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A. Analyse des plaintes
A. Analyse des plaintes
- 323. Les plaignants ont allégué les griefs suivants:
- a) Le gouvernement grec aurait violé les droits syndicaux en faisant emprisonner et maltraiter plusieurs chefs de la Fédération des syndicats maritimes de Grèce ; dix syndicalistes grecs auraient notamment été en danger d'être exécutés.
- b) Le gouvernement aurait également fait torturer et assassiner Dimitrios Tatakis, secrétaire du Syndicat des officiers de la marine marchande et membre du bureau de la Fédération des syndicats maritimes de Grèce.
B. Analyse des réponses
B. Analyse des réponses
- Analyse de la première réponse (10 janvier 1952)
- 324 Dans un télégramme en date du 10 janvier 1952, le gouvernement grec a fait valoir les arguments suivants:
- a) Suivant des affirmations formelles du ministère de la Justice, personne n'aurait jamais été poursuivi ou condamné pour des activités syndicales, mais exclusivement pour des crimes de droit commun.
- b) D. Tatakis serait, d'après les informations officielles, décédé de mort naturelle à la suite d'une longue maladie.
- 325 Le gouvernement ajoute que des accusations semblables à celles qui le mettent en cause devraient être accompagnées de détails indiquant le nom des personnes arrêtées et précisant les circonstances de chaque cas.
- Demande d'informations complémentaires
- 326 A sa réunion du 10 au 12 janvier 1952, le Comité de la liberté syndicale a décidé de demander au Directeur général d'obtenir certaines informations complémentaires du gouvernement grec avant qu'il ne formule ses recommandations au Conseil d'administration. Par lettre du 22 janvier 1952, le Directeur général a demandé des renseignements complémentaires sur les deux points suivants : a) le nom et la qualité des personnes poursuivies, la nature exacte des crimes pour lesquels elles le furent et les décisions rendues contre elles ; b) les circonstances du décès de D. Tatakis en vue de savoir notamment si ce décès s'était produit en prison ou avait été consécutif à une détention prolongée.
- Analyse de la deuxième réponse (1er février 1952)
- 327 Dans sa deuxième réponse en date du 1er février 1952, le gouvernement grec soutient tout d'abord que la question dont il s'agit n'a aucun rapport avec celle de la garantie des droits syndicaux, le fait que certains des condamnés soient des dirigeants syndicalistes ne pouvant nullement, en effet, les dispenser de respecter la légalité. Il estime donc que la question est hors de la compétence du Comité de la liberté syndicale.
- 328 Le gouvernement donne ensuite les précisions suivantes sur les deux questions qui lui avaient été posées.
- Poursuite et condamnation de dirigeants syndicalistes
- 329 Les personnes en question ont été condamnées par le tribunal militaire d'Athènes suivant une procédure libre et publique et après de longues délibérations à la suite desquelles il a été établi qu'elles avaient conspiré en vue de détacher une partie du pays du territoire national et avaient contribué à la réalisation de tels projets. Leur condamnation n'a donc aucun rapport avec leur activité syndicale. D'ailleurs, il existe en Grèce des syndicats libres affiliés à la C.I.S.L et l'exercice des droits syndicaux est pleinement garanti.
- 330 La Fédération des syndicats maritimes (O.E.N.O), à laquelle appartenaient certains des condamnés, est une organisation fomentant la trahison qui, comme le parti communiste, le Comité politique des marins et d'autres organisations illicites, renforce l'action des bandes armées en révolte contre l'Etat (par exemple par l'envoi d'argent et de vêtements, l'enrôlement dans ces bandes de marins en chômage, la distribution de tracts anarchistes). Le fait que ces personnes se sont rendues coupables d'activités mettant en danger la sécurité de l'Etat hellénique et que leur condamnation n'a aucun rapport avec leur activité syndicale aurait, du reste, été reconnu par les organisations syndicales locales, notamment dans une lettre du 2 octobre 1951 d'une organisation syndicale affiliée à la Fédération internationale des transports. Le gouvernement grec exprime du reste sa certitude que l'Organisation internationale du Travail est au courant de l'activité de l'O.E.N.O dont certains membres ont été poursuivis par la justice dans divers pays ou même expulsés en raison de leur activité illégale et subversive. Parmi les personnes jugées, dix ont été condamnées à mort et d'autres à diverses peines.
- 331 Etant donné l'indépendance du Pouvoir judiciaire, indépendance consacrée par la Constitution, le gouvernement ne peut pas demander la libération de personnes condamnées par les tribunaux. Toutefois, le gouvernement a sollicité à plusieurs reprises du Parlement le vote de mesures de clémence, notamment l'adoption d'une procédure de révision des décisions judiciaires portant condamnation à mort.
- 332 La situation aurait été la suivante à ce moment : les condamnés seraient, d'après les renseignements fournis par les autorités compétentes, tous en vie, et la sentence les condamnant à mort ferait l'objet d'un nouvel examen.
- Circonstances du décès de D. Tatakis
- 333 L'allégation suivant laquelle D. Tatakis aurait été torturé et assassiné serait erronée et tendancieuse. Des renseignements fournis par les autorités compétentes, il ressortirait qu'il serait décédé de mort naturelle par suite d'une crise d'urémie après une détention d'environ quatorze mois. Les raisons de sa détention sont connexes à celles qui furent la cause de la condamnation des autres membres de l'O.E.N.O et n'ont aucun rapport avec l'exercice des droits syndicaux.
- Décision provisoire du Comité et nouvelle demande d'informations complémentaires
- 334 A sa réunion en mars 1952, le Comité de la liberté syndicale, qui a examiné cette réponse, a provisoirement décidé que la plainte dont il s'agit, étant donné son caractère essentiellement politique, ne méritait pas un examen plus approfondi de la part du Conseil d'administration. Il a chargé le Directeur général d'exprimer au gouvernement hellénique sa satisfaction des mesures législatives que celui-ci a fait prendre dans un esprit de clémence, notamment en ce qui concerne l'application de la procédure légale relative à l'application de mesures de grâce en faveur des condamnés à la peine de mort. Le Comité a également chargé le Directeur général de demander au gouvernement de le tenir informé du résultat du nouvel examen judiciaire avant qu'il ne formule ses recommandations au Conseil d'administration. Par lettre du 20 mars 1952, le Directeur général a communiqué cette décision au gouvernement grec et a prié celui-ci de le tenir au courant du sort des dix personnes condamnées à mort par le tribunal militaire.
- Analyse des informations nouvelles fournies par le gouvernement
- 335 Par de nouvelles communications, le gouvernement a fourni les informations suivantes sur les deux points relevés dans les plaintes présentées contre lui.
- Poursuite et condamnation de dirigeants syndicalistes
- 336 Par lettre du 17 septembre 1952, le gouvernement a déclaré que le tribunal de révision, qui a siégé le 21 août 1952, a confirmé, pour la plupart des condamnés, les peines prononcées par le tribunal militaire - qui étaient, dans dix cas, la peine de mort - mais qu'en vertu d'une loi adoptée en 1952, toutes les condamnations à mort prononcées dans le passé ont été automatiquement commuées en peines d'emprisonnement à vie, et que la question de l'exécution des condamnés à mort ne se pose par conséquent pas.
- 337 Par lettre du 20 octobre 1952, le ministre du Travail de Grèce a communiqué deux lettres du 2 août 1952 et du 23 septembre 1952, émanant du ministre de la Défense nationale et de l'état-major général de l'armée grecque : ces lettres donnent des informations sur la situation de chacun des condamnés après le pourvoi en révision Il en ressort que les condamnations à mort ont été automatiquement commuées en peines d'emprisonnement à vie, six personnes étant condamnées à cette peine et pouvant recourir au Conseil des grâces ; les autres accusés ont été condamnés à des peines de réclusion allant de dix à vingt ans et peuvent bénéficier des dispositions de la loi sur les mesures de clémence, qui prévoit dans certains cas la libération conditionnelle; l'une de ces personnes a déjà vu sa peine remise et a été libérée.
- Circonstances du décès de D. Tatakis
- 338 Faisant suite aux informations contenues dans sa seconde réponse du 1er février 1952, le gouvernement a communiqué au Directeur général, par lettre du 28 mai 1952, un certificat officiel indiquant que D. Tatakis était décédé par suite d'urémie.
C. C. Conclusions du comité
C. C. Conclusions du comité
- Question de la compétence du Comité de la liberté syndicale
- 339 Le gouvernement grec, dans sa réponse, a exprimé l'avis que les plaintes déposées contre lui étaient hors de la compétence du Comité de la liberté syndicale, étant donné qu'il ne s'agit pas d'un problème de garantie des droits syndicaux, et que le fait qu'un condamné est un dirigeant syndicaliste n'est pas de nature à le faire relever des condamnations prononcées contre lui en application du droit pénal.
- 340 Le Comité a estimé qu'en vertu de son mandat il est fondé à considérer qu'une plainte motivée par l'arrestation de dirigeants syndicalistes - arrestation qui, selon les plaignants, serait due à l'activité syndicale de ces personnes - contient une allégation de violation de droits syndicaux et rentre, de ce fait, dans sa compétence, sans que cela préjuge évidemment en rien les mérites de la plainte quant au fond.
- Allégations relatives à la poursuite et à la condamnation de dirigeants syndicalistes
- 341 Les deux demandes d'informations complémentaires adressées à ce sujet au gouvernement grec par le Comité de la liberté syndicale portaient sur les points suivants.
- 342 Le Comité avait d'abord demandé des renseignements sur le nom et la qualité des personnes poursuivies, la nature exacte des crimes pour lesquels elles le furent et les décisions rendues contre elles.
- 343 Le Comité avait demandé ultérieurement d'être tenu informé du résultat de la révision du procès des dirigeants syndicalistes, révision qui allait être effectuée dans le cadre des mesures de clémence que le gouvernement avait fait adopter.
- 344 Sur ce premier point, le gouvernement qui, dans ses premières réponses, n'avait pas donné de manière précise les noms et qualités des personnes poursuivies, a, par la dernière communication de l'état-major général de l'armée grecque, mentionné le nom des diverses personnes poursuivies et les peines auxquelles chacune a été condamnée. En ce qui concerne la nature des crimes pour lesquels ces personnes ont été condamnées, le gouvernement a indiqué qu'il ne s'agissait pas de leur activité syndicale, mais qu'il avait été prouvé que ces personnes s'étaient rendues coupables d'activités tendant à détacher une partie du pays du territoire hellénique, c'est-à-dire à mettre en danger la sécurité de l'Etat. Le gouvernement à précisé à ce sujet que, s'il ne peut pas demander la libération des condamnés, ce qui serait une violation de la Constitution qui proclame l'indépendance du pouvoir judiciaire, il a, à plusieurs reprises, sollicité du Parlement le vote de mesures de clémence et que le procès des condamnés avait fait l'objet d'un pourvoi en révision à la suite d'une demande faite par ceux-ci en vertu de la loi no 1504/1950.
- 345 Sur la seconde demande du Comité, le gouvernement à, par plusieurs communications, indique quel à été le résultat du pourvoi en révision, qui à été jugé le 21 août 1952 et à la suite duquel le tribunal de révision à confirmé la plupart des condamnations à mort. Le gouvernement a indiqué à cet égard que, dans son désir d'appliquer une politique de clémence, il à fait adopter la loi no 2058/1952 en vertu de laquelle les condamnations à mort confirmées par le tribunal de révision ont été automatiquement commuées en peine d'emprisonnement à vie, alors que les condamnés à une peine temporaire de réclusion peuvent, dans certains cas, bénéficier de la libération conditionnelle.
- 346 Il ressort de ces diverses réponses que le gouvernement à fourni les informations complémentaires demandées par le Comité de la liberté syndicale et qu'il a suivi, pour autant qu'il était en son pouvoir, une politique de clémence en vertu de laquelle les condamnations à mort prononcées contre des dirigeants syndicalistes pour des activités étrangères à l'exercice des droits syndicaux ont été commuées en peines d'emprisonnement à vie pour la plupart et, dans certains cas, de réclusion temporaire.
- 347 Dans ces conditions, le Comité confirme la décision provisoire qu'il avait prise à sa réunion de mars 1952, par laquelle il avait pris note avec satisfaction des mesures de clémence prises par le gouvernement, et recommande au Conseil d'administration de décider que cet aspect du cas n'appelle pas un examen plus approfondi.
- Allégations relatives aux circonstances du décès de D. Tatakis
- 348 Comme pour l'allégation précédente, le gouvernement à fourni les précisions demandées par le Comité de la liberté syndicale à sa réunion de janvier 1952 au sujet des circonstances du décès de D. Tatakis, en vue de savoir notamment si ce décès s'était produit en prison ou avait été consécutif à une détention prolongée.
- 349 Il ressort en effet de sa réponse que D. Tatakis serait décédé de mort naturelle après une détention d'environ 14 mois, sa détention étant motivée, comme pour les autres membres de l'O.E.N.O, par une activité contraire aux intérêts nationaux et sans rapport avec l'exercice des droits syndicaux. Le gouvernement à fourni un certificat indiquant que le décès de D. Tatakis a été occasionné par l'urémie.
- 350 Le Comité à pris note des renseignements fournis par le gouvernement grec au sujet des circonstances dans lesquelles à eu lieu le décès de D. Tatakis. Il à pris également note du fait que, conformément au certificat médical sur lequel il ne saurait se prononcer, le décès serait dû à une cause de maladie.
- 351 Dans ces conditions, le Comité confirme la décision provisoire qu'il avait prise à sa réunion en mars 1952 et recommande au Conseil d'administration de décider que cet aspect du cas n'appelle pas un examen plus approfondi.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 352. Le Comité estime qu'à la suite des informations communiquées par le gouvernement, il y à lieu de recommander au Conseil d'administration de décider que l'ensemble du cas n'appelle pas un examen plus approfondi.