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La commission prend note des observations de la Confédération syndicale internationale (CSI) reçues les 1er septembre 2014 et 2015, des observations du Congrès des syndicats du Zimbabwe (ZCTU) reçues le 31 août 2015 ainsi que de la réponse du gouvernement aux observations de la ZCTU. La commission prend note également des observations de caractère général de l’Organisation internationale des employeurs (OIE) reçues le 1er septembre 2015.

Suivi des recommandations de la commission d’enquête (plainte présentée en vertu de l’article 26 de la Constitution de l’OIT)

La commission rappelle que la commission d’enquête formée au titre de l’article 26 de la Constitution de l’OIT afin d’examiner le respect par le gouvernement de la convention et de la convention (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949, a recommandé que: les textes législatifs pertinents soient mis en conformité avec la convention et la convention no 98; toutes les pratiques antisyndicales – arrestations, détentions, violence, torture, intimidation et harcèlement, actes d’ingérence et de discrimination antisyndicales – cessent immédiatement; les institutions nationales poursuivent le processus enclenché par la commission d’enquête, processus par lequel les personnes peuvent se faire entendre, se référant en particulier à la Commission des droits de l’homme et à l’Organe pour l’apaisement et la réconciliation (ONHR); une formation sur la liberté syndicale et la négociation collective, les libertés publiques et les droits de la personne soit dispensée au personnel clé dans le pays; l’Etat de droit et le rôle des tribunaux soient renforcés; le dialogue social soit renforcé, sachant son importance dans le maintien de la démocratie; et que l’assistance technique du BIT continue.
La commission prend note également du rapport de la mission technique de haut niveau du Bureau qui a eu lieu en février 2014 pour donner suite aux conclusions sur l’application de la convention par le Zimbabwe de la Commission de l’application des normes de la Conférence de 2013.
Droits syndicaux et libertés publiques. La commission rappelle qu’elle avait demandé précédemment au gouvernement de continuer à fournir des informations sur les mesures prises pour que la Commission des droits de l’homme du Zimbabwe et l’ONHR contribuent de manière adéquate à la défense des droits syndicaux et de l’homme. La commission note que, selon l’indication du gouvernement, la Commission des droits de l’homme du Zimbabwe est désormais pleinement établie et opérationnelle au regard des dispositions de l’article 242 de la Constitution. La commission prie le gouvernement de fournir des informations détaillées sur les activités de la Commission des droits de l’homme du Zimbabwe ayant trait aux droits syndicaux.
En ce qui concerne la demande faite au gouvernement d’indiquer toutes les mesures prises pour garantir la sécurité de Mme Hambira, secrétaire général du Syndicat général de l’agriculture et des travailleurs des plantations du Zimbabwe (GAPWUZ), qui aurait été contrainte de s’exiler, parce qu’elle avait été menacée pour avoir dénoncé des violations des droits des travailleurs agricoles, dans le cas où elle déciderait de retourner dans le pays. La commission note que le gouvernement renouvelle ses assurances en ce qui concerne la sécurité de Mme Hambira, à la satisfaction du ZCTU. La commission note aussi que les dernières observations de la CSI et du ZCTU ne contiennent pas de nouvelles allégations concernant la situation de Mme Hambira.
Dans ses commentaires précédents, la commission avait pris note avec préoccupation des allégations présentées par la CSI concernant des incidents liés à l’obstruction d’activités syndicales par la police. Tout en prenant note des réponses du gouvernement qui souligne que le ZCTU a pu mener librement ses activités en 2014 et 2015, la commission note avec préoccupation que la CSI et le ZCTU font à nouveau état de graves perturbations des activités syndicales par le gouvernement, par le biais de la police de la République du Zimbabwe. Les organisations syndicales font mention en particulier des points suivants: i) l’interdiction de trois manifestations régionales du ZCTU le 11 avril 2015; ii) l’interdiction d’une manifestation organisée le 8 août 2015 pour protester contre le licenciement de 20 000 travailleurs à la suite d’une décision de la Cour suprême; iii) l’intervention de la police dans la manifestation susmentionnée qui a abouti à l’arrestation de sept personnes dont le président du ZCTU, M. George Nkiwane, et le secrétaire général, M. Japhet Moyo, qui ont été relâchés le même jour en dehors du centre-ville; iv) la présence de véhicules de police devant les bureaux du ZCTU du 8 au 13 août 2015, empêchant les membres du syndicat d’accéder au bâtiment; et v) une nouvelle interdiction par la police le 22 août 2015 d’une nouvelle manifestation contre les licenciements massifs précédemment mentionnés, qui a conduit à saisir la Haute Cour, laquelle a ordonné à la police de ne pas interférer dans la manifestation. A cet égard, la commission note que le gouvernement indique que: i) le ZCTU a pu réaliser tel que prévu ses manifestations le 11 avril 2015, la police ayant retiré son refus initial concernant les manifestations dans deux provinces; ii) les propositions de manifestations des 8 et 22 août 2015 coïncidaient avec des événements d’une très grande portée au niveau national et il s’avérait donc très difficile pour la police d’apporter le soutien nécessaire au ZCTU; et iii) à l’avenir, il serait plus pratique que le ZCTU, dans le respect du droit des organisations syndicales d’organiser leurs activités avec une liberté raisonnable, puisse se mettre d’accord avec la police sur les dates possibles d’actions de protestations.
La commission rappelle également qu’elle avait demandé précédemment au gouvernement de redoubler d’efforts afin d’assurer que la loi sur la sécurité et l’ordre public (POSA) ne soit pas utilisée d’une manière qui porte atteinte aux droits syndicaux légitimes, y compris le droit des organisations syndicales d’exprimer leurs vues sur la politique économique et sociale du gouvernement. La commission avait accueilli favorablement la préparation d’un projet de manuel sur la liberté syndicale et les libertés syndicales et du rôle de la police et des forces de sécurité, ainsi que d’un projet de code de conduite pour les acteurs étatiques du monde du travail. La commission avait demandé à être tenue informée de la validation et de l’adoption de ces deux instruments. La commission prend note de l’indication du gouvernement selon laquelle le projet de manuel devrait être finalisé et adopté à la prochaine session de formation de formateurs organisée à l’intention des agents de police sur les normes internationales du travail. Etant donné les allégations persistantes selon lesquelles la police a perturbé des activités syndicales et rappelant que le droit de tenir des réunions publiques et des manifestations, qui constitue un important droit syndical garanti par la convention, ne peut être arbitrairement refusé, la commission prie instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que soient prochainement adoptés et appliqués le manuel et le code de conduite susmentionnés, et de veiller à ce que les forces de police et de sécurité suivent des principes clairs de conduite en ce qui concerne les droits de l’homme et les droits syndicaux. La commission prie le gouvernement de fournir des informations à cet égard.
En ce qui concerne la recommandation de la commission d’enquête pour que les autorités prennent des mesures afin que soient abandonnées toutes les poursuites en cours contre des syndicalistes appréhendés en application de la POSA, la commission note que, selon le gouvernement, deux cas n’ont pas encore été tranchés, parce que, malgré les suggestions du gouvernement, le ZCTU n’a pas retiré les recours constitutionnels qu’elle a soumis conformément à la Constitution. La commission veut croire qu’il n’y a pas d’autre procès en cours à l’encontre des syndicalistes et prie le gouvernement de fournir des informations sur l’issue des procédures judiciaires.
Réforme du droit du travail et processus d’harmonisation. Faisant suite aux recommandations de la commission d’enquête, la commission avait demandé au gouvernement de fournir des informations sur les progrès réalisés dans la mise en conformité de la législation sur le travail et sur la fonction publique avec la nouvelle Constitution et avec la convention. A ce sujet, la commission prend note des informations suivantes du gouvernement: i) la loi no 5 du travail (amendement) a été adoptée en août 2015; ii) cette loi porte abrogation de l’article 55(e) et (f) qui imposait des restrictions à l’administration interne des syndicats; iii) le principal objectif de la loi était essentiellement de traiter des questions urgentes à la suite d’une décision de la Cour suprême qui autorisait la cessation de la relation de travail après un préavis; iv) le gouvernement et les partenaires sociaux continuent par conséquent, au sein du Forum tripartite de négociation, d’œuvrer à la finalisation du processus d’harmonisation de la législation du travail; et v) en ce qui concerne les amendements à la loi sur la fonction publique, le procureur général élabore actuellement le projet de loi. La commission prend note également des allégations suivantes de la CSI et du ZCTU: i) la loi sur le travail (amendement) ne respecte pas les 13 principes dont avaient convenu les partenaires tripartites en 2014 afin de guider le processus d’harmonisation de la législation du travail; ii) ne tenant pas compte des recommandations de la commission d’enquête, le gouvernement n’a pas harmonisé les articles 51, 55, 104, 106, 107, 109, 110, 112 et 127 de la loi sur le travail avec la Constitution et avec la convention; iii) plusieurs dispositions de la loi sur le travail (amendement) portent atteinte aux droits consacrés dans la convention; et iv) les autres instruments législatifs, y compris la loi sur la fonction publique et la loi sur la sécurité et l’ordre public (POSA) n’ont pas encore été rendus conformes à la Constitution et à la convention, alors que le Forum national tripartite avait convenu d’accélérer le processus d’harmonisation législative. Tout en notant la réponse du gouvernement aux observations du ZCTU, la commission, rappelant les recommandations de la commission d’enquête, prie le gouvernement de prendre, en consultation avec les partenaires sociaux, les mesures nécessaires pour rendre la législation sur le travail et la fonction publique conforme à la nouvelle Constitution et à la convention. La commission espère qu’elle sera en mesure dans un proche avenir de noter des progrès à cet égard.
Article 2 de la convention. Droit des travailleurs, sans distinction d’aucune sorte, de constituer des organisations de leur choix et de s’affilier à ces organisations. Dans ses commentaires précédents, la commission avait demandé au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour faire en sorte que les agents des services pénitentiaires et correctionnels jouissent du droit syndical inscrit dans la convention. La commission prend note des indications suivantes du gouvernement: i) les services pénitentiaires et correctionnels sont des services de sécurité tels que définis par la nouvelle Constitution du Zimbabwe; ii) l’article 65 de la Constitution dispose expressément que les membres des services de sécurité n’ont pas le droit de s’organiser; et iii) c’est donc le peuple du Zimbabwe qui n’a pas voulu accorder au personnel des services pénitentiaires et correctionnels le droit d’organisation. A ce sujet, la commission souligne que, conformément à l’article 2 de la convention, les travailleurs et les employeurs, sans distinction d’aucune sorte, ont le droit de constituer des organisations de leur choix et celui de s’affilier à ces organisations. Les seules exceptions à ce principe que permet la convention sont énumérées à l’article 9, paragraphe 1, en vertu duquel les Etats peuvent déterminer la mesure dans laquelle les garanties prévues par la convention s’appliqueront aux forces armées et à la police. Rappelant que les services pénitentiaires et correctionnels ne constituent pas une exception au regard de l’article 9, paragraphe 1, de la convention, la commission prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que les agents des services susmentionnés jouissent du droit d’organisation. Prière également de fournir des informations à ce sujet.
Difficultés pour enregistrer de nouveaux syndicats. La commission note que la CSI et le ZCTU affirment que, malgré les droits garantis par la nouvelle Constitution, l’enregistrement de syndicats reste à la discrétion du greffe. La commission prie le gouvernement de communiquer ses commentaires en réponse à ces allégations.
Article 3. Droit des organisations de travailleurs et d’employeurs d’organiser leur gestion. Adoption de la loi no 5 de 2015 sur le travail (amendement). La commission accueille favorablement l’abrogation en vertu de la loi no 5 de 2015 sur le travail (amendement) de l’article 55(e) et (f) de la loi sur le travail qui imposait des restrictions aux salaires qui peuvent être versés aux salariés de syndicats et aux biens que les syndicats peuvent acquérir. Cependant, la commission rappelle que les dispositions de l’article 55, lues conjointement avec les articles 28(2), 54(2) et (3), confèrent au ministre des pouvoirs étendus pour réglementer les cotisations syndicales. Ces dispositions devraient aussi être modifiées pour garantir le respect de la liberté des organisations d’employeurs et de travailleurs d’organiser leur gestion. La commission prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier les dispositions susmentionnées et de fournir des informations sur tout progrès accompli dans ce sens. En outre, la commission note que la CSI et le ZCTU dénoncent ce qui suit: i) le nouvel article 63(A) de la loi sur le travail introduit par la loi d’amendement porte atteinte à l’article 3 de la convention étant donné qu’il donne des pouvoirs étendus au greffe et au ministre du Travail pour enquêter et prendre la direction d’un conseil de l’emploi (organe bipartite) s’ils estiment que le conseil est mal géré; et ii) le nouvel article 120 de la loi sur le travail élargit les pouvoirs du ministère du Travail, lequel peut diligenter des enquêtes sur des organisations syndicales et nommer un administrateur provisoire pour gérer les affaires du syndicat. En ce qui concerne l’amendement de l’article 63(A) de la loi sur le travail, la commission note que le gouvernement indique que les larges responsabilités attribuées aux conseils de l’emploi, qui adoptent des conventions collectives qui couvrent des secteurs économiques entiers, requièrent que ces organes soient placés sous la supervision du gouvernement central. En ce qui concerne les pouvoirs d’enquête accordés au ministère du Travail en vertu du nouvel article 63(A) (qui s’applique aux conseils de l’emploi de nature bipartite) et de l’article 120(2) de la même loi (qui s’applique aux organisations de travailleurs et d’employeurs), la commission rappelle ce qui suit: i) elle a souligné dans ses commentaires précédents que le pouvoir discrétionnaire des autorités de procéder à des inspections et de demander des informations à tout moment entraîne un risque d’ingérence dans l’administration interne des syndicats; et ii) sur cette base, la commission d’enquête et la commission avaient demandé au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier l’article 120(2) de la loi sur le travail. Notant que le nouvel article 63(A) accorde des pouvoirs analogues aux autorités en ce qui concerne les conseils de l’emploi bipartites, la commission prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier les articles 63(A) et 120(2) de la loi sur le travail afin que l’autonomie des organisations d’employeurs et de travailleurs soit pleinement respectée.
En outre, la commission note que le nouvel article 63(A) de la loi sur le travail (applicable aux conseils de l’emploi) et l’article 120 tel que révisé de la loi sur le travail (applicable aux organisations d’employeurs et de travailleurs) disposent que, «dans l’attente d’une décision du tribunal du travail au sujet d’une demande visant à nommer un administrateur, le ministre peut nommer un administrateur provisoire qui exercera tous les pouvoirs d’un administrateur en tant que tel jusqu’à ce que le tribunal du travail confirme la nomination de l’administrateur provisoire». Rappelant que, en vertu de l’article 3 de la convention, les autorités publiques doivent s’abstenir de toute ingérence de nature à limiter le droit des organisateurs de travailleurs et d’employeurs à organiser leur gestion, la commission souligne qu’un contrôle exercé de l’extérieur des organisations de travailleurs et d’employeurs ne devrait intervenir que dans des cas exceptionnels, suite à une décision de justice, et devrait être exercé par une personne nommée par les autorités judiciaires. La commission prie donc le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier en conséquence les articles 63(A) et 120 de la loi sur le travail et d’indiquer tout fait nouveau à cet égard.
Activités de formation liées à la convention. Rappelant l’importance qu’a accordée la commission d’enquête à la primauté de l’Etat de droit et au renforcement de l’indépendance de la justice dans le pays, la commission note le séminaire sur les normes internationales du travail que le BIT et le tribunal du travail ont organisé conjointement en septembre 2015.
[Le gouvernement est prié de répondre en détail aux présents commentaires en 2016.]
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