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Indigenous and Tribal Peoples Convention, 1989 (No. 169) - Guatemala (RATIFICATION: 1996)

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La commission prend note des observations conjointes du Comité de coordination des associations de l’agriculture, du commerce, de l’industrie et de la finance (CACIF) et de l’Organisation internationale des employeurs (OIE) reçues en 2017 et le 1er septembre 2018. De même, la commission prend note des observations du Mouvement syndical, indigène et paysan guatémaltèque (MSICG) reçues en 2016 et le 13 février 2018, ainsi que des observations conjointes du Mouvement syndical et populaire autonome du Guatemala et des Syndicats globaux du Guatemala reçues le 1er septembre 2018. La commission note que le rapport du gouvernement contient des informations détaillées et salue ses efforts à ce propos.
Articles 2 et 33 de la convention. Action coordonnée et systématique. Dans ses précédents commentaires, la commission a encouragé le gouvernement à poursuivre ses efforts, en coopération avec les peuples indigènes, afin de mettre en place un mécanisme permettant de mener à bien une action coordonnée et systématique des politiques et programmes requis par la convention. Le gouvernement se réfère dans son rapport à l’installation, en 2016, du Cabinet des peuples indigènes et de l’interculturalité, en tant qu’organe consultatif et délibératif dépendant de la présidence de la République, et dont les fonctions consistent notamment à: veiller à ce que chaque ministère ait un service de conseillers pour les peuples indigènes; évaluer les actions de l’Etat en matière de peuples indigènes et d’interculturalité; et entreprendre et diligenter des études et des enquêtes sur l’impact des politiques. Le cabinet se compose de neuf ministères, cinq secrétariats et d’institutions gouvernementales chargées des questions indigènes, et des délégués nationaux des peuples indigènes au Système de conseils du développement. Le gouvernement souligne qu’une des priorités du cabinet est l’élaboration de la Politique des peuples indigènes et de l’interculturalité (PPII) 2018-2030, faisant ainsi suite à un processus entamé en 2013. A cet effet, un comité technique interinstitutionnel a été constitué et une feuille de route opérationnelle a été approuvée.
En outre, le gouvernement se réfère au plan national de développement k’atun nuestra Guatemala 2032, en soulignant que celui-ci repose sur une philosophie de l’équité désireuse d’améliorer la qualité de vie de toute la population, et notamment des hommes et femmes indigènes. Le gouvernement souligne que, sur un total de 62 politiques publiques, 34 se réfèrent aux droits des peuples maya, xinka et garifuna. De même, les grandes lignes directrices de la politique 2019-2023 prêtent une attention particulière aux peuples indigènes des points de vue de la malnutrition, de la santé, de l’eau et des ressources naturelles. En matière d’investissements publics, les bénéficiaires furent les départements suivants qui concentrent un pourcentage important de la population indigène: Totonicapán, Sololá, Alta Verapaz, Quiché, Chimaltenango, Huehuetenango, Baja Verapaz, Quetzaltenango, Suchitepéquez et Sacatepéquez. Le gouvernement fournit des informations sur les activités développées par diverses institutions qui traitent de manière directe ou indirecte des questions en rapport avec les peuples indigènes, en particulier le Fonds de développement indigène guatémaltèque.
La commission note que, dans leurs observations conjointes, le Mouvement syndical et populaire autonome du Guatemala et les Syndicats globaux du Guatemala déplorent l’absence d’un organe directeur des politiques publiques en matière de peuples indigènes. La commission observe que, dans son rapport annuel de 2017, le Procureur des droits de l’homme du Guatemala signale que les 32 entités créées pour s’occuper spécifiquement des peuples indigènes sont confrontées à d’importants défis, parmi lesquels l’instabilité institutionnelle due à l’absence d’un cadre légal solide, ainsi que la pénurie de budget et de personnel qui les empêche d’étendre la couverture des services qu’elles proposent.
La commission exprime l’espoir que le gouvernement adoptera les mesures nécessaires en vue de l’adoption rapide de la Politique des peuples indigènes et de l’interculturalité (PPII) et elle le prie d’indiquer de quelle manière les peuples indigènes ont été consultés et ont participé à l’élaboration de cette politique. La commission prie également le gouvernement d’indiquer les mesures prises pour faire en sorte que le Cabinet des peuples indigènes et de l’interculturalité dispose du personnel et des ressources matérielles adéquats pour évaluer les actions de l’Etat en matière de peuples indigènes et d’interculturalité. Elle le prie également de communiquer des informations sur les résultats des évaluations réalisées par cet organisme. Enfin, tout en prenant note de l’existence de diverses institutions ayant pour objectif de garantir les droits des peuples indigènes inscrits dans la convention, la commission prie le gouvernement d’assurer la coordination et la systématisation efficaces des actions entreprises par celles-ci en définissant de manière appropriée leur cadre légal. La commission prie le gouvernement de l’informer à ce sujet.
Article 3. 1. Droits de l’homme. La commission a demandé précédemment au gouvernement d’indiquer les mesures adoptées pour éviter tout recours à la force ou à la coercition en violation des droits de l’homme et des libertés fondamentales des peuples indigènes. Elle a également demandé des informations actualisées sur l’état d’avancement de la procédure judiciaire instituée en rapport avec les événements survenus à Totonicapán en 2012, et sur les jugements prononcés contre les personnes poursuivies dans cette affaire. La commission prend note des informations transmises par le gouvernement dans lesquelles le ministère public décrit les différentes étapes de la procédure judiciaire entamée contre un colonel d’infanterie et huit membres de la garde citoyenne de l’armée guatémaltèque accusés de plusieurs délits, dont celui d’homicide, commis pendant les événements de Totonicapán. Le gouvernement donne aussi des informations sur les mesures prises pour faciliter l’accès des peuples indigènes à la justice, en indiquant en particulier qu’en 2017 s’est créé un secrétariat des peuples indigènes au sein du ministère public et dans le pouvoir judiciaire, et qu’a été adoptée la politique de l’accès des peuples indigènes au ministère public 2017-2025.
La commission observe que le Mouvement syndical et populaire autonome du Guatemala et les Syndicats globaux du Guatemala expriment leur préoccupation devant l’intensification notable de la répression contre les organisations sociales, communautaires et indigènes qui réclament le respect de leurs droits. Ces organisations allèguent en outre que le ministère public a joué un rôle fondamental dans la criminalisation des peuples indigènes, en particulier des leaders, hommes et femmes, qui s’opposent à des projets de grands travaux sur leurs territoires. A titre d’exemple, les organisations syndicales se réfèrent à des situations concrètes de leaders de peuples indigènes assassinés, détenus ou victimes de violences, qui illustrent la répression et la criminalisation de leurs protestations.
La commission prend également note du rapport, du 10 août 2018, de la Rapporteuse spéciale des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones sur sa visite au Guatemala. La commission observe que la Rapporteuse se déclare gravement préoccupée «par la recrudescence des procédures pénales entamées contre des personnes autochtones qui défendent leurs terres et leurs ressources». Le rapport souligne également que «le Guatemala est confronté à une intensification alarmante de la violence que démontre l’augmentation des assassinats de défenseurs autochtones qui tentent de défendre leurs droits sur leurs terres traditionnelles» (A/HRC/39/17/Add.3).
La commission exprime sa profonde préoccupation face aux assassinats, actes de violence et devant la répression des protestations sociales des peuples indigènes, et elle prie instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que fassent l’objet d’enquêtes les assassinats ainsi que tous les actes de violence signalés, et pour que soient diligentées des procédures judiciaires pertinentes afin d’identifier les auteurs, de définir les responsabilités et de sanctionner les coupables. La commission prie le gouvernement de communiquer copie de toute décision de justice rendue dans ce contexte. La commission prie aussi instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires afin d’instaurer un climat exempt de violence dans le cadre duquel seront préservés l’intégrité des personnes, les institutions, les biens, le travail, les cultures et l’environnement des peuples indigènes, ainsi que le respect de leurs droits de l’homme et de tous les droits consacrés dans la convention. De même, la commission prie le gouvernement de fournir des informations sur le résultat des procédures relatives aux événements de Totonicapán.
2. Lutte contre la discrimination. La commission prend note des informations détaillées fournies par le gouvernement à propos des activités réalisées pour lutter contre la discrimination et pour promouvoir et valoriser la renaissance et la pratique de la culture des peuples qui constituent la nation (maya, garifuna, xinka et métis). La commission prend note en particulier des programmes mis en œuvre par la Direction générale du développement culturel et du renforcement des cultures; des activités de formation en matière de prévention de la discrimination et du racisme légal, économique et institutionnel dispensées par la Commission présidentielle contre la discrimination et le racisme (CODISRA) en faveur des fonctionnaires publics, des acteurs de la justice et des chargés de formation des institutions publiques (diplômés, programme d’études supérieures, cours de formation des formateurs, ateliers de formation); ainsi que de la politique de l’égalité de genre institutionnelle, laquelle compte au nombre de ses objectifs le renforcement de la participation active des femmes mayas, garifunas, xinkas et métisses dans les processus électoraux. Le gouvernement transmet aussi des informations sur les plaintes déposées auprès du ministère public pour délit de discrimination, sur les cas traités en première instance pénale et sur les personnes condamnées pour ce délit entre 2015 et février 2018. La commission observe qu’en moyenne 350 plaintes ont été déposées chaque année et que huit condamnations ont été prononcées sur base de l’article 202 du Code pénal qui interdit la discrimination.
La commission observe que, dans son rapport de 2017, le Procureur des droits de l’homme du Guatemala indique que l’agenda indigène en souffrance devant le Congrès n’a pas progressé parce que «le Guatemala n’a pas connu de changement de paradigme sur la diversité culturelle, de volonté de lutter contre la “discrimination” ni de disposition à consulter les peuples indigènes». Le procureur considère que la pertinence culturelle des politiques publiques nécessite une nouvelle approche, avec «des structures inclusives dans toutes les institutions publiques, des politiques spécifiques assorties de budgets et reposant sur des critères de transparence et de participation, des mesures positives et des mesures de lutte contre le racisme et la discrimination dans le cadre public et institutionnel». La commission prie le gouvernement d’intensifier ses efforts en vue de prévenir et combattre la discrimination qui affecte les membres des communautés indigènes, l’accent étant mis en particulier sur les femmes indigènes, et de communiquer des informations sur les activités organisées par la CODISRA à cet égard, ainsi que par les autres organismes publics compétents.
Articles 6 et 7. Mécanisme approprié de consultation et de participation. Dans ses précédents commentaires, la commission a pris note du fait que les dispositions qui régissent les procédures de consultation figurant dans le Code municipal et dans la loi sur les conseils de développement urbain et rural ne permettaient pas de donner pleinement effet à la convention. Elle a exprimé l’espoir de voir se développer dans le pays un dialogue constructif qui permettrait d’instaurer un mécanisme approprié de consultation et de participation et elle avait demandé au gouvernement de l’informer des résultats obtenus. Le gouvernement indique qu’en octobre 2016 a démarré le « Dialogue national pour l’élaboration de normes de base pour la consultation des peuples indigènes» qui avait pour objectifs d’organiser des réunions et des ateliers participatifs avec des autorités ancestrales, des leaders et représentants d’organisations de peuples indigènes; de définir un instrument d’orientation pour donner effet à la convention; et d’obtenir des informations en vue de l’élaboration d’un guide pratique pour la consultation des peuples indigènes. Le gouvernement indique que la méthodologie utilisée pendant le processus de consultation dans le cadre de ce dialogue national comportait cinq phases: i) approche territoriale avec identification des leaders, autorités et organisations indigènes correspondant au territoire linguistique; ii) réalisation d’ateliers, dialogues et réunions bilatérales destinés à recueillir des contributions; iii) compilation des contributions et incorporation dans le guide; iv) réalisation de trois ateliers régionaux et retour d’information pour la conception du guide; et v) processus de «socialisation» et présentation nationale du guide. Le gouvernement indique que le guide constitue un document d’orientation à l’intention de l’institution publique sur la manière de réaliser la consultation préalable avec les peuples indigènes. Le gouvernement souligne à cet égard que le guide se conforme à l’arrêt de la Cour constitutionnelle du 26 mai 2017 relatif aux projets hydroélectriques Oxec et Oxec II (dossiers joints nos 90 2017, 91-2017 et 92-2017) qui définit, entre autres choses, les orientations et les lignes directrices que doit suivre toute consultation des peuples indigènes s’appliquant obligatoirement aux organes de l’Etat, appelant le Congrès de la République à élaborer, dans le délai d’une année, la procédure législative qui doit assurer l’approbation de la loi sur le droit de consultation. A cet égard, le gouvernement indique que le Congrès a devant lui deux initiatives législatives se rapportant au droit à la consultation des peuples indigènes, et que l’une d’elles a été transmise par le ministère du Travail au BIT. Par ailleurs, pour illustrer comment s’applique la méthodologie prévue par le guide, le gouvernement décrit les différentes étapes du processus de consultation réalisé par le ministère de l’Energie et des Mines avec la communauté maya q’eqchi s’agissant des centrales hydroélectriques Oxec et Oxec II. Le gouvernement souligne la présence des services du Procureur des droits de l’homme en tant qu’observateur et de garant du processus de consultation, ainsi que de l’Académie des langues mayas du Guatemala afin de garantir la traduction dans la langue q’eqchi. Le processus de consultation s’est achevé par la présentation de propositions pour l’élaboration d’un accord sur l’instauration de la paix, les aspects environnementaux et le développement durable.
La commission note que le CACIF reconnaît les efforts consentis par le gouvernement pour la réalisation du guide destiné à la consultation des peuples indigènes, dont le contenu a été rédigé après consultation du secteur patronal et des représentants des peuples indigènes. Le CACIF souligne que, bien que ce guide ne soit pas un instrument juridique, son application par les autorités devrait contribuer à conférer de la certitude aux processus de consultation futurs. Toutefois, le CACIF exprime sa préoccupation devant l’absence de réglementation adéquate qui garantisse la bonne application du droit à la consultation inscrit dans la convention, ainsi que devant l’incertitude générée par les jugements rendus par des tribunaux nationaux qui ont donné lieu à une jurisprudence contradictoire quant à la portée et la forme que doit avoir la consultation des peuples indigènes. Se référant à l’arrêt de la Cour constitutionnelle dans l’affaire Oxec, le CACIF apprécie le fait que la cour ait tenté d’arrêter un critère uniforme à l’intention des tribunaux et autres organismes de l’Etat en donnant des lignes directrices pour la conduite de toute consultation de peuples indigènes au Guatemala. Le CACIF souligne aussi que, dans cet arrêt, la cour a statué que la consultation des communautés indigènes affectée par les projets Oxec devait se réaliser dans un délai de douze mois et que, pendant la réalisation de cette consultation, l’entreprise chargée du projet pourrait poursuivre les travaux. Le CACIF regrette que des jugements ultérieurs aient ordonné l’annulation de licences ou la suspension des activités des entreprises, ce qui a eu des répercussions directes sur celles-ci, ainsi que pour les travailleurs du fait des postes de travail qui ont été ainsi perdus.
La commission observe que le Mouvement syndical et populaire autonome du Guatemala et les Syndicats globaux du Guatemala indiquent que les initiatives législatives visant à réglementer le droit à la consultation n’ont pas fait l’objet de consultations avec les peuples indigènes et que beaucoup d’autorités traditionnelles ont rejeté le guide pratique pour le processus de consultation des peuples indigènes adopté en 2017. Les organisations syndicales considèrent que les rares reconnaissances effectives du droit à la consultation proviennent uniquement des recours successifs introduits par les peuples indigènes devant la justice.
La commission prend bonne note des efforts déployés par le gouvernement dans le cadre du processus de consultation mené à bien en vue de l’adoption du guide pratique pour la consultation des peuples indigènes. Tout en prenant note de l’arrêt de la Cour constitutionnelle à propos des projets Oxec et de la présentation au Congrès national de deux projets de loi réglementant la consultation des peuples indigènes, la commission observe que le gouvernement n’indique pas si les peuples indigènes ont été consultés ni de quelle manière sur les deux projets de loi. La commission rappelle que, conformément à l’article 6 de la convention, le gouvernement doit consulter les peuples intéressés par des procédures appropriées, et en particulier à travers leurs institutions représentatives, chaque fois que l’on envisage des mesures législatives ou administratives susceptibles de les toucher directement. Les consultations doivent être menées de bonne foi, par le biais d’un dialogue authentique, par des mécanismes appropriés et adaptés aux circonstances, en vue de parvenir à un accord ou d’obtenir un consentement au sujet des mesures envisagées. De même, il faut laisser suffisamment de temps aux peuples indigènes pour organiser leurs propres processus internes de prise de décisions et participer de manière efficace aux décisions adoptées.
Par conséquent, la commission exprime le ferme espoir que les mesures nécessaires seront adoptées pour que les peuples indigènes soient consultés, dans les conditions prévues à l’article 6, et puissent participer de manière appropriée, à travers leurs entités représentatives, à l’élaboration du projet de loi qui réglemente le mécanisme de consultation des peuples indigènes, de manière telle qu’ils puissent exprimer leurs opinions et influer sur le résultat final du processus. La commission prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour faire en sorte que tout texte de loi qu’il prévoit d’adopter pour la réalisation de la consultation préalable des peuples indigènes permette de donner pleinement effet aux articles de la convention qui traitent de la consultation (articles 6, 15, paragraphe 2, 16, 17, 22, 27 et 28). Dans l’attente de l’adoption de la législation, la commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les processus de consultation qui ont eu lieu concernant les mesures administratives et législatives susceptibles de toucher les peuples indigènes, ainsi que sur toute plainte déposée à cet égard. La commission rappelle au gouvernement qu’il peut, s’il le juge utile, solliciter l’assistance technique du Bureau à cet égard.
Article 14. Terres. Dans les commentaires qu’elle formule depuis plusieurs années, la commission prie le gouvernement de prendre les mesures transitoires nécessaires pour protéger les droits de propriété et de possession des peuples indigènes sur les terres qu’ils occupent traditionnellement, conformément à l’article 14 de la convention, en l’absence de progrès dans la régularisation de leurs droits fonciers. A cet égard, la commission avait pris note de la loi sur le registre cadastral (décret no 41-2005) et avait fait remarquer que son titre VII, «Régularisation dans le cadre du processus cadastral» s’applique jusqu’à l’entrée en vigueur de la «loi sur la possession de la terre», et que l’article 65, figurant dans ce titre provisoire, arrête les mécanismes de détermination et d’enregistrement des terres communales. Dans son dernier commentaire, la commission a demandé au gouvernement des informations sur l’application dans la pratique de la loi sur le registre cadastral et son règlement de 2009. Elle a également demandé des informations sur l’impact des mesures adoptées en matière de développement rural et de politique agraire sur la reconnaissance effective des droits sur les terres des peuples indigènes.
Le gouvernement indique que, entre 2015 et 2017, 6 728 familles ont bénéficié de décisions d’attribution et de régularisation de terres de l’Etat dans le cadre du programme de régularisation et d’attribution de terres de l’Etat. Le gouvernement considère que ce programme concrétise l’accord sur les aspects socio-économiques et la situation agraire de 1996, en ce qui a trait à la régularisation des titres sur les terres des communautés paysannes et indigènes. Dans ce contexte, le Fonds des terres analyse les dossiers d’attribution et de possession des terres transmises ou en cours de transmission par l’Etat. La commission note qu’il ressort de ces informations que la moitié des bénéficiaires des décisions étaient des familles mayas mais que les familles xinkas ou garifunas n’en auraient pas bénéficié. Le gouvernement fournit aussi des informations sur les programmes mis en place par le Fonds des terres, parmi ceux-ci le programme d’accès à la terre par le biais de crédits subventionnés et le programme spécial de location de terres destiné à des familles paysannes ou indigènes sans terre ou avec des terres insuffisantes et en situation de pauvreté.
Le gouvernement indique également que: i) le secrétariat aux questions agricoles de la présidence (SAA) développe un travail stratégique qui a permis, grâce à divers mécanismes, de faciliter un règlement négocié et consensuel entre les acteurs de conflits agraires; ii) le SAA n’a pas la faculté de dire quelle est la personne détentrice du droit, mais apporte son concours à des études historiques sur le registre et le cadastre; iii) la reconnaissance du droit à la terre relève de la compétence du registre général de la propriété, à travers les certificats qu’il délivre pour les domaines dûment inscrits; en outre, la reconnaissance de la possession de la terre se fait, de manière publique, pacifique et de bonne foi, par la possession coutumière des peuples indigènes; iv) le SAA privilégie le recours au droit coutumier pour trancher des conflits portant sur la terre entre membres d’une même communauté ou de communautés différentes; v) s’agissant de cas ayant un impact élevé, 35 environ ont été identifiés pour lesquels ont été constitués des groupes de dialogue permanent; vi) suivant les données communiquées, pendant l’année 2017, les délégations du SAA ont traité un total de 1 425 cas et ont tranché 485 litiges; vii) les départements qui ont connu le plus grand nombre de conflits agraires sont: Huehuetenango, Petén, Alta Verapaz, Quiché et Izabal; et viii) parmi les difficultés recensées par le SAA, le gouvernement cite la difficulté d’obtenir des accords en un temps plus réduit, celle de trouver des voies plus adéquates pour le traitement des problèmes par des méthodes de substitution, et celle d’instaurer une communication directe avec toutes les personnes ou tous les groupes.
La commission note que le Mouvement syndical et populaire autonome du Guatemala et les Syndicats globaux du Guatemala allèguent de l’existence d’une dynamique d’expulsions par ordonnances de justice qui affectent les droits humains individuels et collectifs des communautés indigènes. Selon eux, ces expulsions ont entraîné des conséquences graves pour les communautés qui se retrouvent dans une situation d’absence totale de protection, sans accès aux services de base, tandis que leurs pratiques ancestrales et d’autres activités collectives sont menacées de disparition.
La commission note que, dans le rapport de sa visite au Guatemala du mois d’août 2018, la Rapporteuse spéciale des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones indique que l’«absence alarmante de protection des droits collectifs de propriété de leurs terres s’inscrit dans un contexte d’extrême inégalité dans la répartition de la terre et d’insécurité de la possession, avec un système d’enregistrement inadéquat qui permet que des terres ancestrales indigènes soient attribuées à des tierces parties, et sans mécanismes appropriés pour le règlement des conflits de propriété qui tendent à se judiciariser» (A/HRC/39/17/Add.3). Dans son rapport de 2017 sur les activités de son bureau au Guatemala, le Haut Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme souligne que «persiste une absence de protection de la propriété collective des peuples autochtones, ce qui affecte particulièrement les femmes en matière de titres de propriété de la terre et d’accès aux crédits» (A/HRC/37/3/Add.1).
Tout en prenant note du programme de régularisation et d’attribution des terres de l’Etat, la commission observe qu’il ne ressort pas des informations communiquées par le gouvernement que le processus de régularisation des terres occupées traditionnellement par les peuples indigènes ait progressé en termes d’identification et d’enregistrement des terres communales. La commission prie le gouvernement d’adopter sans retard les mesures nécessaires pour protéger de manière appropriée les droits à la terre des peuples indigènes conformément à l’article 14 de la convention et de fournir des informations sur les zones de terres détenues, le nombre de personnes concernées et les zones géographiques correspondantes. La commission réitère sa demande d’informations concrètes sur l’application dans la pratique du décret no 41-2005 et son règlement de 2009 sur les terres communales. Elle prie également le gouvernement de fournir des informations sur l’état d’avancement de la procédure d’enregistrement des terres. Prière de continuer à fournir des informations sur les mécanismes de résolution des conflits en indiquant les conflits résolus et ceux en suspens.
La commission soulève d’autres questions dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.
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