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A. A. Allégations des organisations plaignantes
A. A. Allégations des organisations plaignantes
- 76. La plainte présentée le 28 juillet 1954 directement à l'O.I.T par la Confédération générale des travailleurs de Costa-Rica allègue que le Président de l'Assemblée législative de Costa-Rica, personnalité ayant de l'influence sur le gouvernement actuel, aurait soumis à ladite Assemblée une proposition de loi visant à interdire à tout un secteur de la classe laborieuse d'exercer des fonctions de direction au sein des organisations syndicales.
- 77. Cette proposition de loi serait contraire non seulement aux dispositions de la Constitution de Costa-Rica, mais aussi aux principes établis par la convention sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical. Elle mettrait notamment en cause le droit de s'organiser et d'adhérer aux syndicats sans autorisation préalable ; le droit des organisations professionnelles d'élire librement leurs représentants, sans intervention des autorités publiques ; la garantie prévue contre la dissolution ou suspension par voie administrative des organisations professionnelles ; le droit de constituer des fédérations et confédérations et de s'affilier à des organisations professionnelles internationales, etc.
- 78. Le plaignant demande à l'O.I.T d'intervenir auprès du pouvoir exécutif pour que ladite proposition de loi ne soit pas soumise à l'Assemblée législative au cours de sa session extraordinaire ou, au cas où elle serait adoptée, pour qu'il fasse usage du droit de veto. La plainte est accompagnée d'une déclaration présentée au Parlement par la Confédération générale des travailleurs dans laquelle il est allégué que le but véritable de la proposition de loi serait de supprimer les syndicats qui ne sont pas affiliés à la Confédération des travailleurs « Rerum Novarum », et d'un numéro de La Gaceta qui reproduit la proposition de loi en question.
- 79. Conformément au paragraphe 23 du Neuvième rapport du Comité de la liberté syndicale, le Directeur général a informé l'organisation plaignante du fait que toute information complémentaire qu'elle pourrait désirer soumettre à l'appui de sa plainte devrait lui être communiquée dans le délai d'un mois, mais aucune information complémentaire n'a été reçue de l'organisation plaignante.
- 80. Dans sa lettre du 22 septembre 1954, le gouvernement de Costa-Rica indique que la proposition de loi incriminée par le plaignant a été soumise à l'examen de l'Assemblée législative par son Président, en vertu du droit d'initiative législative dont jouissent les membres du Parlement. Tant que cette proposition de loi n'a pas été adoptée par l'Assemblée, le pouvoir exécutif n'a pas à se prononcer à son égard. A l'heure actuelle, la proposition de loi se trouve seulement en cours d'examen devant l'Assemblée.
B. B. Conclusions du comité
B. B. Conclusions du comité
- 81. L'allégation essentielle du plaignant concerne la présentation à l'Assemblée législative, par un de ses membres, d'une proposition de loi qui, si elle était adoptée, comporterait, de l'avis du plaignant, plusieurs limitations à la liberté syndicale. Cette proposition de loi, dont le texte est joint à la plainte, tendrait notamment à modifier le Code du travail en défendant aux personnes ayant été membres ou sympathisants d'un des partis politiques interdits par la Constitution ou le Parlement de faire partie des cadres dirigeants des syndicats professionnels. En outre, le ministre du Travail aurait le droit de dissoudre les syndicats qui ne se seraient pas conformés à cette disposition. Les personnes ayant été membres ou sympathisants du parti communiste ne pourraient pas s'affilier à un syndicat ou le représenter. Le fait de compter parmi ses membres plus de deux membres sympathisants communistes justifierait la dissolution d'une organisation professionnelle, et le fait de ne pas se conformer à l'une quelconque des dispositions de cette proposition de loi pourrait être sanctionné par des peines assez graves.
- 82. Le plaignant soutient que les dispositions de cette proposition de loi impliqueraient des atteintes au droit syndical garanti par la Constitution de Costa-Rica sur le plan national, et par la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical sur le plan international.
- 83. Le gouvernement, sans discuter le fond des dispositions prévues par ladite proposition de loi, signale que, étant donné qu'il s'agit d'une simple proposition de loi soumise au Parlement par un député dans l'exercice de ses fonctions parlementaires ordinaires (article 123 de la Constitution : « ... l'initiative de la présentation des lois est attribution de tout membre de l'Assemblée législative et, par l'entremise des Ministres, du Pouvoir exécutif »), il ne saurait être question de lui imputer des responsabilités. C'est seulement après approbation par le Parlement d'une proposition de loi que le gouvernement peut prendre position à son égard.
- 84. Dans deux cas antérieurs (cas no 79 : Belgique, et cas no 80 : République fédérale d'Allemagne), le Comité, saisi d'allégations portant sur une législation en cours d'adoption, avait estimé ne pas devoir y donner suite en se fondant sur le fait que le caractère vague des allégations relatives à des projets de législation qui étaient formulées dans ces cas et les sérieux doutes que l'on pouvait avoir quant à l'adoption d'une mesure quelconque rendaient inutile un examen de ces allégations quant au fond. Il n'en est pas de même, à première vue, dans le cas présent puisque le plaignant a joint à sa plainte le texte de la proposition de loi mise en cause.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 85. Mais, comme le fait remarquer le gouvernement, il s'agit en l'espèce non pas d'un projet de loi (déposé par le gouvernement), comme dans le cas no 105 concernant la Grèce, mais d'une simple proposition de loi (présentée par un membre du Parlement, dans l'exercice normal de ses fonctions), qui n'a pas, pour le moment, été adoptée par le Parlement. Dans ces conditions, le Comité, tout en soulignant à nouveau l'importance qu'il attache aux principes selon lesquels les travailleurs devraient pouvoir s'affilier librement aux syndicats de leur choix et leurs organisations ne devraient pas faire l'objet d'une dissolution par voie administrative, mais prenant acte de l'assurance du gouvernement qu'il s'agit dans le cas d'espèce d'une simple proposition de loi d'initiative parlementaire, estime que, sans préjuger l'examen quant au fond qu'il pourrait être appelé à faire à la suite d'une nouvelle plainte si le projet était effectivement adopté, il n'y a pas lieu, pour l'instant, de donner suite à la plainte.