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La commission prend note des observations communiquées le 31 mai 2015 par la Confédération générale autonome des travailleurs en Algérie (CGATA) au sujet de l’avant-projet de loi portant Code du travail et de son incidence sur l’application de la convention.
Article 1 de la convention. Protection contre la discrimination. Législation. Travailleurs du secteur privé. Depuis de nombreuses années, la commission souligne que l’article 17 de la loi no 90-11 du 21 avril 1990 relative aux relations de travail ne couvre pas l’ensemble des motifs de discrimination dans l’emploi et la profession énumérés par la convention et qu’il ne permet pas d’appréhender les comportements discriminatoires de l’employeur ou de toute autre personne à l’encontre d’un travailleur dans tous les aspects de l’emploi (recrutement, promotion, licenciement, etc.), car cet article prévoit seulement la nullité de «toute disposition prévue au titre d’une convention ou d’un accord collectif, ou d’un contrat de travail, de nature à asseoir une discrimination». La commission rappelle également le caractère général de l’article 6 de la loi no 90 11, qui prévoit que les travailleurs ont droit à «une protection contre toute discrimination pour occuper un poste autre que celui fondé sur leur aptitude et leur mérite». La commission note avec regret que le rapport du gouvernement ne contient aucune information sur la protection des travailleurs contre la discrimination. Elle note par ailleurs que le projet d’article 12 de l’avant-projet de loi portant Code du travail, dans sa version d’octobre 2015, reprend les dispositions générales de l’article 6 de la loi no 90-11. Par contre, la commission accueille favorablement l’insertion dans le projet d’article 31 d’une définition de la «discrimination» conforme à la convention, et des motifs de l’ascendance nationale, de l’origine sociale et des convictions religieuses, énumérés à l’article 1, paragraphe 1 a), de la convention, ainsi que du motif de la nationalité, selon ce que prévoit l’article 1, paragraphe 1 b). Elle salue également la référence à la discrimination directe et à la discrimination indirecte et note que le projet d’article 31 prévoit que «la discrimination dans l’emploi et les professions est incompatible avec les dispositions de la présente loi». La commission relève toutefois que la référence à «toute disposition des conventions ou accords collectifs ou du contrat de travail» subsiste et estime qu’une telle référence ne couvre pas les comportements ou agissements discriminatoires autres que ceux qui résultent de dispositions de contrats de travail ou de conventions ou d’accords collectifs. Elle constate également que la liste des motifs de discrimination interdits figurant dans le projet d’article 31 omet les motifs de «la race» et de «la couleur». Tout en saluant ces avancées, la commission demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour faire en sorte que le futur Code du travail interdise expressément toute forme et tout acte de discrimination directe et indirecte fondée, au minimum, sur l’ensemble des motifs énumérés à l’article 1, paragraphe 1 a), de la convention, y compris la race et la couleur, ainsi que tout autre motif au titre de l’article 1, paragraphe 1 b), en consultation avec les organisations de travailleurs et d’employeurs, et que ces dispositions couvrent tous les aspects de l’emploi et de la profession, notamment l’accès à l’emploi et aux différentes professions, ainsi que le licenciement. La commission demande au gouvernement de fournir des informations sur toute mesure prise en ce sens et sur l’état d’avancement de l’avant-projet de loi portant Code du travail.
Fonctionnaires. Dans ses commentaires précédents, la commission soulignait que l’ordonnance no 06-03 du 15 juillet 2006 portant Statut général de la fonction publique interdit toute discrimination entre les fonctionnaires «en raison de leurs opinions, de leur sexe, de leur origine ainsi que de toute autre condition personnelle ou sociale» (art. 27) et demandait au gouvernement d’envisager la possibilité d’inclure, dans la liste des motifs de discrimination interdits visés par le Statut général de la fonction publique, une référence expresse à l’opinion politique, la religion, la race, la couleur, l’ascendance nationale et l’origine sociale. La commission note avec regret que le rapport du gouvernement ne contient aucune information à cet égard. Soulignant l’importance de mettre en place un dispositif complet de protection des fonctionnaires contre la discrimination afin de leur permettre de faire valoir leurs droits de manière effective, la commission demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour élargir la liste des motifs de discrimination interdits par une référence expresse, au minimum, à tous les motifs énumérés à l’article 1, paragraphe 1 a), de la convention.
Article 1, paragraphe 1 a). Discrimination fondée sur le sexe. Harcèlement sexuel. La commission salue l’insertion, dans les projets d’articles 56 à 59 de l’avant-projet de loi portant Code du travail (version d’octobre 2015), de dispositions qui définissent le harcèlement sexuel qui s’apparente à un chantage (quid pro quo) et le harcèlement sexuel dû à un environnement de travail hostile, protègent contre les représailles en cas de refus de céder au harcèlement et prévoient des sanctions disciplinaires. Elle souhaiterait toutefois attirer l’attention du gouvernement sur le fait que ces dispositions ne prévoient pas l’interdiction expresse du harcèlement sexuel, mais seulement la protection des victimes contre les représailles de la part de l’employeur. La commission note également que la CGATA observe que l’avant-projet de loi portant Code du travail prévoit une protection contre le harcèlement sexuel, mais souligne que les sanctions prévues par le projet d’article 58 ne semblent pas concerner l’employeur puisqu’il s’agit de sanctions disciplinaires et que l’imposition de telles sanctions est une des prérogatives de l’employeur. Tout en saluant ces progrès, la commission veut croire que le gouvernement introduira dans le Code du travail des dispositions interdisant expressément le harcèlement sexuel sous toutes ses formes et qu’il prévoira des sanctions applicables à tout auteur de harcèlement sexuel ainsi que des réparations appropriées. S’agissant des mesures pratiques de prévention contre le harcèlement sexuel, la commission demande au gouvernement de fournir des informations sur toute mesure mise en œuvre dans le cadre de la Stratégie nationale de lutte contre la violence à l’égard des femmes adoptée en 2007, ou dans tout autre cadre concernant plus spécifiquement le travail, en collaboration avec les organisations de travailleurs et d’employeurs.
Articles 2 et 3. Politique nationale. Egalité de chances et de traitement entre hommes et femmes. Depuis de nombreuses années, la commission exprime sa vive préoccupation quant à la faible participation des femmes à l’emploi et à la persistance d’attitudes fortement stéréotypées concernant les rôles des femmes et des hommes, et leurs responsabilités respectives, dans la société et la famille, lesquelles ont un impact négatif sur l’accès des femmes à l’emploi et à la formation. La commission note que le gouvernement reconnaît une fois encore, dans son rapport, que le taux d’emploi des femmes demeure relativement faible et que les pesanteurs sociologiques, les choix personnels et d’autres résistances sociales constituent des freins au dynamisme et à l’insertion d’un plus grand nombre de femmes sur le marché du travail. La commission prend note des statistiques fournies par le gouvernement, qui montrent qu’entre 2010 et 2014 la population féminine occupée est passée de 1 474 000 à 1 722 000 et que le taux de placement des femmes par l’Agence nationale de l’emploi est passé de 7,64 pour cent en 2013 à 8,84 pour cent en 2014. Elle note également les informations fournies par le gouvernement sur les mesures prises par l’Agence nationale de soutien à l’emploi de jeunes et par la Caisse nationale d’assurance-chômage en vue de créer des opportunités d’emploi (emplois potentiels pour les femmes: 8 960 par l’Agence nationale et 6 332 par la Caisse nationale en 2014). Elle note aussi les mesures visant à promouvoir l’emploi salarié par le biais du dispositif d’aide à l’insertion professionnelle et à placer des travailleurs en contrat de travail aidé (60 432 femmes bénéficiaires de l’aide à l’insertion et 26 368 femmes bénéficiaires du placement en contrat aidé en 2014). La commission relève cependant que les taux de la population féminine active (18,1 pour cent) et de la population féminine occupée (16,8 pour cent) demeuraient faibles en 2014. Tout en saluant les actions visant à soutenir les activités indépendantes et l’emploi salarié des femmes, la commission constate les limites des résultats obtenus, bien que le niveau de qualification des femmes soit en constante progression, et demande à nouveau au gouvernement de prendre, pour accompagner ces mesures de politique de l’emploi, des mesures concrètes de sensibilisation visant à lutter activement contre les préjugés et les stéréotypes sexistes concernant les aspirations et capacités professionnelles des femmes et leur aptitude à occuper certains emplois. La commission demande également au gouvernement de prendre des mesures afin de mettre en place des dispositifs permettant aux travailleurs et aux travailleuses de mieux concilier travail et responsabilités familiales. La commission demande au gouvernement de fournir des informations sur toute évaluation de la Stratégie nationale pour l’intégration et la promotion de la femme (2008-2014) et de son Plan d’action national (2010-2014) et sur les activités de la commission de suivi ainsi que des informations sur toute mesure prise en application de la Charte des femmes travailleuses, y compris le système de quotas applicable aux postes à responsabilités.
Article 5. Mesures spéciales de protection. Travaux interdits aux femmes. La commission note que le projet d’article 583 de l’avant-projet de loi portant Code du travail ouvre la possibilité d’exclure les femmes de certains travaux par voie réglementaire dans un souci de protection de leur santé. La commission attire toutefois l’attention du gouvernement sur la distinction à effectuer entre les mesures spéciales destinées à protéger la maternité, visées à l’article 5 de la convention, et les mesures fondées sur des perceptions stéréotypées relatives aux capacités et au rôle des femmes dans la société, qui sont contraires au principe de l’égalité de chances et de traitement. Les dispositions relatives à la santé et à la sécurité des travailleurs devraient prévoir un environnement sûr et salubre, tant pour les travailleurs que pour les travailleuses, tout en tenant compte des différences entre hommes et femmes qui font que chacun d’eux est exposé à des risques spécifiques en matière de santé. De plus, l’objectif étant d’abroger les mesures de protection discriminatoires applicables à l’emploi des femmes, il y aurait sans doute lieu d’examiner quelles autres mesures – meilleure protection de la santé des hommes et des femmes, sécurité et transports adéquats, ou services sociaux – seraient nécessaires pour permettre aux femmes d’avoir les mêmes chances que les hommes d’accéder à ce type d’emplois (voir étude d’ensemble de 2012 sur les conventions fondamentales, paragr. 838 à 840). Par conséquent, la commission demande à nouveau au gouvernement de veiller à ce que, dans le futur Code du travail, les mesures spéciales de protection des femmes soient limitées à ce qui est strictement nécessaire pour protéger la maternité et ne fassent pas obstacle à l’accès des femmes à l’emploi et aux différentes professions. Elle l’invite également à examiner la possibilité de prendre des mesures d’accompagnement visant, entre autres, à améliorer la protection de la santé des hommes et des femmes et la sécurité et à renforcer l’offre de transports adéquats ou de services sociaux, pour permettre aux femmes d’accéder à tout type d’emploi sur un pied d’égalité avec les hommes. La commission demande au gouvernement de fournir des informations sur toutes dispositions adoptées à cet égard.
La commission soulève d’autres questions dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.
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