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Forced Labour Convention, 1930 (No. 29) - Spain (RATIFICATION: 1932)
Protocol of 2014 to the Forced Labour Convention, 1930 - Spain (RATIFICATION: 2017)

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Rappelant que l’Espagne a ratifié le Protocole de 2014 relatif à la convention sur le travail forcé, 1930, en septembre 2017, la commission prend note des informations fournies par le gouvernement dans son rapport de 2019 sur les mesures prises pour mettre en œuvre la convention telle que complétée par le protocole. La commission prend également note des informations complémentaires fournies par le gouvernement à la lumière de la décision adoptée par le Conseil d’administration à sa 338e session (juin 2020).
En outre, la commission prend note des observations de l’Union générale des travailleurs (UGT) et de la Confédération syndicale de commissions ouvrières (CCOO), incluses dans le rapport du gouvernement de 2019 ainsi que dans ses informations complémentaires.

Article 1, paragraphe 1, et article 2, paragraphe 1, de la convention et article 1, paragraphe 1 du protocole. Mesures efficaces pour lutter contre le travail forcé, y compris la traite des personnes.

1. Article 1, paragraphe 2, du protocole. Plan national et action systématique et coordonnée. La commission note que le Plan intégral de lutte contre la traite des femmes et des filles à des fins d’exploitation sexuelle, couvrant la période 2015-2018, a été adopté suite au diagnostic mené sur la mise en œuvre du premier Plan intégral de lutte contre la traite des êtres humains à des fins d’exploitation sexuelle (2009-2012). Ce deuxième plan inclut cinq priorités: i) renforcement de la prévention et de la détection de la traite; ii) identification, protection et assistance des victimes; iii) analyse et renforcement des connaissances pour une réponse efficace; iv) activation des poursuites judiciaires; et v) coordination et coopération entre institutions et participation de la société civile. La commission observe que le plan attribue au Forum social contre la traite à des fins d’exploitation sexuelle la fonction de suivre et d’évaluer sa mise en œuvre, notamment à travers l’élaboration de rapports annuel d’exécution, et de formuler des propositions pour améliorer l’efficacité des mesures prévues.
La commission note par ailleurs que sur le plan institutionnel, en 2014, le gouvernement a établi la fonction de Rapporteur national sur la traite des êtres humains chargé de suivre les actions, plans et politiques de lutte contre la traite des êtres humains. Le gouvernement indique à cet égard dans son rapport de 2019 que l’existence du Bureau du Rapporteur national répond à la nécessité d’adopter une vision intégrale de la traite au niveau national en réunissant les principaux acteurs de l’administration et les entités spécialisées de la société civile chargées de l’assistance aux victimes. La commission observe également qu’une autre forme de coordination a été mise en place dans le cadre de la commission de suivi du Protocole-cadre de protection des victimes de traite des êtres humains, prévu à l’article 140 du décret royal 557/2011 qui approuve le règlement de la loi 4/2000 des droits et libertés des Étrangers en Espagne. Le protocole-cadre établit les lignes directrices pour l’action et la coordination des différentes entités intervenant dans la détection, l’identification, l’assistance et la protection des victimes de traite.
Le gouvernement indique que, suite à la ratification du Protocole à la convention n° 29, la table de dialogue social a mis à son ordre du jour l’élaboration d’un plan d’action national contre le travail obligatoire et autres activités humaines forcées. Le gouvernement précise dans les informations supplémentaires communiquées en 2020 que l’élaboration d’un Plan stratégique national contre la traite des êtres humains (PENTRA) est en cours d’étude et qu’il couvrira toutes les formes de traite énoncées dans la législation pénale en vigueur, y compris le travail forcé. La commission note à cet égard que, dans ses observations, l’UGT souligne que les plans d’action adoptés précédemment ne couvraient que la traite à des fins d’exploitation sexuelle des femmes, ce qui laisse les victimes de traite à d’autres fins avec une protection moindre. La CCOO regrette également qu’un plan d’action intégral de prévention et d’éradication de la traite à des fins d’exploitation au travail n’ait pas été adopté malgré un projet développé précédemment sous l’égide du ministère de l’Intérieur. Le syndicat exprime sa préoccupation face à la situation de vulnérabilité des travailleurs migrants victimes de traite, de travail forcé, ou d’exploitation, spécialement dans le secteur agricole. La CCOO considère en outre indispensable de poursuivre les travaux législatifs commencés en 2018 pour l’adoption d’une loi intégrale contre la traite des personnes en vue d’une meilleure détection et protection des victimes.
La commission prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que le Plan stratégique national de lutte contre la traite des êtres humains (PENTRA) couvre également la traite à des fins d’exploitation au travail et pas uniquement la traite des femmes et des filles à des fins d’exploitation sexuelle. Elle prie par ailleurs le gouvernement d’indiquer si le Plan d’action national contre le travail obligatoire et autres activités humaines forcées a été adopté et, le cas échéant, la manière dont sont définies les activités humaines forcées et les pratiques que cette notion recouvre. Sur le plan institutionnel, la commission prie le gouvernement d’indiquer comment est assurée en pratique une coordination et une action systématique de lutte contre l’ensemble des pratiques relevant du travail forcé. Elle souhaiterait à cet égard que le gouvernement fournisse de plus amples informations sur les actions menées par le Rapporteur national sur la traite des êtres humains et sur son interaction avec les autres institutions. Prière également de fournir des informations sur l’évaluation de la politique de lutte contre toutes les formes de travail forcé (traite des personnes et situations d’exploitation au travail relevant du travail forcé).
2. Article 25 de la convention et article 1, paragraphe 1, du protocole. Sanctions. La commission rappelle que plusieurs dispositions du Code pénal incriminent des pratiques relevant de la définition du travail forcé, telles que l’article 177 bis (traite des êtres humains); l’article 187 (prostitution forcée); les articles 311 et 312 (imposition de conditions de travail portant atteinte, supprimant ou restreignant les droits des travailleurs, en recourant à la tromperie ou en abusant d’une situation de nécessité). S’agissant de la répression du crime de traite, la commission note l’action de la Brigade centrale contre la traite des êtres humains, qui, en collaboration avec les autorités judiciaires, de poursuite, de police ou administratives, lutte contre les réseaux et organisations criminelles impliqués dans la traite, l’exploitation au travail ou l’exploitation de la prostitution (Ordre INT/28/2013 du ministère de l’Intérieur). La commission observe également que, suite à l’adoption en juin 2016 de l’instruction 6/16 du secrétariat d’État à la sécurité, des «interlocuteurs sociaux sur la traite des êtres humains» ont été établis au sein de la Police nationale et de la Garde civile. Ces interlocuteurs sociaux assurent la coordination, la coopération et la promotion des mesures de lutte contre la traite dans leur zone de compétence territoriale et servent de points de contact avec les organisations expérimentées en matière d’assistance aux victimes de la traite.
Le gouvernement se réfère également au rôle fondamental de l’inspection du travail dans l’identification des cas de traite et des délits contre les droits des travailleurs, soulignant que les informations recueillies par ses agents constituent un pilier essentiel de la procédure judiciaire ultérieure. Le gouvernement mentionne à cet égard la convention établissant un cadre général de collaboration entre l’inspection du travail et les forces et corps de sécurité en matière de lutte contre l’emploi irrégulier et la fraude à la sécurité sociale qui couvre la traite des personnes à des fins d’exploitation au travail ainsi que l’exploitation au travail sans traite, et les discriminations graves dans l’emploi. La convention prévoit la constitution de groupes d’intervention mixtes qui, lorsqu’ils constatent des indices de l’existence d’un délit en informent le ministère public et l’autorité judiciaire. En parallèle, l’inspecteur peut initier la procédure sanctionnatrice si les faits constituent également une infraction administrative. La commission observe à cet égard que le Plan directeur pour un emploi digne (2018-2022) se réfère à l’intensification de la coordination entre l’inspection du travail et les forces de l’ordre, prévue dans cette convention de collaboration, ainsi qu’au renforcement des activités de formation de l’inspection. La Commission note que, dans ses informations supplémentaires, le gouvernement indique que la convention de collaboration est en cours de révision.
La commission prend également note des informations fournies sur la formation dispensée aux juges dans le cadre du Plan de formation continue du Conseil général du Pouvoir judiciaire (couvrant notamment l’identification du délit de traite, le cadre juridique et la jurisprudence concernant l’exploitation au travail) ainsi que des statistiques produites par le Ministère public (Fiscalia General del Estado) sur les procédures dans les affaires de traite à des fins d’exploitation sexuelle et les décisions rendues entre 2013 et 2018 (624 procédures initiées, 112 décisions prononcées dont 74 confirmatoires). Par ailleurs, entre avril 2019 et juin 2020, 40 décisions ont été rendues sur la base de l’article 177 bis et 86 sur la base de l’article 311 du Code pénal. La commission observe en outre, d’après les décisions de justice communiquées, qu’il existe une jurisprudence abondante qui a défini et interprété les éléments constitutifs du délit de traite des personnes (art. 177 bis) et les délits prévus aux articles 311 et 312 du Code pénal.
La commission encourage le gouvernement à continuer à prendre des mesures pour renforcer les capacités des acteurs de la chaine pénale ainsi que l’inspection du travail pour parvenir à assurer une meilleure détection et répression des pratiques de traite, tant à des fins d’exploitation sexuelle que d’exploitation au travail, et de toute situation d’exploitation au travail constitutive de travail forcé. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les groupes d’interventions mixtes constitués conformément à la convention établissant le cadre général de collaboration entre l’inspection du travail et les forces et corps de sécurité en matière de lutte contre l’emploi irrégulier, et sur les moyens dont ils disposent. Prière également de continuer à fournir des informations sur les procédures judiciaires engagées pour les délits de traite (art. 177bis) et les délits contre les droits des travailleurs (art. 311 et 312) et sur les sanctions imposées aux auteurs de ces délits.
3. Article 2 du protocole. Prévention. Alinéas a) et b): Sensibilisation, éducation et information. La commission prend note des mesures prises dans le cadre du deuxième Plan intégral de lutte contre la traite des femmes et des filles à des fins d’exploitation sexuelle destinées à prévenir et sensibiliser à la traite des personnes à des fins d’exploitation sexuelle. Elle note que ces mesures avaient notamment pour objectif de rendre visible la réalité de la traite; sensibiliser sur l’impact de la demande de services sexuels; promouvoir un message de «tolérance 0» par rapport à la traite; réaliser des études pour mieux comprendre les caractéristiques de la traite à des fins d’exploitation sexuelle; compiler les données. À cet égard, la commission observe que le Centre d’intelligence contre le terrorisme et le crime organisé (CITCO) gère une base de données spécifique sur la traite des personnes (BDTRATA) et publie régulièrement des rapports. La commission prie le gouvernement de renforcer les activités de sensibilisation et d’éducation sur la traite des personnes, en particulier à des fins d’exploitation au travail, ainsi que sur les autres formes d’exploitation au travail relevant du travail forcé, notamment dans les secteurs à risque, comme l’agriculture. Prière également de continuer à fournir des informations sur les données compilées et sur les études réalisées à cet égard.
Alinéa c). Renforcement de l’inspection du travail. La commission note que le Plan directeur pour un travail digne 2018-2020 a pour objectif de donner une impulsion qualitative aux actions développées par l’inspection du travail et prévoit des mesures dans les domaines de la protection des droits fondamentaux et la promotion de l’égalité, le renforcement de la lutte contre l’économie irrégulière, la lutte contre l’abus des recours aux contrats à durée déterminée ou encore aux heures supplémentaires non payées. Le gouvernement souligne en se référant à l’expérience acquise par l’inspection du travail dans le domaine de la lutte contre la traite des personnes que si le nombre de cas détectés est faible par rapport au nombre d’interventions, les cas existants constituent une tel recul dans la jouissance des droits du travail les plus basiques qu’il convient de lutter avec tous les moyens possibles. La commission salue la volonté de renforcer les capacités de l’inspection du travail à la prévention et à l’identification d’abus et de violations de la législation du travail qui pourraient être constitutifs de travail forcé et prie le gouvernement de fournir de plus amples informations sur les mesures prises pour permettre à l’inspection d’intervenir dans les secteurs où il est plus difficile d’atteindre les victimes.
Alinéa d). Protection des migrants au cours du processus de recrutement. La commission note les informations fournies par le gouvernement sur les visites d’inspection menées dans le secteur agricole où sont embauchés en grande majorité des travailleurs migrants. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises pour contrôler le processus de recrutement de ces travailleurs et pour s’assurer que ceux-ci sont correctement informés de leurs conditions d’emploi.
Alinéa e): Appui à la diligence raisonnable des entreprises La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises pour appuyer à la diligence raisonnable des entreprises.
4. Article 3 du protocole. Identification et protection des victimes. La commission a précédemment noté l’adoption du Protocole-cadre de protection des victimes de traite des êtres humains qui met en œuvre les droits prévus aux articles 140 à 146 du règlement d’application de la loi des droits et libertés des étrangers (loi 4/2000) concernant notamment les informations devant être données aux victimes dans une langue qu’elles comprennent, la période de rétablissement et de réflexion, l’exemption de responsabilité administrative des victimes pour résidence illégale, les autorisations de résidence et de travail pour circonstances exceptionnelles, le retour assisté dans le pays d’origine des victimes. Le Protocole-cadre prévoit que des unités de polices disposent d’une formation spécifique en matière d’identification et d’assistance des victimes. Ce sont elles qui mènent les entretiens avec les victimes. Le processus d’identification d’une victime se fait sur la base d’une liste d’indicateurs. Les autorités policières doivent alors informer les victimes de l’assistance qui peut leur être prodiguée (logement convenable, aide matérielle, assistance psychologique, assistance médicale, services d’interprétation et assistance juridique), et le cas échéant, les mettre en contact avec les services sociaux compétents et les ONGs. La commission note que le deuxième Plan intégral de lutte contre la traite des femmes et des filles à des fins d’exploitation sexuelle prévoit le renforcement de l’appui des ONGs et des subventions qui leur sont octroyées.
La commission note par ailleurs que les employeurs qui embauchent pour une durée déterminée ou indéterminée des victimes de traite qui ont obtenu un permis de séjour et de travail en raison de circonstances exceptionnelles, ont droit à une réduction mensuelle de la cotisation de sécurité sociale de l’employeur (loi 26/2015, du 28 juillet, de modification du système de protection de l’enfance et de l’adolescence).
La commission prie le gouvernement de fournir de plus amples informations sur la nature de l’assistance qui est accordée aux victimes de traite ainsi qu’aux victimes d’exploitation au travail relevant du travail forcé (assistance médicale et psychologique, logement, nombre de délais de réflexion, de permis de séjour et de permis de travail octroyés, etc.), en précisant le nombre de victimes qui en ont bénéficié. Observant que la qualité de «victime potentielle de traite» est déterminée par les autorités de police, la commission prie le gouvernement d’indiquer comment les victimes de traite qui ne sont pas identifiées par les autorités de police ou les victimes d’autres pratiques relevant du travail forcé bénéficient des mesures de protection prévues par la convention. Prière de fournir des informations sur la collaboration existant entre les acteurs étatiques et les ONGs en ce qui concerne l’identification et la protection de ces victimes.
5. Article 4, paragraphe 1, du protocole. Accès à des mécanismes de recours et de réparation. La commission rappelle que la loi 4/2015 sur le statut de la victime de délits qui énumère les droits des victimes au cours du procès et en dehors de celui-ci, prévoit une attention spécifique pour les victimes les plus vulnérables, dont font partie les victimes de traite (art. 23). Parmi ces droits, sont garantis les droits des victimes à être entendues et informées sur la procédure pénale, à bénéficier de services de traduction et d’interprétation, au remboursement des frais, et à l’assistance juridique gratuite. La commission prend dument note de la mise en place par le ministère de la Justice de bureaux d’assistance aux victimes, composés de psychologues, avocats et travailleurs sociaux, qui fournissent des informations générales sur les droits des victimes, dont la possibilité d’accéder à un système public d’indemnisation du préjudice subi (art. 27 et 28). À cet égard, la commission note que, selon la loi sur la procédure pénale, les procureurs sont tenus de demander une indemnisation pour les victimes de toute infraction, sauf si la victime renonce expressément à se faire indemniser. En outre, s’agissant de la possibilité pour les juges d’ordonner la saisie des biens, effets, et gains provenant de certains délits dont la traite des personnes et les délits contre les droits des travailleurs (art. 127bis du Code pénal), la commission note la mise en place d’un bureau chargé de récupérer et gérer ces avoirs et de les utiliser pour des activités de prévention et d’assistance aux victimes (Bureau pour le recouvrement et la gestion des avoirs (ORGA), décret royal 948/2015 du 23 octobre 2015).
La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les cas dans lesquels les procureurs ont ordonné l’indemnisation des victimes ainsi que sur les mesures d’exécution prises pour mettre en œuvre les décisions y relatives, notamment dans le cadre du système public d’indemnisation Prière également de fournir des informations sur les actions prises sur la base de l’article 127bis du Code pénal pour confisquer les biens, les avoirs et les gains provenant de la traite et les actions déployées par l’ORGA à cette fin.
6. Article 6. Consultation des organisations d’employeurs et de travailleurs. La commission note que, dans ses observations, l’UGT indique que, contrairement à ce que prévoit le Protocole à la convention n° 29, aucune référence n’est faite aux partenaires sociaux dans les textes qui mettent en place les mécanismes compétents en matière de lutte contre la traite des personnes et de travail forcé. Selon l’UGT, les partenaires sociaux se retrouvent ainsi par exemple dans l’impossibilité de participer aux programmes développés par les administrations publiques dans le domaine de l’assistance aux victimes de traite et ils ne peuvent pas obtenir les subventions prévues à cet effet. Dans ses observations communiquées avec les informations supplémentaires du gouvernement, l’UGT ajoute que les partenaires sociaux ne sont pas consultés dans le cadre de l’élaboration du PENTRA qui couvrira la traite des personnes et le travail forcé. Le gouvernement indique à ce sujet que le PENTRA, qui s’inscrit dans le cadre de la stratégie nationale contre le crime organisé et la délinquance grave, est élaboré sous l’égide du Secrétariat d’État à la Sécurité, avec la participation des acteurs impliqués, notamment les entités et organisations spécialisées dans l’assistance et la protection des victimes. Le gouvernement considère que le PENTRA n’est pas conçu comme un plan d’action pour lutter contre le travail forcé au sens de l’article 1 du protocole, et que depuis 2018 un groupe de travail a été constitué sous l’égide du ministère du Travail pour élaborer le Plan national contre le travail obligatoire et autres activités humaines forcées.
La commission prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que les organisations d’employeurs et de travailleurs soient consultées dans le cadre de l’élaboration et la mise en œuvre de toute politique ou plan d’action destinés à lutter contre toutes les pratiques relevant de la définition du travail forcé, donnée à l’article 2, paragraphe 1, de la convention. Prière notamment d’indiquer comment les partenaires sociaux peuvent être associés aux actions développées dans le cadre du Protocole-cadre de protection des victimes, en particulier en matière d’identification des victimes.

Article 1, paragraphe 1, article 2, paragraphe 1, de la convention. Obligation de réaliser des travaux de collaboration sociale pour les bénéficiaires de prestations de chômage.

Dans ses précédents commentaires, la commission a examiné la question de l’obligation pour les personnes bénéficiant de prestations de chômage d’accepter des travaux de collaboration sociale (réglementés par le décret n° 1809/1986). La commission a noté que la CCOO considérait que les chômeurs ne peuvent pas exprimer librement leur consentement à la réalisation de ces travaux dans la mesure où un refus entraîne la suspension de leurs prestations de chômage – prestations auxquelles ils ont droit après avoir préalablement cotisé pendant une certaine période. La CCOO a souligné que l’obligation d’accepter de réaliser des travaux de collaboration sociale s’ajoute à l’obligation d’être à la recherche active d’un emploi; de participer à des programmes d’emploi ou de formation; et d’accepter toute offre de placement adéquat. Le gouvernement a indiqué quant à lui que la participation à ces travaux favorise l’insertion des chômeurs en maintenant leurs aptitudes physiques et professionnelles et que cette participation est exigée quand il n’est pas possible d’incorporer le bénéficiaire des prestations dans le marché du travail. Le gouvernement a précisé que le niveau d’employabilité du chômeur augmente après avoir participé à des travaux de collaboration sociale, en particulier les chômeurs de longue durée. La commission a prié le gouvernement de veiller à ce que le refus d’accepter les travaux de collaboration sociale n’entraîne pas la suspension du droit aux prestations de chômage, en particulier pour les personnes qui viennent de perdre leur emploi et doivent disposer d’une période raisonnable pour rechercher et choisir librement un emploi convenable. Elle a également demandé au gouvernement de fournir des informations sur le fonctionnement des travaux de collaboration sociale dans la pratique.
La commission prend note des informations statistiques communiquées par le gouvernement sur le nombre de personnes accomplissant des travaux de collaboration sociale, leur profil, leur répartition géographique, les secteurs d’activité concernés, etc. Elle note que le gouvernement réitère que l’obligation d’accomplir des travaux de collaboration sociale doit s’appliquer de manière restrictive et concerner les personnes pour lesquelles ce type de relation convient davantage qu’une relation d’emploi normale. Par ailleurs, en cas de mauvaise application de la législation régissant les travaux de collaboration sociale, il existe des mécanismes correctifs, tant administratifs que judiciaires, destinés à prévenir les abus. À cet égard, la CCOO considère que la loi ne prévoit pas une utilisation «restrictive» et qu’il ne convient pas de laisser cette appréciation au bon vouloir des administrations qui gèrent les prestations de chômage. Elle ajoute que la participation à ces travaux peut être exigée des personnes bénéficiaires des prestations de chômage dès le 1er jour de leur période de chômage. La CCOO observe que le faible nombre de sanctions imposées ne signifie aucunement que les bénéficiaires acceptent volontairement ces travaux dans la mesure où un refus entraine la suspension des prestations qui constituent, dans la grande majorité, leur seul moyen de subsistance.
La commission observe que le recours aux travaux de collaboration sociale a augmenté en 2018 pour légèrement diminué en 2019 passant de 1502 en 2017 à 2326 en 2018 et 2127 en 2019. Elle remarque également que certaines communautés autonomes n’y ont pas ou très peu recours. Les personnes qui doivent accomplir ces travaux sont en grande majorité des hommes et les tranches d’âge les plus concernées sont les 55- 59 ans, les plus de 59 ans, suivies des 45-49 ans. Enfin, le gouvernement indique qu’entre 2016 et mai 2020 des mesures de sanctions ont été appliquées à 18 personnes.
La commission rappelle que dans les régimes où le versement des prestations de chômage est soumis à la condition que le bénéficiaire ait travaillé ou cotisé à un régime d’assurance chômage pendant une période minimale et où la période pendant laquelle les prestations sont versées est liée à la durée de la période d’activité, le fait d’exiger en outre du bénéficiaire l’accomplissement de travaux qui ne constituent pas un emploi convenable peut avoir une incidence sur l’application de la convention (voir étude d’ensemble de 2007, Éradiquer le travail forcé, paragr. 129-131 et 205). La commission prie une nouvelle fois le gouvernement de veiller à ce que les personnes qui refusent les travaux de collaboration sociale ne soient pas sanctionnées par la suspension de leurs prestations de chômage quand celles-ci constituent un droit basé sur des contributions préalables. Compte tenu de l’objectif de réinsertion professionnelle poursuivie par la participation aux travaux de collaboration sociale, d’une part, et du faible nombre de refus et de sanctions imposées, d’autre part, la commission encourage le gouvernement à prendre les mesures nécessaires pour prévoir le caractère volontaire de la participation aux travaux de collaboration sociale pour les chômeurs percevant des prestations de chômage basées sur des contributions préalables.
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