis près d'un an et demi, la République démocratique du Congo vit sous un régime d'exception proclamé sur toute l'étendue du territoire. Cette mesure, ajoute le gouvernement, a été jugée indispensable par tous dans l'intérêt supérieur de la nation.
- 222. Le gouvernement rappelle ensuite qu'après son accession à l'indépendance, le pays a connu une période de désordre et d'anarchie sans précédent: la sécurité des biens et des personnes n'était plus garantie, la situation économique et sociale était catastrophique, la rébellion et la disette sévissaient partout. C'est dans ce climat de marasme que s'est instauré le nouveau régime du lieutenant-général Mobutu. Le nouveau gouvernement s'est vite convaincu « que l'excès des libertés, y compris la liberté syndicale, était originellement responsable de la détérioration de la situation au Congo. Il avait donc une option à faire: protéger d'abord les hommes ou garantir d'abord les libertés. Le choix du gouvernement ne s'est pas fait attendre: au lieu d'assurer le respect des libertés pour vouer le peuple congolais à la mort, il a préféré protéger les hommes au lieu de garantir les libertés, car il n'y a pas de liberté sans hommes. »
- 223. C'est dans ces circonstances et ayant à l'esprit les considérations qui précèdent - poursuit le gouvernement - que celui-ci s'est vu contraint d'imposer à la nation d'importants sacrifices dans tous les domaines de la vie publique en restreignant, notamment, toutes les libertés, y compris la liberté syndicale. Ces restrictions, déclare le gouvernement, ont été imposées dans l'intérêt de tous et, par suite, le devoir de chacun était de coopérer avec les autorités.
- 224. « Or - déclare le gouvernement - certains Congolais n'avaient pas compris qu'au-delà de nos droits légitimes, de nos libertés fondamentales, il y a les intérêts de l'Etat, les intérêts de la population qui sont tels qu'il faut, lorsqu'ils sont menacés, consentir des sacrifices pour assurer leur sauvegarde. C'est le cas de notre Confédération générale du travail du Congo, qui s'est rendue coupable d'activités subversives en utilisant son syndicat pour combattre le pouvoir établi et troubler l'ordre public... il va de soi - poursuit le gouvernement -, en tenant compte de tout ce qui précède, que des mesures devaient être prises à l'endroit de la Confédération générale du travail du Congo en vue de sauvegarder la paix et d'assurer le calme, la tranquillité et la prospérité du Congo qui lui ont fait cruellement défaut depuis son accession à l'indépendance... Les raisons qui précèdent - déclare enfin le gouvernement - constituent le motif principal qui a conduit le gouvernement de la République démocratique du Congo à prendre des mesures sévères à l'endroit du syndicat dont il est question ci-dessus et à l'endroit de ses dirigeants. »
- 225. Avant de pouvoir aborder l'étude du fond de l'affaire sur la base des allégations formulées par les plaignants et des observations présentées à leur sujet par le gouvernement, il est un élément nouveau, survenu depuis la réponse du gouvernement, que le Comité doit tout d'abord examiner.
- 226. Par une lettre en date du 18 avril 1967, en effet, M. P. A. Kimbembi, vice secrétaire général de la C.G.T.C et signataire de la communication du 10 janvier 1967 alléguant l'arrestation de huit dirigeants et militants de la C.G.T.C. (voir les paragraphes 214 et 218 ci-dessus) a déclaré, au nom de cette organisation, retirer la plainte déposée par elle. La lettre en question était ainsi conçue: « Suite aux nouveaux éléments intervenus dans nos rapports avec les autorités nationales, nous avons l'honneur de vous signifier par la présente le retrait de la plainte déposée auprès de votre institution. »
B. B. Conclusions du comité
B. B. Conclusions du comité- 227. Lorsqu'il s'est trouvé placé dans des circonstances analogues, le Comité a toujours considéré que le retrait d'une plainte créait une situation dont il convenait d'examiner pleinement la portée. Il a à cet égard estimé que le désir manifesté par une organisation plaignante de retirer sa plainte, tout en constituant un élément dont il devait tenir le plus grand compte, n'était cependant pas en lui-même un motif suffisant pour qu'il se trouve automatiquement dessaisi de l'examen de cette plainte. La même position a été adoptée par la Commission d'investigation et de conciliation en matière de liberté syndicale lorsqu'elle s'est trouvée saisie d'une affaire concernant la Grèce. La Commission d'investigation et de conciliation tout comme le Comité de la liberté syndicale ont rappelé, en se fondant notamment sur un principe établi par le Conseil d'administration dès 1937, qu'il leur appartenait d'apprécier les raisons invoquées pour expliquer le retrait d'une plainte et de rechercher si celles-ci permettent de penser que ce retrait a été effectué en pleine indépendance.
- 228. Compte tenu aussi du fait que la F.S.M, qui est également plaignante dans l'affaire, n'a pas retiré sa plainte, le Comité estime ne pas se trouver dessaisi du cas du seul fait du retrait de sa plainte par la C.G.T.C.
- 229. Cela étant, le Comité constate que la communication du 18 avril 1967 reçue du porte-parole de la C.G.T.C ne précise pas les nouveaux éléments qui seraient intervenus dans les rapports entre la C.G.T.C et le gouvernement et qui, d'après cette communication, seraient à l'origine du retrait de sa plainte par cette organisation. Il lui apparaît donc nécessaire de connaître la nature des éléments nouveaux invoqués par le plaignant pour expliquer le retrait de sa plainte.
Recommandation du comité
Recommandation du comité- 230. Le Comité recommande donc au Conseil d'administration:
- a) de prier la C.G.T.C de bien vouloir indiquer les éléments nouveaux qui seraient intervenus dans les rapports entre cette organisation et le gouvernement;
- b) de prier également le gouvernement de bien vouloir fournir des renseignements au sujet de la question mentionnée à l'alinéa précédent;
- c) de prier le gouvernement de bien vouloir lui faire savoir si les personnes mentionnées au paragraphe 218 ci-dessus ont été remises en liberté ou si elles ont passé en jugement devant une instance judiciaire régulière et, dans l'affirmative, de bien vouloir fournir le texte et les attendus du jugement rendu;
- d) de prendre note du présent rapport intérimaire, étant entendu que le Comité fera de nouveau rapport lorsqu'il sera en possession des informations complémentaires sollicitées de la C.G.T.C et du gouvernement aux alinéas a), b) et c) ci-dessus.