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La commission prend note des observations de la Confédération des syndicats progressistes de Türkiye (DİSK) reçues le 1er septembre 2022, concernant les questions examinées dans le présent commentaire. Elle prend également note des observations de la Confédération turque des associations d’employeurs (TISK) jointes au rapport du gouvernement.
Article 2 de la convention. Droit des travailleurs de constituer des organisations et de s’y affilier. Travailleurs engagés par des agences d’emploi privées. La commission rappelle que, dans son précédent commentaire, elle avait prié le gouvernement de fournir des informations, y compris des exemples concrets de la façon dont les travailleurs employés temporairement par l’intermédiaire d’agence de placement privées (travailleurs engagés dans le cadre d’un contrat de travail triangulaire) exercent leur droit de constituer des organisations de leur choix et de s’y affilier dans la pratique. Notant avec regret que le gouvernement n’a fourni aucune information à ce sujet, la commission réitère sa précédente demande.
Incidences de la classification sectorielle. Travailleurs domestiques. La commission note que, dans ses observations, la DİSK indique que la classification sectorielle des syndicats établie par la loi a pour effet de priver certaines catégories de travailleurs, dont les travailleurs domestiques, de la possibilité d’exercer leur liberté d’association. Elle souligne que, dans les lieux de travail composés non seulement d’installations de production, mais aussi d’un bureau ou d’un magasin, la répartition par secteur fait que tous les travailleurs ne peuvent pas adhérer à un seul et même syndicat étant donné que les bureaux et les installations de production sont généralement enregistrés sous différents secteurs. La commission prie le gouvernement de soumettre ses observations à ce sujet et de préciser comment les travailleurs domestiques exercent leur droit d’organisation dans la pratique et par quels syndicats ils sont représentés.
Article 3. Droit des travailleurs d’élire librement leurs représentants et d’organiser leurs activités. Dans ses précédents commentaires, la commission avait noté que le dernier paragraphe de l’article 10 de la loi no 4688 prévoit qu’en cas de non-respect des prescriptions de la loi régissant les réunions syndicales et les décisions des assemblées générales, les responsables syndicaux sont démis de leurs fonctions sur décision du tribunal du travail, à la demande de l’un des membres ou du ministère du Travail. La commission avait prié le gouvernement de réexaminer cette disposition. Le gouvernement indique à ce propos que l’objectif de la procédure prévue par l’article 10 de ladite loi est de garantir la convocation de l’assemblée générale des organisations qui ne tiennent pas leur session plénière en temps utile. La commission note que, d’après le gouvernement, le but implicite de l’action en justice prévue par cette disposition est la convocation de l’assemblée générale, mais que l’objet de cette disposition tel qu’il est expressément énoncé est la révocation de responsables syndicaux. En conséquence, la commission répète que toute révocation ou suspension de responsables syndicaux qui ne résulte pas d’une décision interne du syndicat, d’un vote des membres ou d’une procédure judiciaire ordinaire constitue une ingérence grave dans l’exercice de la fonction syndicale. Elle réitère donc sa précédente demande et prie le gouvernement de fournir des informations sur toute mesure qui aura été prise ou qu’il est envisagé de prendre à cette fin.
Droit de grève. Dans ses précédents commentaires, la commission avait noté que, d’une part, le septième paragraphe de l’article 54 de la Constitution (qui interdit les grèves et les lock-out organisés pour des motifs politiques, les grèves et les lock-out de solidarité, l’occupation de locaux de travail, les grèves perlées et autres formes d’obstruction) avait été abrogé, mais que d’autre part, l’article 58 de la loi sur les syndicats et les conventions collectives (loi no 6356) ne considérait comme légitimes que les grèves motivées par des conflits surgissant dans le cadre de négociations collectives. La commission avait prié le gouvernement de préciser comment les actions de protestation, les grèves de solidarité et les autres moyens légitimes d’action revendicative étaient protégés. La commission note que le gouvernement renvoie au dernier paragraphe de l’article 90 de la Constitution, qui dispose qu’en cas de conflit entre les instruments internationaux ratifiés par la Türkiye et le droit interne, les dispositions de ces instruments priment. En conséquence, le droit à l’action collective est garanti conformément à la réglementation régissant l’exercice du droit de grève tel qu’il est consacré par la convention et par d’autres instruments européens et internationaux relatifs aux droits de l’homme. Le gouvernement ajoute que, conformément à ces instruments internationaux, la Cour de cassation considère que les travailleurs jouissent du droit de participer à une action collective pacifique à des fins professionnelles, qui constitue une mesure de dernier recours. Ayant pris bonne note de cette information, la commission rappelle qu’en vertu de la convention, les grèves visant la politique économique et sociale du gouvernement, y compris les grèves générales, sont légitimes, et que réclamer la reconnaissance et l’exercice des libertés en ayant recours à la grève constitue une forme légitime d’action collective. La commission estime en outre que les travailleurs devraient pouvoir organiser des grèves de solidarité, en particulier dans le contexte de la mondialisation, qui se caractérise par une interdépendance croissante et par l’internationalisation de la production, pour autant que la grève initiale qu’ils soutiennent soit elle-même légitime. La commission prie donc le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour réviser la législation afin que toutes les formes légitimes d’action collectives soient expressément reconnues par la législation interne.
Détermination du service minimum. Dans ses précédents commentaires, la commission avait noté que l’article 65 de la loi no 6356 confère à l’employeur le pouvoir de déterminer unilatéralement la mise en place d’un service minimum en cas d’action collective et avait prié le gouvernement de revoir les dispositions dudit article de façon que les organisations de travailleurs puissent participer à la définition d’un service minimum requis sur le lieu de travail et que, faute d’accord, la question soit tranchée par un organe indépendant bénéficiant de la confiance des parties. La commission note que le gouvernement répète à ce propos qu’aucune des dispositions de l’article 65 n’interdit ni n’empêche la tenue de consultations et la conclusion d’un accord préalable entre l’employeur et les représentants des travailleurs sur l’organisation d’un service minimum avant que l’employeur ne l’annonce. La commission prend note à ce sujet des observations de la TISK, qui indique que, dans la pratique, dans le cadre de ses négociations collectives avec ses interlocuteurs travailleurs, une liste de noms et de chiffres correspondant au nombre de travailleurs susceptibles de ne pas participer aux grèves et de remplaçants est établie par la direction de la TISK et fournie aux travailleurs dans les six jours ouvrables à compter du début de la négociation collective. Si le groupe des travailleurs a des objections au sujet de cette liste, des discussions sont engagées jusqu’à ce que l’employeur et les travailleurs parviennent à un accord. La commission prend note de la précision donnée par le gouvernement selon laquelle le syndicat compétent peut contester la décision de l’employeur devant les tribunaux afin que ceux-ci tranchent définitivement le litige, ainsi que de l’observation de la TISK concernant la pratique actuelle. Cela étant, elle rappelle une nouvelle fois que les organisations de travailleurs devraient avoir la possibilité de participer à la définition du service minimum tout comme les employeurs (voir l’Étude d’ensemble de 2012 sur les conventions fondamentales, paragr. 138) et que, pour promouvoir la participation du syndicat à la définition de ce service en cas d’action collective, il importe que le gouvernement fasse en sorte que cette participation soit expressément prévue par la loi et que les décisions en la matière ne soient pas prises unilatéralement par l’employeur. La commission prie encore une fois le gouvernement de réviser l’article 65 de la loi no 6356 afin d’établir en droit que les organisations de travailleurs peuvent participer à la définition d’un service minimum requis sur le lieu de travail et qu’en l’absence d’accord, la question peut être renvoyée à un organe indépendant jouissant de la confiance des parties. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les mesures qui auront été prises ou qu’il est envisagé de prendre à cette fin.
Secteur public. Dans ses commentaires précédents, la commission avait noté que les agents du service public au sens large du terme n’étaient pas autorisés à mener des actions collectives et que la loi no 657 sur les agents de la fonction publique et la loi no 6111 sur les agents publics prévoient que ces actions sont passibles de sanctions disciplinaires. La commission avait noté que, d’après la Confédération des syndicats de fonctionnaires (KESK), l’interdiction de mener des actions collectives dans le secteur public couvrait une catégorie très vaste de travailleurs, qui comprenait 3 millions de personnes. Elle avait prié le gouvernement de revoir la législation sur les fonctionnaires en collaboration avec les partenaires sociaux concernés afin de la modifier, le but de cette révision étant que l’interdiction de participer à une action collective ne concerne que les fonctionnaires exerçant des fonctions d’autorité au nom de l’État et ceux qui travaillent dans les services essentiels. Notant avec regret qu’aucune information n’a été fournie à ce sujet par le gouvernement, la commission réitère sa précédente demande et prie celui-ci de fournir des informations sur toutes les mesures qui auront été prises ou qu’il est envisagé de prendre à cette fin.
[Le gouvernement est prié de répondre de manière complète aux présents commentaires en 2023.]
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