ILO-en-strap
NORMLEX
Information System on International Labour Standards

Interim Report - REPORT_NO31, 1960

CASE_NUMBER 170 (France) - COMPLAINT_DATE: 26-NOV-57 - Closed

DISPLAYINEnglish - Spanish

  1. 37. Par une communication en date du 26 novembre 1957, le Comité intersyndical des centrales syndicales malgaches a déposé devant l'O.I.T une plainte selon laquelle il serait porté atteinte à l'exercice des droits syndicaux à Madagascar. Informé le 28 novembre 1957 de son droit de présenter des informations complémentaires à l'appui de sa plainte, le plaignant a adressé de telles informations au Directeur général du B.I.T par une lettre en date du 22 décembre 1957.
  2. 38. Par deux lettres datées, respectivement, des 28 novembre 1957 et 10 janvier 1958, la plainte et les informations complémentaires fournies par l'organisation plaignante ont été communiquées au gouvernement; celui-ci a fait parvenir ses observations à leur sujet par une communication en date du 25 février 1958.
  3. 39. A sa dix-neuvième session (Genève, février 1958), le Comité a présenté un rapport intérimaire sur ce cas au Conseil d'administration et a décidé de demander des informations complémentaires au gouvernement. Cette décision du Comité a été portée à la connaissance du gouvernement par une lettre datée du 17 mars 1958. Le gouvernement a fait parvenir sa réponse par une lettre en date du 21 juillet 1958.

A. A. Allégations des organisations plaignantes

A. A. Allégations des organisations plaignantes
  1. 40. Les plaignants allèguent que certaines des centrales syndicales décidèrent de déclencher une grève les 26 et 27 novembre 1957. Le but de la grève - dans les secteurs public, privé et agricole - était de protester contre la politique économique nationale et contre les dispositions de l'arrêté no 404-IGT du 7 novembre 1957 portant modification des taux des prestations familiales et de l'arrêté no 408-IGT, également du 7 novembre 1957, fixant les zones de salaires et les salaires minima interprofessionnels garantis à Madagascar, considérés par les plaignants comme étant insuffisants. Pour ce qui est du secteur privé, les revendications faites concernaient les allocations familiales, un salaire garanti minimum spécifique, les allocations de maternité, cinq zones de salaires, l'extension des conventions collectives dans les différentes branches professionnelles, la retraite des vieux travailleurs et la lutte contre le chômage. Pour ce qui est du secteur public, les revendications concernaient les indices de solde, l'uniformisation du taux et du mode d'attribution des prestations familiales, la titularisation des auxiliaires et l'uniformisation des modalités d'intégration de certains agents dans les futurs cadres territoriaux. En ce qui concerne le secteur agricole, on demandait la création de chambres de commerce distinctes des chambres du commerce et de l'industrie.
  2. 41. Les plaignants joignaient à leur plainte le texte d'une notice émanant de l'Inspection générale du travail et déclarant que la grève était illégale, ce qu'ils considèrent comme une atteinte au droit de grève. Cette notice relève que le droit de grève prévu par la Constitution est subordonné aux dispositions législatives selon lesquelles les grèves sont interdites avant que les procédures prévues par la loi pour le règlement des conflits collectifs du travail surgissant entre les employeurs et les travailleurs aient été épuisées. Le texte de cette notice dit ensuite qu'il ne s'agissait pas d'un conflit entre employeurs et travailleurs, car ce n'étaient pas les employeurs, mais les autorités qui étaient compétentes pour la plupart des revendications et que, par conséquent, la grève était dirigée contre les autorités et leur politique économique. Les décisions des tribunaux judiciaires ont prouvé, déclare la notice, que ce type de grève est illégal, car il empêche les autorités d'exercer leurs pouvoirs. La notice avertit par conséquent les travailleurs qui pourraient participer à la grève qu'ils courraient le risque de perdre leur salaire ou d'être congédiés (sous réserve de l'approbation du tribunal du travail) sans pouvoir réclamer de réparation.
  3. 42. En terminant, l'organisation plaignante fait valoir que plus de cinq cents grévistes ont été congédiés et que les plaignants ont introduit trois cents instances.
  4. 43. Dans sa première série d'observations, datée du 25 février 1958, le gouvernement déclarait que l'Inspection du travail considérait la grève comme illégale du fait que les revendications tendaient à faire modifier des questions qui avaient fait l'objet de deux arrêtés, ce qui rendait impossible le recours aux procédures légales ordinaires de conciliation et d'arbitrage et que les syndicats avaient l'intention de s'immiscer dans un domaine réservé à l'autorité. Néanmoins, déclarait le gouvernement, la grève s'était déroulée en toute liberté, bien qu'elle ait été appuyée par 2,2 pour cent seulement des salariés de Madagascar. Le gouvernement reconnaît que certains congédiements ont eu lieu, mais précise que la plupart d'entre eux ont été rapportés sans tarder. Il déclare que, si certains congédiements donnent lieu à des poursuites judiciaires, il appartiendra aux tribunaux compétents de se prononcer sur le caractère légal ou illégal de la grève.
  5. 44. De l'avis du gouvernement, la grève en question est d'inspiration essentiellement politique: ce que les plaignants reprochent en réalité au gouvernement - estime ce dernier - c'est que la notice publiée par l'Inspection du travail (voir paragraphe 41 ci-dessus) ait, selon eux, exercé une pression morale qui serait à l'origine de l'échec de la grève. En fait, déclare le gouvernement, la grève était dirigée contre le gouvernement parce qu'aux termes de la loi, il appartient à un organisme officiel de fixer le salaire minimum et les allocations.
  6. 45. Lors de l'examen du cas auquel il a procédé au cours de sa dernière session (Genève, février 1958), le Comité a rappelé que, dans plusieurs cas précédents, il avait estimé que le fait de traiter comme illégale une grève visant à faire pression sur le gouvernement pour un sujet politique ne constitue pas une violation de la liberté syndicale et que le gouvernement qui ferait savoir à une organisation que, selon les avis juridiques reçus par lui, une grève projetée serait illégale parce qu'elle ne concernerait pas un conflit du travail, ne violerait pas non plus la liberté syndicale.
  7. 46. Après avoir noté l'affirmation du gouvernement selon laquelle, bien que les points litigieux aient été de nature économique, la grève aurait été dirigée contre lui, le Comité a relevé la déclaration gouvernementale d'où il découle que la question de la légalité tant de la grève elle-même que des congédiements qui en ont été la conséquence serait tranchée par toute action introduite auprès des tribunaux.
  8. 47. Le Comité a rappelé ensuite que, dans de nombreux cas antérieurs, il avait décidé de ne pas examiner de questions faisant l'objet de procédures judiciaires en cours - lorsque lesdites procédures étaient assorties de garanties suffisantes de légalité -, les débats judiciaires pouvant fournir des éléments d'information utiles au Comité dans l'appréciation du bien-fondé des allégations à lui soumises.
  9. 48. Le Comité avait donc décidé de surseoir à l'examen du cas et d'inviter le gouvernement à lui communiquer le jugement rendu par les tribunaux sur cette affaire, décision consignée dans le rapport intérimaire qu'il a présenté sur le cas au Conseil d'administration o.
  10. 49. Cette décision du Comité a été portée à la connaissance du gouvernement par une lettre en date du 17 mars 1958. Le gouvernement a fait parvenir sa réponse par une communication en date du 21 juillet 1958.
  11. 50. Dans cette réponse, le gouvernement indique que le Tribunal du travail de Tananarive a rendu, les 9 janvier 1958 et jours suivants, deux jugements portant sur 287 licenciements individuels prononcés pour faits de grève dans la province de Tananarive. Les jugements intervenus dans la branche « industrie » déclaraient la grève abusive et déboutaient les travailleurs de leur action, cependant que les jugements rendus pour la même cause dans la branche « commerce » déclaraient la même grève non abusive et condamnaient les employeurs à des dommages-intérêts pour licenciement fautif.
  12. 51. Le gouvernement indique ensuite que, statuant en appel les 27 mars et jours suivants, le tribunal de première instance a confirmé les jugements déclarant la grève abusive et réformé les autres, unifiant ainsi la jurisprudence locale en matière de grève.

B. B. Conclusions du comité

B. B. Conclusions du comité
  1. 52. Tout en remerciant le gouvernement de ces informations, le Comité a estimé que, conformément à la pratique qu'il a suivie en pareil cas, il lui serait utile de prendre connaissance du texte des jugements - tant ceux qui ont été rendus par les deux tribunaux de première instance que celui qui a été rendu en appel - et de leurs attendus, avant d'exprimer un avis quelconque sur la question.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 53. Dans ces conditions, le Comité recommande au Conseil d'administration de prendre note du présent rapport intérimaire, étant entendu qu'il fera de nouveau rapport sur le cas lorsqu'il sera en possession des informations sollicitées du gouvernement français.
    • Genève, 14 novembre 1958. (Signé) Roberto AGO, Président.
© Copyright and permissions 1996-2024 International Labour Organization (ILO) | Privacy policy | Disclaimer