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A. Analyse de la plainte
A. Analyse de la plainte
- 605. La plainte présentée par l'Union nationale des stewards et cuisiniers de navire allègue que le gouvernement des Etats-Unis, sous prétexte de promulguer et de mettre en vigueur une réglementation tendant à assurer la sécurité nationale, a établi, en violation de la résolution no 128 de l'Assemblée générale, de l'article 55 c) de la Charte des Nations Unies, de la convention no 87 de l'O.I.T et des droits syndicaux fondamentaux, une liste noire applicable à l'industrie maritime. Il est allégué que cette initiative du gouvernement aurait pour objet:
- a) d'établir des listes noires et d'exclure de l'emploi dans l'industrie maritime et, en définitive, de tout emploi en général, les travailleurs syndiqués de l'industrie maritime qui ne sont pas en faveur de la politique suivie par le gouvernement actuel;
- b) de s'immiscer dans les affaires intérieures des syndicats en prenant des sanctions contre les membres des syndicats qui suivent la politique arrêtée par les syndicats de manière démocratique et mise à exécution par les dirigeants démocratiquement élus de ces syndicats;
- c) de créer une atmosphère d'intimidation et de panique tendant, en définitive, à empêcher les travailleurs en général de se livrer aux activités qu'exercent les simples citoyens comme, par exemple, de participer à des campagnes électorales politiques, de présenter au gouvernement, en association avec d'autres citoyens, des pétitions destinées à réparer des injustices, de lire des périodiques et autres publications de leur choix et de combattre la discrimination et la haine raciales.
- 606. Dans un exposé annexé à la plainte, le plaignant formule, à l'appui des allégations générales ci-dessus indiquées, un certain nombre d'allégations plus précises.
- Allégations concernant l'établissement d'un programme de sécurité nationale
- 607. Le règlement destiné à assurer la sécurité nationale dans l'industrie maritime, pris par le Président des Etats-Unis, aurait remplacé le programme de sécurité volontaire établi par les syndicats maritimes, les employeurs et le gouvernement. Seuls ont été invités à participer à la mise en oeuvre de ce programme les dirigeants syndicalistes dont l'accord était complètement acquis à la politique gouvernementale; néanmoins, ce programme serait en voie de désagrégation car quelques-uns des syndicats qui y avaient adhéré, à l'origine, se seraient rendu compte de sa véritable nature et auraient été sur le point de s'en dissocier. C'est pour cette raison que la réglementation de caractère coercitif dont il s'agit aurait été adoptée. De plus, la loi Magnuson, en vertu de laquelle cette réglementation a été promulguée, ne prévoit nullement la mise en oeuvre d'un tel programme et ne visait pas à en prévoir un.
- Allégations concernant la procédure et les modalités d'application du programme de sécurité
- 608. En vertu du règlement dont il s'agit, aucun travailleur ne peut occuper un emploi dans l'industrie maritime aux Etats-Unis à moins que son cas n'ait fait l'objet d'une vérification par le commandant de la garde côtière (Coast Guard) et qu'il n'ait été considéré comme ne constituant pas « un danger pour la sécurité publique». La procédure prévue à cet effet est aussi arbitraire qu'inéquitable. A cet égard, le plaignant allègue notamment les faits suivants.
- 609. Les travailleurs peuvent être renvoyés immédiatement de leur emploi par décision du commandant de la garde côtière, sans préavis et sans avoir été entendus.
- 610. Le travailleur à qui un « certificat de sécurité » est refusé et qui a été renvoyé de son emploi peut interjeter appel devant un comité local de recours (Local Appeal Board), mais ces comités sont très souvent partiaux. Bien qu'ils soient, en apparence, constitués sur une base tripartite (un représentant de la garde côtière, un représentant des travailleurs et un représentant des employeurs), la pratique qui consiste à désigner en qualité de troisième membre un représentant des «intérêts publics » a souvent pour résultat que le comité se trouve composé de deux représentants des employeurs et d'un représentant de la garde côtière. La partialité de ces comités se trouve accentuée du fait que les membres appelés à en faire partie sont soumis à une enquête encore plus rigoureuse que celle à laquelle sont astreints les travailleurs, ce qui a pour conséquence que les dirigeants des syndicats maritimes qui sont opposés à la politique gouvernementale n'ont jamais été admis à y siéger.
- 611. Lorsque l'affaire est entendue en appel, l'appelant ne reçoit communication que d'un exposé général des accusations portées contre lui et ne peut être confronté avec les témoins à charge.
- 612. Le Comité de recours procède à l'examen du cas en présumant la culpabilité de l'intéressé, puisque la réglementation en la matière prévoit que le certificat est refusé à moins qu'aucune raison suffisante ne permette de considérer que l'appelant constitue un danger pour la sécurité publique. De plus, les comités ont posé le principe que, lorsqu'il y a contradiction entre les preuves résultant d'informations reçues à titre confidentiel et celles fournies par l'appelant, cette contradiction est tranchée au détriment de l'appelant.
- 613. Au nombre des critères permettant de ne pas délivrer de certificat à l'intéressé figure le fait par lui d'être membre affilié ou étroitement associé à une association désignée par le secrétaire d'Etat à la Justice des Etats-Unis comme étant subversive, et cela malgré une récente décision de la Cour suprême selon laquelle l'exercice d'un tel pouvoir par le secrétaire d'Etat à la Justice est inconstitutionnel et injustifié.
- 614. Malgré le caractère fortement entaché de partialité à l'égard des travailleurs qui masque déjà cette procédure, le commandant de la garde côtière peut ne pas tenir compte, et, en fait, ne tient pas compte, des décisions du Comité recommandant la délivrance du certificat.
- 615. Même lorsqu'un travailleur reçoit le certificat de sécurité, il est susceptible de le voir retirer, à n'importe quel moment, sans préavis et sans qu'il soit entendu, avec comme seul recours, la possibilité d'utiliser, une fois de plus, la longue procédure de l'appel.
- 616. A tous les stades de la procédure, des retards importants, allant de un à neuf mois, interviennent et, pendant ces intervalles, il est interdit à l'appelant d'exercer son emploi.
- 617. Enfin, à l'appui de ces allégations, l'organisation plaignante cite le cas de onze débardeurs et marins à qui le certificat de sécurité aurait été refusé, et donne des détails sur la procédure qui se serait déroulée au sein des comités locaux de recours ; au cours de cette procédure, les intéressés se seraient vu poser des questions portant, notamment, sur leurs activités syndicales, leur religion, leur affiliation politique, leurs lectures et sur d'autres sujets également étrangers à la question. Il est allégué que le certificat délivré à l'un d'entre eux lui aurait été retiré à son retour au port, immédiatement après qu'il eut été élu en qualité de délégué syndical d'un navire et qu'il eut énergiquement rempli ses fonctions. Il en aurait été de même dans le cas d'un autre travailleur deux heures après qu'il eut prononcé un discours contre le programme de sécurité ; un troisième se serait vu refuser le certificat pour avoir participé, quelques années auparavant, à un pique de grève. Le nom de ces personnes n'est pas donné, est-il allégué, par crainte que des représailles soient prises contre elles. Les noms, dates et lieux seront indiqués, ajoute le plaignant, lorsque le gouvernement des Etats-Unis aura donné l'assurance que de telles mesures ne seront pas prises.
- 618. En conclusion, le plaignant soutient que le programme dont il s'agit est dirigé contre les syndicats indépendants et les militants syndicalistes qui ont essayé d'exercer leurs droits démocratiques, parce qu'ils se seraient opposés à la politique étrangère et intérieure du gouvernement actuel. Ce programme viserait a introduire la censure gouvernementale, en matière de politique syndicale et à empêcher les travailleurs maritimes, sous la menace de les priver de leurs moyens d'existence, de constituer des syndicats indépendants de leur choix. A ce titre, ce programme représente une grave menace pour la liberté syndicale.
B. Analyse de la réponse
B. Analyse de la réponse
- 619. Dans sa réponse, le gouvernement se réfère aux observations qu'il a présentées à l'occasion de la précédente plainte dirigée contre lui et que le Comité a examinées dans son deuxième rapport ; une partie de cette plainte comportait des allégations analogues visant le programme de sécurité (cas no 33; voir deuxième rapport du Comité de la liberté syndicale, paragraphes 81 à 137). Le gouvernement avait alors fourni certains détails qu'il n'a pas estimé nécessaire de mentionner à nouveau dans sa nouvelle réponse; il en est tenu compte dans les paragraphes suivants.
- 620. Le gouvernement présente les observations générales suivantes.
- 621. Le droit du gouvernement de prendre des mesures de précaution adéquates contre le sabotage et les activités subversives visant ses moyens maritimes, ne peut être mis en doute. Le plaignant lui-même ne le conteste pas ; il se borne à porter contre le gouvernement l'accusation qu'il tenterait, sous le couvert de mesures légitimes de sécurité, de faire figurer sur des listes noires et d'exclure de l'emploi certaines personnes et les membres de certains syndicats qui n'adhèrent pas à la politique du « gouvernement actuel» en vue de créer une atmosphère telle que les travailleurs maritimes et, en fin de compte, tous les travailleurs, soient privés de l'exercice de leurs droits civiques.
- 622. Le monde traverse, à l'heure actuelle, une crise grave ; à la suite de cet état de choses, les Etats-Unis ont assumé de lourds engagements - notamment en ce qui concerne la situation en Corée -, ce qui pèse fortement sur son industrie maritime. Il va sans dire que les activités déployées par les saboteurs, les traîtres, les espions et les communistes militants mettent en danger la sécurité maritime. (En ce qui a trait à la dernière catégorie mentionnée, des déclarations autorisées émanant de la Cour suprême des Etats-Unis indiquent que le parti communiste et ses membres constituent un danger pour la sécurité publique aux Etats-Unis, et qu'ils s'efforcent de changer la forme actuelle du gouvernement de ce pays en ayant recours, si nécessaire, à la force. Une Commission royale canadienne a abouti à des conclusions analogues.)
- 623. A la lumière des considérations qui précèdent, le gouvernement est complètement fondé à prendre les mesures nécessaires pour exclure les personnes appartenant à cette catégorie de tout emploi dans l'industrie maritime, et c'est dans ce but qu'une réglementation assurant la sécurité dans l'industrie maritime a été mise en vigueur.
- 624. La marine marchande américaine est soumise, depuis longtemps, à un statut spécial, en raison du rôle, plus vital que celui dévolu à une industrie ordinaire, qu'elle est appelée à jouer dans le domaine de la sécurité des Etats-Unis. On en trouve la preuve dans les subventions que lui accorde la loi, dans la politique proclamée par le Congrès et selon laquelle la marine marchande américaine doit pouvoir, en temps de guerre, servir d'auxiliaire aux forces armées, comme aussi dans le fait que les marins sont légalement obligés de remplir certaines conditions particulières en ce qui concerne leur expérience et leur aptitude physique. L'adjonction, en temps de crise, d'une condition concernant la sécurité se justifie parfaitement.
- 625. Le seul but que se propose et que proclame le programme de sécurité consiste à mettre les ressources maritimes à l'abri de l'espionnage et du sabotage ; ce plan n'est dirigé ni contre les syndicats ni contre leurs membres. Au contraire, la procédure qui règle son fonctionnement assure la protection intégrale des libertés des membres des syndicats aussi bien que celle des droits syndicaux en général. Les activités syndicales ne figurent pas parmi les causes spécifiquement énumérées comme autorisant le rejet d'une demande de certificat. Le programme dont il s'agit a l'appui de la grande majorité des syndicats du pays. Tant l'A.F.L que le C.I.O lui ont constamment assuré leur appui et leur collaboration. De fait, la seule opposition sérieuse qui se soit manifestée à son égard provient de l'organisation plaignante et de l'Union internationale des travailleurs des ports et des entrepôts (International Longshoremen's and Warehousemen's Union) qui ont, toutes deux, invariablement poursuivi et activement soutenu les objectifs du parti communiste.
- 626. Le gouvernement répond ensuite, d'une manière détaillée, aux allégations spécifiques contenues dans la plainte.
- Allégations concernant l'établissement du programme de sécurité
- 627. Le gouvernement décrit comme suit les origines du programme de sécurité.
- 628. Le programme de sécurité initial avait été instauré, sur une base volontaire, en juillet 1950, par des représentants des travailleurs, des employeurs et du gouvernement. Par la suite, une loi adoptée par le Congrès en 1950 a conféré au Président des Etats-Unis les pouvoirs lui permettant de prendre les règlements nécessaires pour assurer la sécurité de la marine marchande des Etats-Unis et des installations riveraines, lorsqu'il estimerait que la sécurité de la nation est compromise pour des causes diverses et, notamment, du fait d'activités subversives. Le Président ayant constaté cet état de choses a, le 19 octobre 1950, pris le règlement tendant à assurer la sécurité dans l'industrie maritime (Maritime Security Regulations), règlement fondé sur l'accord volontaire intervenu en la matière et visant à le compléter, et non à le remplacer. Après enquête menée par ses diverses commissions, le Congrès a manifesté son approbation en affectant, chaque année, les sommes nécessaires à l'exécution de ce programme.
- 629. En ce qui concerne l'allégation selon laquelle seuls les dirigeants syndicaux en complet accord avec la politique gouvernementale auraient été invités à participer à la mise en oeuvre du programme volontaire, il est indiqué qu'il eût été vain d'inviter à une telle participation les dirigeants syndicaux dont les visées étaient justement celles que le programme de sécurité avait pour objet de combattre. La simple opposition manifestée à l'égard de la politique gouvernementale n'a jamais été considérée comme un critère pour écarter les intéressés ; seules les menées subversives dirigées contre la sécurité nationale l'étaient.
- 630. Il a déjà été fait mention de l'appui continu accordé au programme par la majorité des syndicats. A cet égard, le gouvernement a fait figurer en annexe à sa réponse des coupures de journaux contenant des déclarations qui témoignent de l'appui ainsi accordé par les plus importants syndicats maritimes affiliés à l'A.F.L et au C.I.O. Une copie de l'accord volontaire intervenu à l'origine figure également en annexe.
- Allégations concernant la procédure et les modalités d'application du programme
- 631. Le gouvernement est d'avis que la procédure établie par le règlement en vue d'écarter certains travailleurs de l'industrie maritime assure la protection intégrale des droits individuels, et que l'accusation d'iniquité et de partialité portée contre cette procédure est mal fondée. Le gouvernement se réfère à nouveau aux observations qu'il a précédemment présentées et dans lesquelles la procédure est décrite comme suit.
- 632. La réglementation destinée à garantir la sécurité dans l'industrie maritime prévoit, notamment, que nul ne peut être employé à bord des navires des Etats-Unis du type désigné par le commandant de la garde côtière et que nul ne peut avoir accès, soit à un de ces navires, soit à toute installation riveraine désignée par le commandant s'il n'est pas en possession d'un certificat du commandant, qui doit s'être assuré au préalable qu'il s'agit d'une personne dont la conduite et le mode d'existence sont tels que sa présence n'est pas préjudiciable à la sécurité des Etats-Unis.
- 633. La réglementation édictée par le commandant indique, de façon claire et précise, les motifs en vertu desquels il rejettera une demande de certificat. Le commandant refusera de l'accorder à toute personne qui:
- A commis des actes de trahison ou des actes séditieux, ou s'est livrée à l'espionnage ou au sabotage ; a activement poussé ou contribué à l'accomplissement de tels actes par d'autres personnes ou s'est sciemment associée avec des personnes accomplissant de tels actes ;
- Est employée par un gouvernement étranger ou soumise à son influence dans des conditions qui peuvent compromettre la sécurité des Etats-Unis ;
- A activement préconisé ou appuyé le renversement du gouvernement des Etats-Unis par la force;
- A intentionnellement divulgué, sans autorisation, des renseignements militaires considérés comme confidentiels ou extra-confidentiels alors qu'elle devait raisonnablement savoir ou supposer que ceux-ci pouvaient être transmis à un gouvernement étranger, ou a intentionnellement communiqué de tels renseignements à des personnes qui n'étaient pas autorisées à en prendre connaissance;
- Est ou a été récemment membre affilié ou étroitement associé à toute organisation étrangère ou interne: i) qui est ou a été désignée par le secrétaire d'Etat à la Justice comme étant totalitaire, fasciste, communiste ou de nature subversive; ii) qui a adopté ou que le secrétaire d'Etat à la Justice a désigné comme ayant adopté une politique préconisant ou approuvant une action violente tendant à priver d'autres personnes des droits que leur accorde la Constitution des Etats-Unis; iii) qui vise ou qui a été désignée par le secrétaire d'Etat à la Justice comme visant à changer a forme du gouvernement des Etats-Unis par des moyens contraires à la Constitution.
- 634. Toutefois, cette dernière catégorie de motifs ne constitue pas un empêchement absolu à la délivrance du certificat et la personne intéressée peut l'obtenir s'il est prouvé, plus que par une simple dénégation que les intérêts des Etats-Unis du point de vue de la sécurité ne seront pas compris de ce fait.
- 635. Lorsqu'une personne désire avoir accès à des installations riveraines, sa demande peut être également rejetée si cette personne ne présente pas, sous d'autres rapports, et pour d'autres raisons, les garanties normales de sécurité lui permettant d'avoir accès à de telles installations (aliénation mentale sans preuve de guérison, condamnation pour incendie volontaire, pour trafic illégal de stupéfiants, pour espionnage, sabotage ou trahison ; ivresse pendant le travail ou prédisposition à l'usage de narcotiques sans preuve de guérison).
- 636. Le refus du commandant n'intervient que « si, d'après les preuves et renseignements recueillis, il existe des motifs raisonnables ». Il n'y a pas présomption de culpabilité.
- 637. Lorsqu'une demande est rejetée, la personne intéressée possède un droit de recours auprès du Comité local de recours, qui fait des recommandations au commandant et, si la décision du commandant lui est toujours contraire, auprès du Comité national.
- 638. Ces deux comités sont constitués sur une base tripartite (un membre représentant la garde côtière dans l'intérêt public, un deuxième représentant les employeurs et le troisième les travailleurs). La procédure prévoit que l'appelant, qui doit recevoir une réponse écrite indiquant le motif pour lequel sa demande a été rejetée, a le droit d'être entendu; il peut comparaître personnellement et être représenté par un avocat ou par toute autre personne de son choix. Il a, à l'égard des membres du Comité qui doit connaître de son appel, un droit absolu de récusation ainsi qu'un droit de récusation pour cause de prévention. L'audience peut être publique ou privée et un compte rendu sténographique des débats est établi. La recommandation du Comité, formulée à la majorité des voix, ainsi que tous les éléments de preuve que la procédure a fait apparaître sont communiqués au commandant qui peut, soit approuver, soit rejeter la recommandation du Conseil, soit encore renvoyer le cas au Comité en vue d'un examen.
- 639. L'appelant reçoit notification par écrit de la décision du commandant et, si elle lui est contraire, il est informé de son droit de recours auprès d'une instance supérieure.
- 640. En ce qui concerne les allégations spécifiques formulées par le plaignant, le gouvernement déclare que ces accusations ne se réfèrent pas aux droits syndicaux, mais visent plutôt les modalités d'application et la question de la partialité du programme de sécurité ; elles sont donc, de ce fait, dénuées de pertinence. Le gouvernement présente, néanmoins, les observations suivantes à leur sujet.
- 641. Les lois internes des Etats-Unis prévoient que, si de telles restrictions sont considérées nécessaires pour prévenir l'espionnage et le sabotage, en période de crise, il ne sera nécessaire de recourir ni à un préavis ni à un interrogatoire de l'intéressé et, d'ailleurs, même en temps ordinaire, il n'est pas nécessaire d'entendre l'intéressé au début d'une procédure administrative. Malgré ces dispositions, un préavis considérable est donné au cours de l'exécution du programme de sécurité et des mesures sont prises pour que l'intéressé soit entendu avec soin.
- 642. Le règlement pris en la matière prévoit l'établissement, par le secrétaire d'Etat au Travail, d'une liste de représentants des travailleurs, des employeurs et des intérêts publics qui peuvent être appelés à siéger, à tour de rôle, dans les comités locaux de recours ; le choix est ensuite fait par le président du comité de recours. Lorsque l'appelant n'est pas affilié à un syndicat, ou lorsque aucun membre du syndicat auquel il appartient n'a été inclus dans la liste, un membre représentant les intérêts publics est désigné; il s'agit généralement d'un avocat n'ayant aucun rapport avec les travailleurs ou avec les employeurs. Comme il a été déjà indiqué, l'appelant a un droit absolu de récusation et un droit de récusation pour cause de prévention.
- 643. En ce qui concerne l'enquête préalable au sujet des membres des comités, une telle enquête est nécessaire puisque ces membres ont accès à des dossiers secrets contenant des informations dont la divulgation serait préjudiciable à la sécurité nationale. L'accusation selon laquelle des agents syndicaux se seraient vu, en raison de leurs activités syndicales, refuser le certificat qui leur aurait permis de siéger au sein des comités de recours est dénuée de tout fondement; un tel refus n'est basé que sur des motifs personnels d'inéligibilité.
- 644. Les deux seules restrictions apportées à la protection dont jouissent les appelants au cours de la procédure qui se déroule devant les comités locaux de recours consistent dans le fait qu'ils ne reçoivent communication que d'un exposé général des chefs d'accusation pesant sur eux, et qu'ils ne sont pas confrontés avec les témoins confidentiels et ne prennent pas connaissance des preuves, de caractère secret, existant contre eux. Ces restrictions sont nécessaires pour la sécurité des Etats-Unis qui doivent s'en remettre, dans une large mesure, pour leur protection contre l'espionnage et le sabotage, à des sources confidentielles d'information qui perdraient toute valeur si elles devaient être divulguées en audience publique. Le gouvernement considère que ces restrictions sont justes et raisonnables.
- 645. Il est normal que le certificat de sécurité puisse être retiré après avoir été accordé ; mais une telle mesure n'est prise que lorsque des informations complémentaires ou nouvelles révèlent que c'est à tort que le certificat initial avait été délivré.
- 646. Enfin, on ne prétend pas que ce plan soit infaillible. Certains retards sont inévitables lorsqu'il s'agit d'un plan de cette envergure ; cependant, on s'efforce de les réduire au minimum.
- 647. En ce qui concerne l'historique que le plaignant fait de certains cas particuliers, le gouvernement déclare ne pas être en mesure de répondre aux allégations ainsi avancées par le plaignant puisque celui-ci ne cite aucun nom, ni aucun fait susceptible d'identifier ces cas. Le gouvernement exprime des doutes quant à la bonne foi du plaignant en faisant observer que celui-ci a fait circuler des tracts donnant les noms et reproduisant les photographies de personnes considérées comme constituant un danger pour la sécurité, et contenant des accusations déformant les faits, encore plus que la plainte actuelle. La seule sanction prévue par le programme de sécurité consiste dans le refus de délivrer le certificat; il ne saurait être question de « représailles ». Le gouvernement tient, cependant, à présenter quelques commentaires d'ordre général au sujet des accusations implicitement contenues dans l'historique des cas cités.
- 648. Le certificat de sécurité n'a jamais pu être retiré dans le court délai que l'on mentionne dans la plainte pour certains cas. Des mesures de cet ordre ne sont prises qu'après enquête minutieuse de la part des services du gouvernement. On peut affirmer, d'une manière catégorique, que jamais un cas semblable à celui du délégué syndical d'un navire dont le certificat aurait été retiré à son retour au port, ne s'est produit.
- 649. La participation à un piquet de grève n'a jamais été considérée comme un critère autorisant le refus de délivrance du certificat, pas plus qu'aucune autre activité syndicale en soi.
- 650. L'insinuation selon laquelle des questions n'ayant que peu ou pas de rapport avec la sécurité auraient été posées aux cours de l'instruction de l'affaire par les comités locaux de recours, et le refus de délivrer le certificat aurait été fondé sur les réponses données à de telles questions, est injustifiée. Plusieurs questions de caractère général sont forcément posées aux appelants afin de déterminer la mesure dans laquelle il convient de prêter foi à leurs déclarations et afin d'établir leur identité.
- 651. Enfin, une présentation aussi unilatérale que celle qui a été faite de ces cas, dans laquelle le plaignant ne mentionne ni les noms ni les faits permettant d'identifier les cas et ne fait figurer que ce qu'il désire faire connaître tout en omettant ce qu'il ne veut pas révéler, ne saurait constituer une documentation pouvant justifier l'examen d'un plainte.
- 652. On peut trouver, déclare le gouvernement, la preuve que le programme n'a pas d'autre but que celui mentionné ci-dessus dans les statistiques relatives aux résultats des enquêtes dont il s'agit. Au 1er mai 1952, 484.670 travailleurs maritimes avaient fait l'objet d'une vérification de loyauté. Sur ce nombre, seuls 3.716 se sont vu refuser le certificat au début. Sur les 29.143 cas portés en appel, 1.195 ont abouti à la délivrance de certificats, tandis que 562 étaient encore en suspens à la date indiquée. En définitive, le certificat n'a été refusé que dans 2.531 cas, ce qui ne représente que près de 0,5 pour cent du nombre total de cas examinés. En outre, le pourcentage élevé que représentent les cas d'appel ayant abouti à la délivrance de certificats - soit quelque 75 pour cent du total des cas instruits - suffit à souligner l'impartialité qui caractérise la procédure suivie.
- 653. Ces chiffres démontrent clairement, indique le gouvernement, qu'il n'y a pas eu de discrimination à l'égard de certains syndicats en particulier; il est évident qu'un grand nombre de membres appartenant à l'organisation plaignante elle-même ont dû recevoir leur certificat.
- 654. En conclusion, le gouvernement indique que les personnes prétendument lésées, ou dont les droits auraient été violés, bénéficient effectivement de l'entière protection de la Constitution des Etats-Unis, et ont accès aux tribunaux pour assurer cette protection. Deux procès sont actuellement en cours par devant les tribunaux. L'un, qui a pour objet de faire condamner l'exécution du programme a déjà été plaidé, mais la décision n'a pas encore été publiée. Dans le deuxième cas, il s'agissait de poursuites pénales pour violation de l'interdiction d'employer, dans l'industrie maritime, des travailleurs non munis du certificat de sécurité ; la plainte a été rejetée, mais le gouvernement a interjeté appel de cette décision qu'il considère comme erronée. L'appel est encore en cours.
- 655. Il ressort clairement des circonstances qui précèdent, déclare le gouvernement, qu'il existe effectivement, sur le plan national, une procédure permettant d'assurer la protection contre les prétendues violations commises, et que les intéressés ont recours à cette procédure. Il semble donc qu'il n'est ni approprié ni opportun de porter l'examen de ces allégations sur le plan international.
- 656. Le gouvernement joint à sa réponse le texte de la loi Magnuson (Public Law 679 - 1st Congress), du règlement sur la sécurité dans l'industrie maritime et de la décision du tribunal ayant rejeté les poursuites pénales dont il est fait menton plus haut.
C. C. Conclusions du comité
C. C. Conclusions du comité
- 657. Le Conseil d'administration se souviendra qu'une précédente plainte contre le gouvernement des Etats-Unis, émanant de la Fédération syndicale mondiale - plainte qui a fait l'objet du cas no 33 - et qui a été examinée par le Comité dans son deuxième rapport, contenait une allégation aux termes de laquelle le gouvernement des Etats-Unis aurait établi des listes noires applicables à l'industrie maritime. Les allégations formulées dans le cas no 33 étaient fondées sur la loi Magnuson ainsi que sur les procédures instituées et les règlements pris en application de cette loi, qui sont également visés par les allégations formulées dans la présente plainte. Dans le cas no 33, le Comité, après avoir examiné la plainte et la réponse du gouvernement ainsi que les procédures instituées et les règlements pris en application de la loi visée par la plainte, a estimé que l'allégation concernant l'établissement de listes noires ne devait pas être retenue et il a conclu en ces termes:
- Etant donné que le réglementation en question complète un plan de sécurité volontaire établi sur une base tripartite et prévoit un droit d'appel devant des conseils tripartites et, d'autre part, que l'allégation formulée par le plaignant n'est étayée d'aucun exemple permettant de supposer que la réglementation sur la sécurité dans l'industrie maritime ait effectivement servi à l'établissement de listes noires à des fins de discrimination syndicale, le Comité recommande au Conseil d'administration de décider que le plaignant n'a pas fourni de preuves suffisantes pour justifier le renvoi de l'allégation et, en conséquence, que cette allégation ne doit pas être retenue.
- Cette conclusion a été approuvée par le Conseil d'administration.
- 658. La plainte actuelle, qui a été présentée au Conseil économique et social après que le Comité de la liberté syndicale eut formulé ses recommandations au sujet de la plainte soumise par la Fédération syndicale mondiale, est beaucoup plus détaillée que la plainte précédente.
- 659. Les allégations formulées par le plaignant sont toutefois substantiellement identiques à celles qui concernaient l'établissement des listes noires et qui avaient fait l'objet du cas no 33. Il est allégué que, sous le prétexte d'édicter une réglementation sur la sécurité nationale, le gouvernement des Etats-Unis a établi des listes noires applicables à l'industrie maritime, dans l'intention de contraindre les syndicats à se conformer à la politique du gouvernement et de faire figurer sur des listes noires et d'exclure de l'emploi dans l'industrie maritime et, en fin de compte, de tout emploi en général, les syndicalistes qui n'adhèrent pas à la politique gouvernementale, soit parce qu'ils appuient la politique démocratiquement déterminée par leurs propres syndicats et qui différerait de la politique gouvernementale, soit parce qu'ils s'opposent a cette politique lorsqu'elle est alignée sur celle du gouvernement. L'objectif final vise par le programme de sécurité serait, selon le plaignant, de créer une atmosphère telle que les travailleurs de l'industrie maritime et, en fin de compte, tous les travailleurs en général, soient privés de l'exercice des droits normaux de citoyens. A l'appui de cette allégation, le plaignant décrit certaines caractéristiques de la procédure instituée en vertu du programme de sécurité qui, à son avis, seraient inéquitables et auraient été utilisées pour favoriser les visées que le plaignant attribue aux auteurs de ce programme. Le plaignant fait l'historique du cas d'un certain nombre de travailleurs de l'industrie maritime qu'il ne nomme pas, et qui auraient été inscrits sur des listes noires parce qu'ils seraient opposés à la politique du gouvernement, ou à cause de leur affiliation à des syndicats ou de leurs sympathies à l'égard de syndicats qui seraient opposés à cette politique, ou encore en raison de leurs activités syndicales.
- 660. Il est clair que l'allégation soumise par le plaignant ne peut pas, de prime abord, être écartée sous prétexte que, même si elle était prouvée, elle ne constituerait pas une atteinte à l'exercice des droits syndicaux.
- 661. Il convient donc d'examiner si, compte tenu de la réponse du gouvernement ces allégations sont suffisamment précises pour appeler un examen plus approfondi.
- 662. Bien que le plaignant allègue que le programme de sécurité a, en définitive, pour but d'écarter certains travailleurs de l'industrie maritime de tout emploi, et de créer une atmosphère telle que tous les travailleurs soient « en fin de compte» privés de l'exercice de leurs droits normaux de citoyens, l'allégation formulée ne traite, en fait, que de l'industrie maritime. Il ne semble donc pas que les allégations d'ordre plus général formulées par le plaignant méritent d'être retenues, étant donné l'absence manifeste de preuves des allégations portant sur des questions autres que celles qui concernent la réglementation sur la sécurité dans l'industrie maritime.
- 663. Il convient également de noter que le plaignant ne met pas en doute le droit du gouvernement - comme celui-ci l'indique du reste dans sa réponse - d'édicter des mesures adéquates pour protéger ses ressources maritimes contre l'espionnage, le sabotage et les activités subversives. Le plaignant allègue que la loi en vertu de laquelle ces mesures ont été prises ne prévoit pas l'institution d'une procédure d'enquête au sujet des travailleurs maritimes pour s'assurer si le fait de les employer constitue ou non un danger pour la sécurité nationale. Il n'allègue pas, par contre, qu'une telle procédure soit incompatible avec la loi. D'ailleurs, l'emploi, par le plaignant, de l'expression «sous prétexte de » semble également impliquer que le gouvernement aurait le droit de prendre des mesures légitimes de sécurité.
- 664. A cet égard, le gouvernement déclare que le plan de sécurité a été rendu nécessaire par suite de l'état de crise qui prévaut, à l'heure actuelle, dans le monde. Les Etats-Unis ont assumé, ajoute-t-il, de lourdes responsabilités à l'étranger - notamment en ce qui concerne la situation en Corée -, ce qui pèse très lourdement sur leur industrie maritime. Cette industrie a, depuis longtemps, été considérée par le gouvernement sous un angle spécial en raison du rôle, plus vital que celui dévolu à une industrie ordinaire, qu'elle est appelée à jouer dans le domaine de la sécurité nationale ; on en trouve la preuve, affirme le gouvernement, dans les subventions qui sont accordées à cette industrie par la loi, dans la politique proclamée par le Congrès, selon laquelle la marine marchande doit pouvoir, en temps de guerre, servir d'auxiliaire aux forces armées, et dans le fait que les marins doivent remplir certaines conditions particulières en ce qui concerne l'expérience, l'aptitude physique et, à l'heure actuelle, la sécurité. Le gouvernement signale que les espions, les saboteurs, les traîtres et les autres éléments subversifs constituent une menace à la sécurité dans l'industrie maritime, et que c'est à bon droit qu'ils doivent être exclus de tout emploi dans cette industrie. C'est pour cette raison, et pour cette raison uniquement, que le programme de sécurité a été instauré, affirme le gouvernement, tout en ajoutant qu'on ne saurait déceler, ni dans la procédure instituée par ce programme ni dans ses modalités pratiques d'application, la moindre tentative d'établir une discrimination à l'encontre des syndicats ou des activités syndicales. En instaurant ce plan, le Président des Etats-Unis a, déclare le gouvernement, agi en vertu de l'autorité que lui conférait la loi de 1950 du Congrès (loi Magnuson), et le Congrès, après que ses commissions eurent reçu des informations au sujet du programme et après que des investigations eurent été menées sur place, l'a approuvé en lui affectant chaque année les sommes nécessaires à son fonctionnement.
- 665. De fait, la loi Magnuson - dont le texte est joint à la réponse du gouvernement - prévoit que le Président peut prendre des mesures et édicter des règlements tendant à protéger les ressources maritimes contre toute destruction, toute perte ou tout dommage, chaque fois qu'il constatera que la sécurité des Etats-Unis est mise en danger, notamment par des activités subversives.
- 666. L'allégation revient donc à dire qu'un programme légitime de sécurité est, en fait, utilisé dans le but d'inscrire sur des listes noires et d'exclure de leur emploi des personnes qui sont en désaccord avec la politique du gouvernement et de contraindre, par ce moyen, les syndicats maritimes à se conformer à cette politique et c'est sous cet angle qu'elle devrait être examinée. Comme il a déjà été dit plus haut, il s'agit d'une allégation substantiellement identique à celle du cas no 33 qui n'a pas été retenue.
- Allégations relatives à la procédure prévue par le programme.de sécurité
- 667. En prétendant que le programme de sécurité vise et est appliqué de manière à établir une discrimination contre certains syndicalistes et les membres de certains syndicats, le plaignant présente une série d'allégations relatives à certains aspects de la procédure établie en application du règlement sur la sécurité, et cela en vue de démontrer que cette procédure serait inéquitable et partiale. C'est ainsi qu'il soutient que, par décision du commandant de la garde côtière, des travailleurs maritimes sont renvoyés sans préavis et exclus de tout emploi dans l'industrie maritime, et cela sans avoir été avisés ni entendus. Il soutient également que, lorsqu'un travailleur, qui s'est vu refuser le certificat de sécurité, est entendu en appel, la procédure suivie est inéquitable et partiale, du fait qu'il ne lui est permis de prendre connaissance que d'un exposé général des chefs d'accusations qui pèsent sur lui, qu'il n'est pas confronté avec les témoins de l'accusation, que le Comité de recours examine chaque cas en présumant l'accusé coupable et que ce comité tranche au détriment de l'accusé les contradictions qui pourraient exister entre son témoignage et les témoignages confidentiels déposés contre lui; il est également allégué que le fait que l'intéressé est membre, affilié ou étroitement associé à une organisation désignée par le secrétaire d'Etat à la Justice des Etats-Unis comme étant une organisation subversive, continue à être utilisé comme un critère en vertu duquel le certificat de sécurité lui est refusé, et cela malgré une décision récente de la Cour suprême, d'après laquelle l'exercice d'un tel pouvoir par le secrétaire d'Etat à la Justice serait anticonstitutionnel et abusif ; que le commandant de la garde côtière peut ne pas tenir compte des recommandations des comités de recours, et qu'il en est ainsi en réalité ; que, même après avoir obtenu le certificat dé sécurité, un travailleur peut se voir à nouveau retirer cette garantie, sans avoir été avisé ou entendu, et qu'il n'a alors d'autre recours que d'engager une fois de plus la longue procédure d'appel; et qu'à chaque stade de la procédure interviennent de longs délais, pendant lesquels il ne peut trouver un emploi dans sa profession.
- 668. En réponse à ce groupe d'allégations, le gouvernement indique que le programme de sécurité a été soigneusement établi afin qu'il puisse atteindre son objectif en limitant le moins possible les droits individuels et que la procédure mise en oeuvre accorde aux personnes demandant un certificat de sécurité toute protection judiciaire compatible avec la sécurité. Pour prouver qu'il en est ainsi, le gouvernement fournit un exposé détaillé du règlement et de la procédure suivis en application du programme de sécurité, et annexe à sa réponse le texte de ce règlement.
- 669. D'après le gouvernement, le règlement de sécurité maritime prévoit que nul ne peut être employé dans les régions de l'industrie maritime désignées par le commandant de la garde côtière, s'il n'a pas demandé et obtenu les documents appropriés du commandant de la garde côtière, qui doit, en premier lieu, s'assurer qu'il s'agit d'une personne dont le caractère et la manière de vivre sont tels que sa présence ne constituerait pas un danger pour la sécurité des Etats-Unis.
- 670. Le règlement pris par le commandant précise clairement et dans le détail les raisons pour lesquelles un certificat de sécurité doit être refusé, à savoir lés cas dans lesquels l'intéressé:
- 1) a commis des actes de trahison ou des actes séditieux, ou s'est livré à l'espionnage ou au sabotage, ou a soutenu ou aidé d'autres personnes à commettre de tels actes ;
- 2) est employé par un gouvernement étranger ou est soumis à l'influence d'un gouvernement étranger dans des circonstances qui peuvent compromettre les intérêts des Etats-Unis en matière de sécurité;
- 3) a activement préconisé ou appuyé le renversement du gouvernement des Etats-Unis par la force ;
- 4) a intentionnellement divulgué des renseignements militaires secrets sans autorisation, alors qu'elle pouvait raisonnablement savoir ou supposer que ces renseignements pourraient être transmis à un gouvernement étranger, ou a intentionnellement communiqué de tels renseignements à des personnes qui n'étaient pas autorisées à en prendre connaissance; et
- 5) est ou a récemment été membre, affilié ou étroitement associé à toute organisation qui:
- a) est ou a été désignée par le secrétaire d'Etat à la Justice comme étant totalitaire, fasciste, communiste ou subversive;
- b) a adopté ou a été désignée par le secrétaire d'Etat à la Justice comme ayant adopté une politique préconisant ou approuvant une action violente tendant à priver d'autres personnes des droits que leur accorde la Constitution des Etats-Unis ;
- c) vise ou a été désignée par le secrétaire d'Etat à la Justice comme visant à modifier la forme du gouvernement des Etats-Unis par des moyens anticonstitutionnels. Ce dernier groupe de considérations ne constitue toutefois pas un empêchement à la délivrance du certificat de sécurité, car il est précisé que ce certificat peut néanmoins être accordé s'il est démontré, plus que par une simple dénégation, que les intérêts des Etats-Unis du point de vue de la sécurité ne seront pas compromis de ce fait.
- 671. Il est déclaré que le commandant ne prend une décision qu'après que les services de recherches du gouvernement se sont livrés à des recherches approfondies au sujet de l'intéressé.
- 672. Bien que l'intéressé ne soit pas entendu à ce stade de la procédure, ainsi que le gouvernement l'admet, la loi nationale des Etats-Unis ne prévoit pas l'audition des demandeurs au début d'une procédure administrative, mais seulement à un stade ultérieur, condition qui est remplie en ce qui concerne le programme de sécurité.
- 673. Une personne à laquelle le certificat de sécurité est refusé peut interjeter appel auprès d'un comité local de recours qui est composé d'un représentant de la garde côtière, d'un représentant des travailleurs et d'un représentant des employeurs. Le Comité de recours doit connaître de tous les appels, et l'appelant a le droit de présenter son cas en audience publique, dont il est tenu un procès-verbal sténographique; il peut également être représenté par un avocat. Afin de s'assurer de l'impartialité du comité de recours, l'appelant a un droit absolu de récuser un représentant des travailleurs et un représentant des employeurs au sein du comité et il a également un droit conditionnel de récuser d'autres membres du comité, en indiquant la cause de la récusation.
- 674. Le gouvernement déclare que les seules restrictions à la protection judiciaire garantie à l'appelant sont qu'il ne lui est donné qu'un exposé général des chefs d'accusation pesant sur lui, qu'il n'est pas confronté avec les témoins confidentiels et que les informations secrètes existant contre lui ne lui sont pas communiquées. Le gouvernement soutient que ces restrictions sont nécessaires à la sécurité des Etats-Unis, dont la protection contre l'espionnage et le sabotage dépend en grande partie de sources d'information confidentielles, qui perdraient toute valeur si elles venaient à être révélées en audience publique.
- 675. En formulant ses recommandations, le comité de recours doit s'inspirer des mêmes considérations et critères que ceux qui sont établis pour le commandant de la garde côtière. La recommandation est faite à la majorité et elle est transmise au commandant en même temps que toutes les preuves contenues dans le dossier. Le commandant peut soit approuver, soit rejeter la recommandation, soit renvoyer le cas devant le Comité afin qu'il fasse l'objet d'un nouvel examen.
- 676. Dans le cas où la décision du commandant serait toujours contraire à l'appelant, celui-ci a un nouveau droit de recours devant le Comité national de recours, et il doit être avisé de ce droit par écrit au moment où lui est communiquée la décision du commandant.
- 677. Si, une fois que le certificat de sécurité a été accordé, de nouvelles informations ou des informations complémentaires sont reçues et qu'il en ressort que ce certificat a été accordé à tort, la personne intéressée peut se voir retirer ce certificat. D'après le gouvernement, une telle règle n'est pas de nature à justifier une plainte.
- 678. En conclusion, le gouvernement soutient que les allégations du plaignant, relatives à la procédure suivie en application du programme de sécurité, ne semblent pas constituer une plainte en violation des droits syndicaux, mais paraissent plutôt contester le bien-fondé et l'équité de la procédure applicable en la matière ; comme telles, elles seraient entièrement étrangères à la question.
- 679. Le gouvernement déclare qu'il ne prétend pas que ce programme n'ait pas comporté de fautes et signale que, dans l'exécution d'un programme aussi étendu, des erreurs et des retards sont inévitables. Certainement, le programme place plusieurs des individus intéressés dans une situation matérielle pénible, mais le gouvernement a fait tout son possible pour limiter au minimum les conséquences de cet ordre. La procédure d'appel qui a été établie vise à réparer les erreurs, et le fait que, dans 75 pour cent environ des cas examinés conformément à cette procédure, les intéressés ont pu obtenir le certificat de sécurité, prouve que le résultat escompté a été atteint ; dans la grande majorité des cas, les appels ont été réglés avec célérité.
- 680. Le Comité estime que, dans la mesure où le libre exercice des droits syndicaux serait mis en cause dans les différents cas dont il est saisi, il serait de son devoir d'examiner de près les procédures instituées en matière de contrôle de loyauté qui pourraient avoir pour effet de restreindre le libre exercice des droits syndicaux ou d'y porter atteinte. Dans les cas, cependant, où aucun droit syndical n'est directement mis en cause, le Comité estime qu'il ne rentre pas dans son mandat d'examiner dans quelle mesure les pays dont il s'agit ont cru devoir introduire, pour des raisons de sécurité, la procédure secrète en matière de contrôle de loyauté des salariés occupés dans une industrie qui se trouve plus ou moins sur le pied de guerre, comme c'est actuellement le cas en ce qui concerne l'industrie maritime des Etats-Unis. Le gouvernement a déclaré qu'aucune restriction n'est imposée à l'exercice des droits syndicaux en tant que tels, que les activités syndicales ne figurent pas parmi les raisons énumérées de manière détaillée dans la loi et susceptibles d'entraîner le refus du certificat de sécurité, que le secret prévu en matière de procédure ne représente qu'un minimum indispensable pour satisfaire aux exigences de la sécurité nationale, de sorte que le préjudice causé aux intéressés dans l'exercice de leurs droits individuels est en fait réduit au minimum, et que la procédure comporte des garanties et des sauvegardes contre les abus éventuels (par exemple : droits de recours, de comparution personnelle, de récusation, de représentation par un avocat, énumération détaillée des raisons susceptibles d'entraîner le refus du certificat de sécurité, etc.). Par ailleurs, le Comité note que tant la Fédération américaine du travail (A.F.L) que le Congres des organisations industrielles (C.I.O) semblent être d'avis que, comme le gouvernement l'affirme, la procédure en question n'a pas pour effet de porter préjudice aux intéressés en raison de leur activité syndicale.
- 681. Dans ces conditions, le Comité, tout en soulignant, comme il l'a déjà fait dans des cas précédents, l'importance qu'il attache au principe d'après lequel toute personne inculpée devrait bénéficier des garanties d'une procédure judiciaire régulière, estime que, dans le cas d'espèce, aucune atteinte ne semble avoir été portée à l'exercice des droits syndicaux et, par conséquent, il recommande au Conseil d'administration de décider que cette partie du cas n'appelle pas un examen plus approfondi.
- Allégations relatives aux modalités d'application du programme de sécurité
- 682. Le plaignant a formulé les allégations suivantes tendant à démontrer que la procédure établie en vertu du programme de sécurité a été appliquée de manière à porter atteinte aux droits syndicaux et à justifier ses allégations au sujet des objectifs de ce programme. A l'appui de ses allégations, il avance les arguments suivants:
- a) Le programme a été établi en raison de l'échec du précédent programme volontaire de sécurité, certains des syndicats qui avaient, à l'origine, adhéré à ce programme en ayant découvert le caractère véritable et se disposant à s'en dissocier.
- b) Les groupements qui avaient été invités à l'origine à participer à l'application du programme volontaire ont été soumis à une enquête minutieuse pour que seuls y participent des dirigeants syndicaux qui approuvent sans réserve la politique du gouvernement et des mesures semblables ont été prises en ce qui concerne les membres des comités locaux de recours représentant les employeurs et les travailleurs, ce qui a eu pour résultat d'exclure de ces comités les dirigeants syndicaux opposés à la politique du gouvernement.
- c) Les comités locaux de recours comprennent fréquemment un représentant de la garde côtière et deux des employeurs, et ceci à la suite de la pratique consistant à désigner, en qualité de membres représentants des «intérêts publics », des personnes manifestement favorables aux employeurs.
- d) Des certificats de sécurité ont été systématiquement refusés aux militants syndicalistes qui ont exercé leurs droits de membres de syndicats dans un sens contraire à la politique du gouvernement et se sont prononcés en faveur de la paix et des droits civiques et contre la discrimination raciale et religieuse. Pour appuyer cette allégation, le plaignant expose le cas de onze travailleurs maritimes qui se seraient vu refuser le certificat de sécurité et fournit des informations sur leur audition par les comités de recours. Il est soutenu dans la plainte que ces travailleurs ont été interrogés sur des questions étrangères à la sécurité comme leur affiliation syndicale, politique, leur appartenance sociale et religieuse, leurs activités syndicales, leurs lectures, leur situation de famille, etc. La plainte laisse entendre que ces questions ont constitué des critères sur la base desquels le certificat de sécurité a été refusé. Il est allégué qu'une de ces personnes s'est vu refuser ce certificat à son retour d'un voyage au cours duquel elle avait été élue au poste de délégué syndical d'un navire et avait rempli ses fonctions de manière énergique. Une seconde se serait vu refuser le certificat de sécurité deux heures après avoir prononcé un discours contre le programme de sécurité et, dans un troisième cas, la raison pour laquelle ce certificat a été refusé aurait été la participation de l'appelant à un piquet de grève quelques années auparavant.
- 683. Il est indiqué que le nom des personnes intéressées dans ces différents cas n'est pas mentionné, par peur de mesures de représailles qui pourraient être prises contre elles. Les noms, les dates et les lieux seront donnés, ajoute le plaignant, si le gouvernement des Etats-Unis peut garantir que de telles mesures ne seront pas prises à leur encontre.
- 684. Il est évident que les allégations des plaignants ne peuvent pas être rejetées d'office et que l'on ne saurait estimer que, même si les faits allégués avaient été prouvés, ils n'auraient pas constitué une atteinte à l'exercice des droits syndicaux.
- 685. Il est donc nécessaire d'examiner si, compte tenu de la réponse du gouvernement, ces allégations semblent suffisamment précises pour mériter un examen plus approfondi.
- Allégation a). - 686. En réponse à cette allégation, le gouvernement déclare que, loin de s'opposer au programme de sécurité, la grande majorité des syndicats des Etats-Unis lui ont donné et continuent à lui donner leur appui. Le Congrès des organisations industrielles (C.I.O) et la Fédération américaine du travail (A.F.L) n'ont jamais cessé d'accorder leur appui à ce programme et de collaborer à son exécution. En réalité, la seule opposition véritable est venue de l'organisation plaignante elle-même et du Syndicat international des travailleurs des ports et des entrepôts (International Longshoremen's and Warehousemen's Union), qui sont toutes deux des organisations qui ont constamment soutenu et servi les desseins du communisme. Le gouvernement annexe à sa réponse des déclarations émanant de deux des plus importants syndicats maritimes affiliés au C.I.O et à l'A.F.L, déclarations faites dans le courant de l'année passée et indiquant qu'elles donnent leur appui et leur approbation au programme de sécurité.
- 687. Etant donné les déclarations du gouvernement et le fait que le plaignant n'a pas présenté de preuves susceptibles de corroborer son allégation, le Comité conclut que cette allégation ne devrait pas être retenue.
- Allégation b). - 688. En réponse à cette allégation, le gouvernement déclare qu'il aurait été vain d'appeler à participer au programme de sécurité volontaire des dirigeants syndicaux dont les visées étaient justement celles que ce programme était destiné à combattre.
- 689. En ce qui concerne l'allégation d'après laquelle les dirigeants syndicaux se sont vu exclure de la participation au programme de sécurité volontaire et ont été écartés des comités de recours en raison de leurs activités syndicales, le gouvernement déclare que les seuls critères utilisés pour écarter certaines personnes ont été ceux établis dans le règlement et que les activités syndicales ne sont jamais considérées comme une raison de refuser à une personne le certificat de sécurité. Il déclare également qu'il est nécessaire d'écarter certaines personnes des comités de recours, étant donné que les membres de ces comités peuvent connaître les dossiers confidentiels contenant des informations dont la divulgation porterait préjudice à la sécurité nationale.
- 690. Etant donné les observations du gouvernement et le fait que, comme pour l'allégation précédente, le plaignant n'a pas apporté d'indications précises sur ces points, le Comité estime que cette allégation ne devrait pas être retenue, du fait que le plaignant n'a pas fourni des preuves suffisantes pour justifier un examen plus approfondi de cet aspect de la plainte.
- Allégation c). - 691. Le gouvernement considère cette allégation comme dénuée de tout fondement sérieux. Le règlement prévoit que le secrétaire au Travail établira une liste des personnes représentant les travailleurs, les employeurs et les intérêts publics, ces personnes étant appelées à faire partie des comités de recours. Les personnes représentant les intérêts publics, qui sont habituellement des avocats, sont des personnes honorables qui ne sont affiliées ni à des syndicats ouvriers, ni à des organisations patronales. Elles sont nommées pour représenter les intérêts publics auprès des Comités de recours lorsqu'un représentant des travailleurs ou des employeurs ne peut participer aux travaux de ces comités et notamment dans des cas où l'appelant n'est pas affilié à un syndicat ou que son syndicat n'a pas nommé de représentant pour faire partie du comité. Bien plus, l'appelant a un droit de récusation absolu et un droit de récusation conditionnel.
- 692. Etant donné les explications données par le gouvernement et notamment la garantie accordée par la disposition du règlement qui permet à l'appelant de récuser les membres du Comité de recours saisi de son cas, et compte tenu du fait que, comme pour les allégations précédentes, le plaignant n'a pas fourni d'indications précises à l'appui de son allégation, le Comité estime que cette allégation ne devrait pas non plus être retenue; du fait que le plaignant n'a pas apporté des preuves suffisantes pour justifier un examen plus approfondi de cette allégation.
- Allégation d). - 693. En réponse à cette allégation, le gouvernement déclare à nouveau que les seules raisons pour lesquelles le certificat de sécurité peut être refusé sont celles mentionnées dans le règlement ; aucune personne ne s'est jamais vu refuser le certificat en raison de ses activités syndicales ou de l'exercice de ses droits de citoyen ou de membre d'un syndicat. Le gouvernement ajoute que les allégations relatives aux onze cas cités dans la plainte sont dénuées de tout fondement : de nombreuses questions générales sont nécessairement posées aux appelants au cours de l'audience, en vue d'établir dans quelle mesure il convient de prêter foi à leurs déclarations et aussi en vue de vérifier leur identité ; toutefois, les questions mentionnées dans la plainte ne constituent pas des raisons pour lesquelles le certificat de sécurité serait refusé ; ce certificat n'aurait pu en aucun cas être refusé, dans les conditions indiquées par le plaignant, au délégué syndical d'un navire et au syndicaliste qui aurait prononcé un discours; en effet, le certificat n'est retiré qu'après une longue enquête qu'effectuent les services de renseignements du gouvernement ; de même, le certificat de sécurité n'a jamais été refusé pour participation à des piquets de grève ou toute autre activité syndicale licite.
- 694. En ce qui concerne les onze cas mentionnés par le plaignant, le gouvernement indique à juste titre qu'il ne peut pas y répondre avec précision, étant donné que les allégations du plaignant ne donnent ni les noms ni d'autres détails permettant d'identifier les cas. Le gouvernement exprime des doutes au sujet de la bonne foi du plaignant quant à la manière dont il a présenté ces cas et il déclare que, bien que les noms aient été omis dans cette plainte, l'organisation plaignante a distribué aux Etats-Unis des tracts dans lesquels étaient reproduits le nom et la photographie des personnes auxquelles le certificat de sécurité avait été refusé et qui contenaient des accusations encore plus exagérées que celles présentées dans la plainte. De plus, la seule sanction qui puisse être imposée à un travailleur aux termes du programme de sécurité est le refus du certificat de sécurité, à la suite duquel il est interdit à l'intéressé d'occuper un emploi dans l'industrie maritime ; il ne peut être question de représailles. En conclusion, le gouvernement déclare estimer qu'un exposé aussi unilatéral que celui du plaignant, dans lequel celui-ci choisit et omet les faits à son gré, ne constitue pas une documentation permettant de prendre la plainte en considération.
- 695. Alors que cette allégation, si elle était prouvée, établirait certainement une atteinte aux droits syndicaux, la seule preuve soumise par le plaignant consiste dans les déclarations contenues dans les onze cas individuels cités. Etant donné qu'il n'est possible d'identifier ni les individus intéressés, ni les dates et les lieux où ces cas se seraient produits, il ne semble pas possible de considérer ces informations comme équivalant à des preuves. Bien que le plaignant déclare que, si les noms des personnes intéressées n'ont pas été donnés, ce fut par crainte de représailles, et qu'il ajoute qu'il est prêt à fournir des précisions si le gouvernement des Etats-Unis peut garantir qu'il n'y aura pas de représailles, il n'indique en rien de quelle sorte de représailles il pourrait s'agir et il ne cite aucun cas dans lequel des mesures de représailles auraient été prises. D'autre part, le gouvernement déclare qu'aucune mesure de représailles n'est possible, étant donné que la seule sanction prévue par le programme de sécurité est le refus du certificat de sécurité, et cette déclaration est corroborée par le texte du règlement, qui ne contient pas d'autres dispositions.
- 696. Pour les raisons qui précèdent, le Comité est d'avis que les déclarations du plaignant au sujet des cas individuels qui se seraient produits ne sont pas suffisamment précises pour pouvoir être examinées quant au fond. Pour cette raison, et compte tenu des déclarations du gouvernement qui ont été mentionnées ci-dessus, le Comité est également d'avis que le plaignant n'a pas fourni des preuves suffisantes pour justifier un examen plus approfondi de cette allégation.
- Allégations relatives aux objectifs du programme de sécurité
- 697. Le plaignant allègue que le but poursuivi par le programme de sécurité est d'obliger les syndicats à se conformer à la politique du gouvernement en tenant leurs membres sous la menace de la perte de leurs moyens d'existence. Il est allégué que les travailleurs de l'industrie maritime sont ainsi privés du droit de former des syndicats indépendants de leur choix et de s'affilier à de tels syndicats.
- 698. En réponse à cette allégation, le gouvernement déclare que le seul objectif du programme de sécurité est celui qui a déjà été indiqué et qui consiste à protéger le trafic maritime des Etats-Unis contre l'espionnage, le sabotage et d'autres activités subversives. Ce programme n'est dirigé contre les syndicats et les syndicalistes ni par l'objectif auquel il vise, ni par la procédure prévue pour son application, ni par la manière dont il est mis en pratique.
- 699. Le gouvernement ajoute que les statistiques relatives à l'exécution de ce programme font ressortir que celui-ci n'a pas été appliqué de manière discriminatoire, ainsi que le soutient le plaignant. Au 1er mai 1952, 484.670 personnes avaient fait l'objet d'une vérification de loyauté. Parmi ces personnes 3.716 seulement s'étaient vu refuser ce certificat au début. Il a été interjeté appel dans 2.143 de ces cas et, sur ces cas, 1.195 certificats ont été finalement accordés alors que 562 cas étaient encore en suspens à la date indiquée ci-dessus. A cette époque, le certificat avait été finalement refusé à 2.531 personnes, ce chiffre correspondant à une proportion de 0,5 pour cent environ du total. Il est évident que de nombreux membres de l'organisation plaignante elle-même ont dû recevoir le certificat de sécurité. Le grand nombre de personnes qui ont obtenu ce certificat en appel témoigne de l'équité et de l'impartialité de la procédure d'appel.
- 700. Enfin, le gouvernement souligne que les personnes qui auraient subi un préjudice bénéficient de toutes les garanties prévues par la Constitution des Etats-Unis et qu'elles ont recours aux tribunaux pour les faire valoir. Deux actions relatives au programme de sécurité sont actuellement en suspens devant les tribunaux. L'une, présentée par un certain nombre de marins et de débardeurs, visait à obtenir une décision condamnant l'application de ce programme et fut jugée au fond en juillet 1952, mais au moment où le gouvernement préparait sa réponse, la décision n'avait pas encore été publiée. L'autre était une action criminelle pour violation de l'interdiction d'accepter un emploi dans l'industrie maritime sans avoir obtenu le certificat de sécurité et elle a abouti à l'acquittement des défendeurs. Le gouvernement considère cette décision comme erronée et un appel est actuellement en cours. Si une partie du programme de sécurité était considérée comme contraire à la Constitution des Etats-Unis, il serait impossible de l'appliquer et le programme devrait être modifié en conséquence. Le gouvernement déclare qu'il est ainsi clair qu'il existe des procédures judiciaires efficaces, permettant de réparer toute violation de droits et qu'il est fait usage de ces procédures. Aussi considère-t-il que l'examen de ces allégations sur le plan international ne serait ni opportun ni approprié.
- 701. Etant donné les déclarations du gouvernement qui viennent d'être mentionnées, notamment en ce qui concerne les procédures nationales qui existent pour la sauvegarde des droits individuels et auxquelles il est actuellement fait recours, et compte tenu de l'assurance donnée par le gouvernement que toute partie du programme qui serait considérée comme étant contraire à la Constitution des Etats-Unis ne pourrait pas être appliquée et que le programme serait modifié en conséquence, et étant donné qu'il ressort, par ailleurs, des conclusions ci-dessus que les allégations spéciales contenues dans la plainte ne sont ni assez précises ni suffisamment établies pour appeler un examen plus approfondi, considérant enfin que la preuve des allégations générales concernant l'objectif visé par ce programme dépend du bien-fondé des accusations en question, le Comité estime que le plaignant n'a pas fourni des preuves suffisantes pour justifier le renvoi de la question à la Commission d'investigation et de conciliation et que la plainte devrait, par conséquent, ne pas être retenue.
- 702. D'autre part, le Conseil d'administration voudra sans doute être informé du résultat des actions judiciaires mentionnées par le gouvernement comme étant en instance de jugement et de toutes mesures que pourrait prendre le gouvernement à la suite des décisions des tribunaux en l'espèce.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 703. Dans ces conditions, le Comité recommande au Conseil d'administration de décider:
- a) de rejeter l'ensemble de la plainte du fait que le plaignant n'a pas apporté de preuves suffisantes pour justifier un examen plus approfondi;
- b) de demander au gouvernement des Etats-Unis de l'informer des décisions qui seront prises à la suite des actions judiciaires mentionnées par le gouvernement comme étant en instance de jugement, ainsi que des mesures qu'il pourrait prendre en conséquence.