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Article 2 de la convention. Droit des travailleurs de constituer les organisations de leur choix. Dans son commentaire précédent, la commission avait observé que la loi no 20940 a introduit une condition supplémentaire pour la constitution de syndicats dans les entreprises occupant 50 travailleurs ou moins, en ajoutant à la condition actuelle d’un nombre minimum de huit travailleurs celle d’un taux minimum de représentation de 50 pour cent de l’ensemble des travailleurs (art. 227 du Code du travail). Elle avait noté que la Confédération générale des travailleurs des secteurs public et privé (CGTP) dénonce cette nouvelle disposition, qui rend la constitution d’organisations syndicales plus difficile, et que la CGTP estime que cela entraînera la disparition des syndicats dans de nombreuses unités de production. La commission note que le gouvernement n’a pas répondu, alors qu’elle le lui demandait, aux observations de la CGTP, et que la CGTP, de même que la Confédération générale des travailleurs du cuivre (CTC), soulignent à nouveau que cette condition supplémentaire rend plus difficile la constitution d’organisations de travailleurs. La commission prie à nouveau le gouvernement de communiquer ses commentaires sur les observations susmentionnées des partenaires sociaux, ainsi que toute information sur les effets dans la pratique de cette nouvelle condition en ce qui concerne la constitution de syndicats dans les entreprises occupant 50 travailleurs ou moins.
Article 3. Droit des organisations d'organiser leur activité et de formuler leur programme d'action. Dans ses précédents commentaires, la commission avait prié le gouvernement de prendre des mesures afin de modifier certaines dispositions du Code du travail relatives à l’exercice du droit de grève et/ou de fournir des informations sur l’application de ces dispositions:
  • -Votes sur la grève: L’article 350 du Code du travail requiert la majorité absolue des travailleurs représentés par le syndicat pour pouvoir voter la grève (pour le quorum, les travailleurs qui ne sont pas présents dans l’entreprise en raison d’un congé médical ou d’un congé légal ou qui, pour des impératifs de service, ne se trouvent pas sur leur lieu de travail habituel, ne sont pas comptabilisés). Tout en notant que le gouvernement n’a communiqué aucune information à ce sujet, la commission rappelle à nouveau que, pour ne pas restreindre le droit des organisations de travailleurs d’organiser leurs activités, les dispositions législatives qui exigent que les actions de grève soient votées par les travailleurs devraient tendre à ce que seuls les votes exprimés soient pris en compte (et non les votes de tous les travailleurs admis à voter) et que le quorum ou la majorité nécessaire soient fixés à un niveau raisonnable. La commission prie à nouveau le gouvernement de prendre les mesures nécessaires à cet égard et de faire état de toute évolution.
  • -Délai dans lequel la grève peut être effective: Dans ses précédents commentaires, la commission avait noté que l’article 350 du Code du travail dispose que la grève sera effective à compter du cinquième jour qui suit son approbation. La commission note qu’en réponse à sa demande d’éclaircissements sur les implications d’une telle disposition, le gouvernement transmet un avis de la Direction du travail (no 441/7 du 25 janvier 2017), dans lequel il est précisé que ce délai constitue une pause entre le vote de la grève et le déclenchement effectif de celle-ci, et que ce délai peut être prorogé de cinq jours supplémentaires par effet d’une médiation obligatoire. La commission note d’autre part que plusieurs partenaires sociaux remettent en cause cette disposition, estimant qu’elle aboutit à imposer un délai de préavis excessif qui limite l’exercice du droit de grève. Rappelant que s’il est possible d’instaurer un bref délai de réflexion ou un délai pour la médiation, la décision concernant le déclenchement effectif de la grève devrait appartenir aux travailleurs, la commission prie le gouvernement de faire connaître sa réponse aux observations des partenaires sociaux et de communiquer de plus amples informations sur l’application dans la pratique de cette disposition en précisant, en particulier, quelles en sont les conséquences ou les obligations pour le syndicat concerné dans le cas où celui-ci entend déclencher la grève dans un délai qui n’est pas conforme à ce que prescrit l’article 350 du Code du travail.
  • -Reprise du travail: L’article 363 du Code du travail dispose que, dans le cas d’une grève ou d’une fermeture temporaire d’une entreprise qui, par ses caractéristiques, par un concours de circonstances ou en raison de sa durée mettrait gravement en péril la santé, l’environnement, l’approvisionnement de la population en biens ou en services, l’économie du pays ou la sécurité nationale, le Tribunal du travail pourrait décréter la reprise du travail à la demande de l’une des parties intéressées. Dans ses commentaires précédents, la commission avait pris note avec intérêt de l’attribution à l’autorité judiciaire de toute décision concernant une telle reprise du travail et avait rappelé que l’imposition d’une reprise du travail ne devrait être possible qu’en cas de crise nationale aiguë ou si l’interruption des services en question met en péril la vie, la sécurité ou la santé des personnes pour tout ou partie de la population, étant entendu que, dans un tel cas, les travailleurs concernés jouissent de garanties compensatoires suffisantes, comme par exemple de procédures de conciliation ou de médiation et que, en cas d’impasse des négociations, il est recouru à une procédure d’arbitrage recueillant la confiance de toutes les parties. La commission observe que le gouvernement déclare que, pour l’instant, aucune position n’a été prise à cet égard sur le plan juridique (depuis l’entrée en vigueur de cette disposition en 2017, il n’y a guère eu qu’une action en justice tendant à la reprise du travail, action qui, bien qu’elle ait été décidée par le tribunal, n’a pas eu lieu d’être appliquée puisqu’entre-temps les parties adverses étaient parvenues à un accord mettant fin à la grève). Le gouvernement considère donc que la procédure judiciaire par laquelle la demande de reprise du travail doit passer ne démontre pas l’efficacité de la disposition, puisque les actions intentées dans ce sens devant les tribunaux aboutissent alors que la grève est déjà terminée. La commission prie le gouvernement de continuer de fournir des informations sur l’application de cette disposition dans la pratique, en précisant en particulier les circonstances ainsi que les services concernés par une demande de reprise du travail, de communiquer sa réponse aux observations des partenaires sociaux à ce sujet et de préciser quelles sont les garanties compensatoires prévues à l’égard des travailleurs qui seraient affectés par une telle mesure.
  • -Travailleurs agricoles saisonniers: Dans ses commentaires précédents, la commission avait prié le gouvernement de faire en sorte que le droit de grève soit garanti aux travailleurs agricoles en tant que catégorie de travailleurs engagés par des contrats spéciaux (Titre II, Livre I du Code du travail). Elle avait pris note des indications du gouvernement selon lesquelles: les travailleurs agricoles sont régis par les règles générales et ont le droit de faire grève dans les mêmes termes que les autres travailleurs; ce n’est que dans le cas des travailleurs agricoles saisonniers que la législation ne garantit pas l’accès effectif à ce droit. La commission observe que le gouvernement ne donne aucune information faisant suite à sa demande de garantir à l’égard de ces travailleurs l’exercice du droit de grève. La commission doit à nouveau rappeler que les travailleurs agricoles saisonniers n’entrent dans aucune des catégories pour lesquelles la restriction du droit de grève est envisageable (à savoir les services essentiels au sens strict du terme ou encore les fonctionnaires qui exercent une autorité au nom de l’État). La commission prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires afin que le droit de grève soit reconnu, dans la législation comme dans la pratique, aux travailleurs agricoles saisonniers comme il l’est pour les autres catégories de travailleurs. La commission le prie de fournir des informations à cet égard.
Application de la convention dans la pratique. La commission note que la CGTP signale à nouveau dans ses observations que les tribunaux continuent de ne pas reconnaitre la capacité d’un syndicat de représenter ses affiliés, par exemple dans le cas de violations d’une convention collective, et qu’un mandat écrit est parfois exigé à chacun des travailleurs syndiqués. La commission note que la CTC signale les mêmes problèmes et déclare que cette situation n’a pas été résolue.  La commission prie à nouveau le gouvernement de communiquer ses commentaires à cet égard et de prendre les mesures propres à assurer que les syndicats puissent représenter leurs membres dans des procédures judiciaires.
La commission note également que les organisations de travailleurs affirment à nouveau, dans plusieurs de leurs observations, que la réforme du travail a favorisé l’ingérence des employeurs dans les questions syndicales. Ainsi, l’article 297, tel que modifié, du Code du travail dispose que l’employeur peut demander à bon droit la dissolution d’une organisation syndicale pour non-accomplissement grave des obligations que la loi impose à cette organisation, ou lorsqu’une organisation syndicale n’a pas rempli les formalités requises pour sa constitution (laquelle doit être déclarée en vertu d’une décision du Tribunal du travail). La commission note que le gouvernement déclare à cet égard que, de 2014 à 2018, la Direction du travail a été saisie par des employeurs d’un total de 14 demandes de dissolution de syndicats, que seulement cinq de ces demandes ont été déposées alors que l’article 297 actuel du Code du travail était en vigueur, et que par conséquent on ne constate pas une augmentation considérable du nombre de ces demandes. Tout en prenant dûment note de ces informations, la commission prie le gouvernement de fournir des informations sur l’application de cette disposition dans la pratique, notamment sur les actions en justice soumises aux tribunaux du travail par la direction du travail à la demande d’employeurs.
La commission prend note des observations de plusieurs partenaires sociaux dans lesquelles ils dénoncent le fait que le système de fixation des services minimums porte atteinte dans la pratique à l’exercice effectif du droit de grève: i) ces partenaires sociaux considèrent que l’on ne respecte pas le principe de la concertation bilatérale quant à la fixation des services minimums ni l’indépendance dont les organes décisionnels doivent jouir; ii) ils affirment que l’on permet aux entreprises de soumettre hors délai des demandes de mise en place d’un service minimum, et que ces entreprises attendent alors une proposition d’instrument collectif, dans le but de retarder et à d’entraver la grève et la négociation collective; ces partenaires sociaux affirment aussi que les autorités se prononcent tardivement sur les demandes d’instauration d’un service minimum, au-delà des délais légaux (180 jours), et qu’elles ne se prononcent effectivement que 14 ou 15 mois plus tard; iii) les mêmes partenaires sociaux dénoncent le fait que ces décisions manquent de pondération, et soulignent le cas d’entreprises dans lesquelles, bien qu’elles n’assurent pas des services essentiels (par exemple, dans le secteur de la manutention des aliments), on a instauré un service minimum qui s’applique à plus de 70 pour cent du personnel; et iv) les partenaires sociaux attirent l’attention sur la présentation d’un nouveau projet de loi portant «modernisation des institutions du travail», qui étend les conditions dans lesquelles un service minimum peut être instauré, en y incluant par exemple les besoins d’espèces vivantes ou la distribution de denrées alimentaires, afin qu’un service minimum s’applique aux supermarchés ou aux entreprises qui se consacrent à l’élevage ou à la pisciculture. La commission prie le gouvernement de communiquer ses commentaires à ce sujet et d’indiquer les cas dans lesquels des demandes d’instauration de service minimum mobilisant 50 pour cent du personnel de l’entité concernée auraient été enregistrés.
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