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La commission prend note des observations à caractère général formulées par l’Organisation internationale des employeurs (OIE), reçues le 1er septembre 2016. Elle prend note également des observations de la Confédération syndicale internationale (CSI) reçues le 1er septembre 2016, dans lesquelles est dénoncé le fait qu’un grand nombre de dirigeants syndicaux et d’activistes ont été accusés de délits pénaux pour leurs activités syndicales depuis 2014, et qu’il y a eu une augmentation du nombre des injonctions et des ordres de réquisition contre les syndicats et les travailleurs, lors de conflits du travail, en vue de restreindre les activités des syndicats et les actions revendicatives. Il est allégué qu’au moins 114 injonctions et ordres de réquisition ont été émis depuis 2014, en particulier dans l’industrie de l’habillement et le secteur du tourisme. La CSI proteste également contre le recours persistant à la violence par la police contre des travailleurs lors d’actions de protestation. La commission note avec préoccupation la gravité de ces allégations et prie le gouvernement de communiquer ses commentaires sur les observations soumises par la CSI, et en particulier des détails sur les cas spécifiques mentionnés.
La commission prend note des commentaires du gouvernement en réponse aux précédentes allégations de la CSI, de l’Internationale de l’éducation (IE) et de l’Association nationale des enseignants pour le développement (NEAD), faisant état de violences à l’encontre de syndicalistes, de poursuites judiciaires pour harcèlement à l’encontre de dirigeants syndicaux et d’activistes, de blocage de l’enregistrement de nouveaux syndicats indépendants et d’intimidations contre les enseignants adhérant à des syndicats (en particulier les intimidations de la police pendant le Congrès national de la NEAD en septembre 2014). La commission observe que, bien qu’il continue de réfuter l’allégation de blocage de l’enregistrement de nouveaux syndicats, le gouvernement indique que la plupart des cas présentés précédemment ont été résolus au moyen des procédures légales en vigueur et que les autorités compétentes travaillent actuellement en étroite collaboration avec toutes les parties concernées pour assurer le plein respect de la législation nationale et de la convention.

Suivi de la discussion de la Commission de l’application des normes (Conférence internationale du Travail, 105e session, mai-juin 2016)

La commission prend note de la discussion qui a eu lieu en juin 2016 au sein de la Commission de la Conférence sur l’application des normes concernant l’application de la convention par le Cambodge. La commission note que, dans ses conclusions, la Commission de la Conférence a prié le gouvernement: i) de veiller à ce que la liberté syndicale puisse être exercée dans un climat exempt d’intimidation et sans violence contre les travailleurs, les syndicats ou les employeurs, et d’agir en conséquence; ii) de s’assurer que la loi sur les syndicats est pleinement conforme aux dispositions de la convention et d’engager le dialogue social avec l’assistance technique du BIT; iii) de s’assurer que les enseignants et les fonctionnaires sont protégés en droit et dans la pratique, conformément à la convention; iv) de diligenter des enquêtes exhaustives et rapides concernant les meurtres et les violences à l’égard des dirigeants syndicaux, et traduire en justice les auteurs et les instigateurs de ces crimes; v) de s’assurer que la Commission interministérielle spéciale tient les organisations d’employeurs et de travailleurs informées de manière régulière sur les progrès de ses enquêtes. La commission note également que la Commission de la Conférence a invité le gouvernement à accepter une mission de contacts directs avant la prochaine session de la Conférence internationale du Travail pour évaluer les progrès réalisés. La commission accueille favorablement l’acceptation par le gouvernement de la mission de contacts directs et veut croire que la mission aura lieu dans un proche avenir.

Droits syndicaux et libertés publiques

Assassinats de syndicalistes. S’agissant de la recommandation qu’elle fait depuis longtemps de procéder à des enquêtes complètes et indépendantes sur les meurtres des dirigeants syndicaux M. Chea Vichea, M. Ros Sovannareth et M. Hy Vuthy, la commission avait précédemment pris note de l’indication du gouvernement selon laquelle une Commission interministérielle spéciale avait été créée en août 2015 afin de mener rapidement des enquêtes approfondies sur ces procédures pénales. La commission note, d’après le rapport du gouvernement, que la Commission interministérielle spéciale a tenu sa première réunion le 9 août 2016 et a adopté des mesures au sujet de son propre fonctionnement, comprenant l’utilisation des moyens de communication électroniques pour rendre compte des progrès réalisés par chaque membre de la commission, ainsi que la tenue de réunions trimestrielles pour dresser le bilan des progrès réalisés sur chaque affaire. S’agissant de sa précédente recommandation visant à assurer que la Commission interministérielle spéciale informe de manière régulière les organisations d’employeurs et de travailleurs sur les progrès de ces enquêtes, la commission note, d’après les conclusions du Comité de la liberté syndicale concernant le cas no 2318 (voir 380e rapport, novembre 2016), qu’un groupe de travail tripartite rattaché au secrétariat de la commission a également été créé pour permettre aux organisations d’employeurs et de travailleurs de fournir des informations sur les enquêtes, et d’indiquer leur réaction aux conclusions de la commission. Tout en prenant bonne note des mesures exposées, la commission se voit contrainte d’exprimer sa préoccupation quant à l’absence de résultats concrets concernant les enquêtes demandées, en dépit de tout le temps qui s’est écoulé depuis la création de la commission interministérielle. Rappelant la nécessité de conclure les enquêtes et de traduire en justice les auteurs et les instigateurs de ces crimes, afin de mettre un terme à la situation d’impunité qui prévaut dans le pays en ce qui concerne les actes de violence à l’encontre de syndicalistes, la commission prie instamment les autorités compétentes de prendre toutes les mesures nécessaires pour mener promptement à bien la procédure d’enquête et prie fermement le gouvernement de tenir les partenaires sociaux dûment informés des progrès réalisés et de rendre compte à la mission de contacts directs des progrès concrets accomplis à cet égard.
Incidents durant une manifestation en janvier 2014. Dans sa précédente observation, la commission avait prié le gouvernement de fournir des informations sur toutes conclusions et recommandations formulées par les trois commissions établies suite aux incidents survenus lors des manifestations et des grèves des 2 et 3 janvier 2014, qui ont entraîné des violences graves et des attaques, des décès et l’arrestation de travailleurs, et sur les allégations de vices de procédure dans le déroulement des procès qui s’en sont suivis. Dans son rapport, le gouvernement réitère que les mouvements de grève ont donné lieu à des violences et que les forces de sécurité ont dû intervenir pour protéger les biens privés et publics et restaurer le calme. Le gouvernement indique également que les trois commissions ont été transformées et se sont vu attribuer des rôles et responsabilités plus spécifiques: i) la commission sur l’évaluation des dégâts a conclu que le montant total des dommages n’était pas inférieur à 75 millions de dollars des Etats-Unis, y compris les dommages aux biens publics et privés à Phnom Penh et dans certaines autres provinces; ii) la commission chargée d’enquêter sur la violence sur la route Veng Sreng a conclu que l’incident était une émeute qui avait éclaté à l’instigation de certains politiciens qui se sont servis des normes des salaires minima comme moyens de propagande, et qu’elle ne relevait pas de la définition d’une grève au sens des normes internationales du travail, puisque les manifestants avaient bloqué les voies publiques à minuit, avaient acclamé le jet de bouteilles d’essence enflammées contre les autorités et avaient détruit des biens privés et publics; iii) la commission d’étude sur les salaires minima des travailleurs des secteurs de l’habillement et de la chaussure était devenue l’actuel Comité consultatif du travail, qui est tripartite et rend des avis sur la promotion des conditions de travail, y compris la fixation du salaire minimum. La commission note cependant que la CSI affirme que les commissions créées pour enquêter sur les incidents ne sont pas crédibles, qu’il reste nécessaire de procéder à une enquête indépendante sur ces événements et que les personnes responsables des actes de violence – qui ont provoqué le décès de cinq manifestants et l’arrestation injustifiée de 23 travailleurs – doivent être tenues responsables. Prenant note des avis divergents exprimés par le gouvernement et la CSI sur la gestion de ces incidents, la commission se doit d’exprimer sa profonde préoccupation devant les actes de violence qui ont conduit à des décès, des blessures et l’arrestation de manifestants, après ce qui était à l’origine une manifestation relative à un conflit du travail, et devant l’absence d’informations du gouvernement à cet égard. La commission, rappelant que l’intervention de la police devrait être proportionnée à la menace pour l’ordre public et que les autorités compétentes devraient recevoir des instructions adéquates de façon à éviter le danger d’un usage disproportionné de la force lorsqu’elles tentent de contrôler les manifestations susceptibles de porter atteinte à l’ordre public, prie instamment le gouvernement de fournir des informations spécifiques et les conclusions des commissions en ce qui concerne les circonstances ayant conduit à des décès, des blessures et des allégations d’arrestations injustifiées de manifestants, et sur toute mesure prise en application des conclusions des trois commissions susmentionnées.

Questions législatives

Loi sur les syndicats (LTU). Dans sa précédente observation, la commission, tout en observant que le gouvernement avait révisé à nouveau le projet de loi avant de le soumettre au Conseil des ministres, a voulu croire que le projet de loi sur les syndicats serait adopté dans un très proche avenir et qu’il serait pleinement conforme aux dispositions de la convention. La commission prend note de l’indication du gouvernement selon laquelle la LTU a été promulguée le 17 mai 2016 et selon laquelle, durant la période de préparation du projet, de 2008 à 2016, une série de consultations bipartites, tripartites, multilatérales et publiques avaient été tenues, et les commentaires techniques du BIT avaient été intégrés dans le projet final. Le gouvernement fait cependant remarquer que, en dépit des efforts déployés, la loi ne donne pas entière satisfaction aux partenaires sociaux: i) les employeurs ne sont pas satisfaits du seuil minimum avant qu’un syndicat puisse être créé; ii) les travailleurs ne sont pas satisfaits de la portée de la loi, qui exclut les fonctionnaires. La commission prend note également des préoccupations de la CSI quant à un certain nombre de dispositions de la loi sur les syndicats. La commission prie le gouvernement de fournir ses commentaires sur les questions soulevées par la CSI.
Article 2 de la convention. Droits des travailleurs et des employeurs, sans distinction d’aucune sorte, de constituer des organisations de leur choix et de s’affilier à ces organisations. Article 3 de la LTU: champ d’application de la loi. Notant qu’en vertu de cet article la loi s’applique à toutes les personnes qui relèvent des dispositions de la législation du travail, la commission prie le gouvernement d’indiquer comment les magistrats et les travailleurs domestiques, qui sont exclus du champ d’application de la loi sur le travail en vertu de son article 1, peuvent pleinement bénéficier des droits qui leur sont conférés par la convention. De plus, la commission prie le gouvernement d’indiquer si les travailleurs de l’économie informelle relèvent du champ d’application de la LTU ou comment il est assuré qu’ils bénéficient des droits syndicaux que leur confère la convention.
La commission rappelle que le droit de constituer des organisations syndicales et de s’y affilier devrait être garanti à tous les agents de la fonction publique, qu’ils s’occupent de l’administration de l’Etat à l’échelon central, régional ou local, qu’ils soient des agents d’organismes assurant d’importants services publics ou qu’ils travaillent dans des entreprises à caractère économique appartenant à l’Etat (voir étude d’ensemble de 2012 sur les conventions fondamentales, paragr. 64). La commission prend note de l’indication du gouvernement selon laquelle les fonctionnaires nommés à un poste permanent dans la fonction publique jouissent de la liberté d’association au titre de l’article 36 du statut commun aux fonctionnaires et que les enseignants, en particulier, bénéficient de ce droit en application de l’article 37 de la loi sur l’enseignement. La commission croit comprendre que ces dispositions se réfèrent au droit d’association conféré au titre de la loi sur les associations et les organisations non gouvernementales. Après un examen de cette loi, la commission considère que certaines dispositions ne sont pas conformes à la liberté d’association des fonctionnaires telle que la prévoit la convention, en ce qu’elle subordonne l’enregistrement de leur syndicat à l’autorisation du ministère de l’Intérieur, ce qui est contraire au droit de constitution d’organisations sans autorisation préalable, tel que consacré à l’article 1 de la convention. De plus, cette loi ne comprend pas de disposition reconnaissant aux syndicats de fonctionnaires le droit d’élaborer leurs statuts et règlements administratifs, d’élire librement leurs représentants, d’organiser leurs activités et de formuler leur programme d’action, sans ingérence des pouvoirs publics, ou leur droit de s’affilier à des fédérations ou confédérations, y compris au niveau international. La commission se voit par conséquent, une fois de plus, obligée de prier instamment le gouvernement de prendre des mesures appropriées, en consultation avec les partenaires sociaux, pour faire en sorte que les fonctionnaires, y compris les enseignants qui ne sont pas couverts par la LTU, puissent pleinement bénéficier de leur liberté d’association telle que conférée par la convention et que la législation soit modifiée en conséquence.
La commission formule d’autres commentaires sur la LTU dans une demande directe et elle veut croire que le gouvernement y répondra, au moyen de consultations constructives avec les partenaires sociaux et en tenant compte de leurs observations, pour placer la loi en conformité avec les dispositions de la convention. A cet égard, la commission rappelle que le gouvernement a la possibilité de continuer de bénéficier de l’assistance technique du Bureau. Elle prie en outre le gouvernement de rendre compte de l’application de la LTU.

Application de la convention dans la pratique

Indépendance du pouvoir judiciaire. Dans sa précédente observation, la commission avait prié le gouvernement d’indiquer tout progrès accompli dans la rédaction des directives sur le fonctionnement du tribunal du travail et de la Chambre du travail et de fournir des informations sur les progrès réalisés dans le cadre de leur création et de leur fonctionnement. Dans sa réponse, le gouvernement indique que la loi sur le fonctionnement du tribunal du travail est encore en cours de rédaction, avec l’assistance technique et l’appui financier du Bureau. Le gouvernement a bénéficié de l’expérience d’autres pays tels que Singapour, le Japon et l’Australie et il devrait consulter les partenaires sociaux sur le projet de loi à la fin de l’année, afin de tenir compte de ce qui est nécessaire pour la mise en place d’un système de règlement des conflits du travail, rapide, libre et juste. La commission veut croire que le gouvernement prendra toutes les mesures nécessaires pour procéder rapidement à l’adoption de la loi sur le fonctionnement du tribunal du travail, en pleine consultation avec les partenaires sociaux, afin d’assurer l’efficacité du système judiciaire comme sauvegarde contre l’impunité, et comme un moyen effectif de protéger les droits des travailleurs lors de conflits du travail.
La commission soulève d’autres questions dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.
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