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Pour avoir une vue d’ensemble des questions ayant trait à l’application des conventions ratifiées concernant les travailleurs migrants, la commission a estimé opportun d’examiner ensemble l’application des conventions nos 97 et 143.
Questions communes à l’application des conventions nos 97 et 143
Données statistiques sur les migrations. La commission prend note du profil migratoire établi en 2015 et mis à jour en 2018 par l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) en partenariat avec le gouvernement, dont ressortent pour l’année 2017 les chiffres suivants: 29 318 ressortissants étrangers enregistrés au Kenya; un total de 488 415 réfugiés et demandeurs d’asile présents dans le pays et un montant total des remises de salaires envoyées par la diaspora au Kenya d’environ 1 946 896 $ des États-Unis. La commission rappelle que des données et des statistiques pertinentes sont essentielles pour déterminer la nature de la migration de travailleurs et les inégalités de traitement auxquelles sont confrontées les travailleurs migrants et ce, pour définir des priorités et concevoir des mesures et pour en évaluer l’efficacité (voir étude d’ensemble de 2016 – promouvoir une migration équitable – paragraphe 648). La commission prie le gouvernement de continuer: 1) de collecter et analyser les données pertinentes des flux de migration à destination et au départ du Kenya; 2) de collecter et analyser des données sur la situation des travailleurs migrants au Kenya, y compris des données illustrant la part que représentent les travailleurs migrants en situation irrégulière dans le pays et la situation de ces personnes; 3) d’indiquer si ces données ont été collectées par le Bureau national de statistiques.
Article 1 de la convention no 97 et articles 10 et 12 de la convention no 143. Politique nationale des migrations. Dans ses précédents commentaires, la commission avait noté que la mise en œuvre des politiques concernant les migrations incombe à un certain nombre d’institutions (comme le Conseil national du travail, la Commission des permis de travail, le Service d’administration des citoyens kenyans et des ressortissants étrangers, la Commission des remises de l’étranger et de l’emploi à l’étranger et, enfin, le Conseil national de la diaspora du Kenya (NADICOK)) et elle avait demandé des informations sur les attributions respectives de ces organismes. La commission note que le gouvernement indique dans son rapport que le Mécanisme national de coordination assure la coordination interinstitutions en ce qui concerne les migrations et qu’un projet de Politique des migrations pour l’emploi ainsi qu’un projet de Loi de gestion des migrations pour l’emploi sont actuellement à l’étude. La commission prie le gouvernement de donner des informations sur les résultats des efforts déployés pour coordonner les activités de toutes les institutions compétentes en matière de migrations pour l’emploi, de même que sur l’état d’avancement du projet de Politique des migrations pour l’emploi et du projet de Loi de gestion des migrations pour l’emploi, sur le contenu de ces instruments et, s’ils sont adoptés, sur leurs effets dans la pratique.
Articles 1, 7 et 10 de la convention no 97 et article 4 de la convention no 143. Coopération entre États. La commission prend note des informations communiquées par le gouvernement concernant sa collaboration avec d’autres Membres sur les questions de migration pour l’emploi. Le gouvernement indique en particulier que: 1) ces questions sont examinées dans le cadre de Procédures consultatives régionales; 2) le Kenya est membre de la Communauté des États de l’Afrique de l’Est (EAC) et, à ce titre, il a adopté le Protocole sur le Marché commun de l’EAC, qui instaure la liberté de déplacement des ressortissants des pays membres de cette Communauté à l’intérieur de celle-ci; 3) le Kenya est membre du Programme d’intégration du Corridor nord, qui permettra de se déplacer muni d’une simple carte d’identité; 4) le Kenya est membre du Groupe de pilotage du Forum mondial sur la migration et le développement (FMMD), de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) et du Comité exécutif du Programme du Haut-commissaire des Nations unies pour les réfugiés; 5) le Kenya est partie à un certain nombre d’accords bilatéraux sur le travail et de protocoles d’accord concernant les migrations, par exemple à deux protocoles d’accord signés avec l’Allemagne en 2007 et à des accords bilatéraux signés avec l’Arabie Saoudite, le Qatar et les Émirats arabes unis en 2017. À ce propos, la commission invite le gouvernement à se reporter au document intitulé Principes généraux et directives opérationnelles concernant le recrutement équitable et définition des commissions de recrutement et frais connexes, étude de l’OIT dans laquelle les Membres sont invités à rendre accessibles au public les accords internationaux sur les migrations de main-d’œuvre.
Article 8 de la convention no 97 et article 8 de la convention no 143. Situation légale en cas d’incapacité de travail ou de perte de l’emploi. Précédemment, la commission avait prié le gouvernement de donner des informations sur l’application dans la pratique de l’article 41 (1)(b) de la loi de 2011 sur la citoyenneté et l’immigration au Kenya, en vertu duquel une autorisation de séjour délivrée à une personne qui a cessé d’occuper l’emploi ou d’exercer son activité dans le métier ou la profession au titre de laquelle cette autorisation de séjour a été délivrée cesse d’être valide. La commission rappelle qu’en vertu de l’article 8 de l’un et l’autre instruments susvisés, le travailleur migrant ne pourra pas être considéré en situation illégale ou irrégulière du fait même de la perte de son emploi, laquelle ne doit pas entraîner par elle-même le retrait de son autorisation de séjour ou, le cas échéant, de son permis de travail. Notant que le gouvernement n’a pas fourni d’informations à cet égard, la commission, réitérant sa demande précédente, prie le gouvernement d’indiquer dans quels cas de cessation de la relation d’emploi l’article 41(1)(b) de la loi de 2011 sur la citoyenneté et l’immigration au Kenya devient applicable.
Article 6 de la convention no 97 et articles 10 et 12 de la convention no 143. Égalité de traitement. Application dans la pratique. Dans ses commentaires précédents, la commission avait noté qu’en vertu de l’article 5 1)(b) de la loi de 2007 sur l’emploi, il incombe au ministre, à l’administration du travail et aux tribunaux du travail de promouvoir et garantir l’égalité de chances de toute personne qui est un travailleur migrant ou un membre de la famille du travailleur migrant séjournant légalement au Kenya, et elle avait demandé des informations sur l’application de cet article dans la pratique. Elle avait également demandé des informations sur l’action menée par l’inspection du travail par rapport à la protection du droit des travailleurs migrants à l’égalité de traitement. Notant que le rapport du gouvernement ne contient pas d’informations à cet égard, la commission prie à nouveau le gouvernement de donner des informations sur le nombre des situations entrant dans le champ de l’article 5 de la loi sur l’emploi de 2007 qui ont été décelées par les inspecteurs du travail ou qui ont été portées à leur attention, leur nature et leur dénouement (nombre des affaires portées devant les tribunaux, sanctions imposées).
Questions ayant trait spécifiquement à l’application de la convention no 97
Articles 2 et 4. Gratuité du service chargé d’aider les travailleurs migrants. Mesures prises en vue de faciliter le départ, le voyage et l’accueil des travailleurs migrants. La commission avait prié le gouvernement d’indiquer comment il assure que des informations suffisantes sont fournies aux travailleurs migrants et de préciser si les services fournis aux travailleurs migrants sont gratuits. Le gouvernement indique qu’il assure des formations préalables au départ et qu’il entretient une collaboration avec les attachés pour les questions de travail des missions diplomatiques du Kenya dans les pays de destination comme le Qatar, les Émirats Arabes unis et l’Arabie Saoudite. La commission observe également que le Plan stratégique 2018–2022 du Département d’État au travail mentionne un programme d’orientation et de formation préalable au départ qui a bénéficié à 5 100 personnes migrantes depuis 2018. En outre, elle prend note avec intérêt du lancement en 2019 du site Web d’information des travailleurs migrants du Kenya, qui propose des informations détaillées sur les migrations pour l’emploi dans la région du Golfe persique. La commission prie le gouvernement de poursuivre les efforts entrepris afin que des informations exactes soient fournies aux travailleurs migrants et elle le prie d’indiquer quelles sont les autres services gratuits, s’il en est, qui sont fournis aux travailleurs migrants en vue de faciliter leur départ, leur voyage et leur accueil dans le pays de destination, en particulier sur les mesures mises en place pour aider les travailleurs migrants pendant leur séjour dans le pays de destination.
Article 3. Mesures appropriées contre la propagande trompeuse. La commission prie le gouvernement de donner des informations sur les sanctions punissant la diffusion d’une propagande trompeuse concernant l’émigration et l’immigration.
Article 5. Services médicaux. Le rapport du gouvernement ne contenant pas d’informations à ce sujet, la commission, réitérant sa demande précédente, prie le gouvernement de préciser les conditions dans lesquelles sont pratiqués les examens médicaux des travailleurs migrants prévus aux articles 48 1)(d) et 33 2)(a) de la loi sur la citoyenneté et l’immigration au Kenya, en précisant la nature des examens médicaux ainsi pratiqués.
Questions ayant trait spécifiquement à l’application de la convention no 143
Articles 1 et 9. Droits fondamentaux de l’homme de tous les travailleurs migrants et droits découlant d’emplois antérieurs reconnus à ces travailleurs. Dans ses précédents commentaires, la commission avait prié le gouvernement de donner des informations sur les mesures prises afin que soient pleinement respectés: 1) les droits fondamentaux de l’homme des travailleurs migrants se trouvant en situation irrégulière; 2) les droits découlant d’emplois antérieurs reconnus à ces travailleurs. La commission note que le gouvernement n’a pas donné d’information sur ces deux aspects. Elle observe cependant que le Plan stratégique de la Commission des droits de l’homme du Kenya (KCHR) pour 2018–2023 fait état de la nécessité, pour la KCHR, de militer pour une approche respectueuse des droits de l’homme dans la politique concernant les migrations. La commission note également que la loi de 2007 sur l’emploi s’applique à l’égard des «salariés», qui sont définis comme étant toutes personnes employées pour un salaire ou un traitement (article 2 de la loi), définition qui semble comprendre les travailleurs migrants, sans considération de leur situation au regard des règles de séjour dans le pays. La commission prie le gouvernement de donner des informations sur les mesures prises pour assurer la protection des droits fondamentaux de l’homme pour tous les travailleurs migrants, y compris lorsque ceux-ci n’ont pas de titre légal de séjour. À cet égard, elle le prie de donner des informations sur: i) l’action menée par la Commission des droits de l’homme du Kenya (KCHR) pour faire accepter une approche respectueuse des droits de l’homme dans la politique concernant les migrations; ii) les enquêtes menées par l’inspection du travail ou les organismes s’occupant de la défense des droits de l’homme dans les cas d’abus commis contre des travailleurs migrants; iii) le nombre des cas de violations des droits de l’homme commises contre des travailleurs migrants dont la justice a été saisie, et leur dénouement. Elle le prie également de donner des informations sur les dispositions adoptées pour faciliter l’accès des travailleurs migrants en situation irrégulière aux voies légales de réparation dans les cas de violations de leurs droits découlant d’emplois antérieurs. À ce titre, elle le prie de donner des informations sur: i) le nombre des plaintes déposées par des travailleurs migrants sans titre légal de séjour pour des violations de leurs droits découlant d’emplois antérieurs et les suites faites à ces plaintes; ii) toutes facilités accordées à ces travailleurs migrants pour leur permettre de résider légalement dans le pays tant que les procédures sont en cours.
Articles 2 à 6. Mesures prises pour déceler et réprimer l’organisation de migrations illégales et les abus commis contre des travailleurs migrants. La commission avait prié le gouvernement de donner des informations sur l’application de la loi de 2010 contre la traite des êtres humains et de la loi de 2011 sur la citoyenneté et l’immigration au Kenya, de même que sur les politiques adoptées pour lutter contre la traite. La commission prend note des informations communiquées par le gouvernement concernant les activités de la Commission consultative contre la traite des êtres humains (CTPAC) et du Fonds fiduciaire national d’assistance aux victimes de la traite. Elle note en particulier que la CTPAC se réunit tous les quatre mois pour étudier les questions de prévention, de protection, ou encore de réadaptation des victimes de la traite et que cet organisme agit en partenariat avec d’autres institutions et assure une formation des fonctionnaires et autres interlocuteurs sur la lutte contre la traite. Le gouvernement se réfère également au Plan national de lutte contre la traite des êtres humains pour la période 2013–2017, qui prévoit des actions en ce qui concerne de développement des capacités des fournisseurs de services, la sensibilisation du public, la collecte de données et la recherche, la répression de l’emploi frauduleux, l’assistance directe aux victimes et la coopération internationale. Le gouvernement indique en outre que la justice a été saisie de 65 affaires de traite au cours de l’année 2014. Enfin, le gouvernement déclare mettre en place des règles strictes d’enregistrement et de surveillance des activités des agences d’emploi s’occupant de placement de travailleurs kenyans à l’étranger. La commission prie le gouvernement de donner des informations sur:
  • - les mesures concrètes prises dans le cadre du Plan national de lutte contre la traite des êtres humains pour la période 2013–2017 (toutes données statistiques disponibles concernant la traite des êtres humains, ainsi que des informations actualisées sur le nombre des affaires de cette nature qui ont été mises au jour et sur leur issue);
  • - les sanctions appliquées dans la pratique dans les cas d’emploi illégal de travailleurs migrants ou d’organisation de migrations dans des conditions abusives;
  • - la réglementation applicable aux agences d’emploi (leurs procédures d’enregistrement; les conditions de révocation de leur agrément; le système de surveillance en place; la possibilité pour les travailleurs migrants de déposer des réclamations ou des plaintes contre ces agences; le texte du Code de conduite adopté par l’Association kenyane des agences d’emploi privé, mentionné dans les rapports précédents du gouvernement).
Article 2, paragraphe 2 et article 7. Consultation des organisations d’employeurs et de travailleurs. La commission rappelle qu’elle avait prié le gouvernement d’indiquer comment les organisations d’employeurs et de travailleurs sont consultées sur les mesures conçues et mises en œuvre en vue de prévenir et éliminer les migrations illégales et les abus commis au détriment de travailleurs migrants. Elle note que le gouvernement indique qu’il s’est engagé dans une démarche participative, partageant et sollicitant les avis des employeurs et des travailleurs en vue de la formulation d’un projet de loi de gestion des migrations pour l’emploi. La commission note que le Plan national de lutte contre la traite des êtres humains pour la période 2013–2017 prévoit la participation des partenaires sociaux pour sa mise en œuvre et mentionne à cet égard le rôle important de l’Organisation centrale des syndicats (COTU) et de la Fédération des employeurs du Kenya (FKE). La commission prie le gouvernement de fournir de plus amples informations sur l’impact de l’association des partenaires sociaux à l’élaboration et, le cas échéant, la mise en œuvre de la politique concernant les migrations pour l’emploi et le projet de loi de gestion des migrations pour l’emploi; elle le prie également d’indiquer si les partenaires sociaux sont consultés au sujet de toute autre mesure visant à prévenir et éliminer les migrations illégales et les abus au détriment de travailleurs migrants (en précisant si, et dans l’affirmative comment, les propositions émanant des organisations de travailleurs et d’employeurs sont évalués dans la pratique).
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