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La commission prend note des observations de la Confédération syndicale internationale (CSI) reçues le 1er septembre 2014. Elle prend note également des observations de l’Organisation internationale des employeurs (OIE) reçues le 1er septembre 2014.

Suivi donné aux conclusions de la Commission de l’application des normes (Conférence internationale du Travail, 102e session, juin 2013)

La commission rappelle qu’une plainte alléguant l’inexécution de la convention par les Fidji avait été déposée en vertu de l’article 26 de la Constitution de l’OIT par un certain nombre de délégués travailleurs à la session de 2013 de la Conférence internationale du Travail, que cette plainte avait été déclarée recevable et qu’elle est toujours devant le Conseil d’administration. La commission prend note du rapport d’une mission de contacts directs effectuée aux Fidji du 6 au 11 octobre 2014, qui a été soumis au Conseil d’administration au titre de l’examen de la plainte déposée en vertu de l’article 26. Elle prend note avec intérêt des conclusions suivantes du rapport de mission: «les récentes élections et l’installation d’une nouvelle assemblée parlementaire ont fait apparaître des conditions propices à une évolution positive de la situation, permettant d’envisager des avancées concrètes et tangibles en réponse aux demandes des organes de contrôle de l’OIT. La mission s’est particulièrement réjouie du dialogue franc et ouvert qu’elle a pu engager avec toutes les parties concernées et de leur réelle volonté de faire progresser le pays sur la base du respect mutuel.» La commission prend note du protocole d’accord sur l’avenir des relations du travail aux Fidji, signé par les partenaires sociaux, et elle veut croire que cet instrument constituera une base de progrès par rapport à tous les problèmes d’application de la convention qui sont posés.
Droits syndicaux et libertés publiques. La commission note avec intérêt que, d’après le rapport de mission, le nouveau commissaire de police a relancé l’enquête ouverte sur l’agression du dirigeant syndical, M. Félix Antony, dont il avait été question dans les commentaires précédents. La commission, comme l’a fait la mission, espère que M. Antony coopérera de toutes les manières qu’il pourra à cette enquête et elle prie le gouvernement de fournir des informations sur tout fait nouveau à cet égard.
La commission rappelle qu’elle avait également évoqué les affaires concernant M. Daniel Urai (président du Congrès des syndicats de Fidji (FTUC)) et M. Goundar, accusés d’avoir pris part à un rassemblement illégal et d’avoir ainsi enfreint les dispositions du Règlement d’urgence sur l’ordre public (PER). La commission note avec regret que, selon le rapport de la mission, la procédure engagée contre M. Daniel Urai reste maintenue. La commission veut croire que toutes les charges retenues contre l’intéressé au motif de l’exercice d’une activité syndicale seront abandonnées sans délai supplémentaire et elle exprime l’espoir que cette affaire sera déclarée close dans un très proche avenir. La commission prie le gouvernement d’indiquer si des charges sont encore retenues à l’encontre de M. Goundar.
Questions d’ordre législatif. La commission rappelle qu’elle avait demandé dans ses précédents commentaires que le gouvernement modifie les dispositions suivantes du décret no 35 de 2011 sur les industries nationales essentielles (ENID) de manière à les rendre conformes à la convention: l’article 6 (annulation de l’enregistrement de tous les syndicats existants dans les industries nationales essentielles); l’article 7 (obligation pour tous les dirigeants syndicaux d’être des salariés de l’entreprise considérée); les articles 10 à 12 (obligation pour les syndicats de solliciter auprès du Premier ministre l’autorisation de se porter candidat en tant que représentant d’une unité de négociation; détermination par le Premier ministre de la composition et du domaine de compétence de l’unité de négociation à des fins d’élections; organisation et supervision des élections par le greffier des syndicats); l’article 14 (obligation, pour un syndicat, de représenter au moins 50 pour cent des travailleurs de l’unité de négociation considérée pour pouvoir être enregistré); l’article 26 (impossibilité de porter les litiges relatifs à des droits devant les instances judiciaires; arbitrage obligatoire du gouvernement dès lors que l’enjeu d’un conflit franchit un certain seuil économique); l’article 27 (restrictions considérables affectant le droit de grève).
La commission note que le gouvernement se déclare persuadé que la mission de contacts directs offrira un terrain favorable à la résolution des problèmes qui se posent à propos de l’ENID et qu’elle permettra au gouvernement nouvellement élu de débattre et trancher ces problèmes devant le nouveau Parlement, guidé en cela par les recommandations du Comité de la liberté syndicale et de la commission d’experts.
La commission observe avec préoccupation que les industries couvertes par l’ENID sont maintenant plus nombreuses. L’ENID est désormais applicable à l’égard d’un certain nombre de banques privées, de la Direction des contributions directes et des douanes des Fidji, de l’Industrie des télécommunications des Fidji, de la Compagnie aérienne des Fidji, de la Direction de l’électricité et de l’eau des Fidji, des industries du pin et de l’acajou, des services de lutte contre l’incendie et des collectivités locales. La commission note en outre que, selon le rapport de mission:
La mission a entendu de nombreux témoignages reflétant une profonde préoccupation quant aux répercussions de l’ENID sur le mouvement syndical dans le pays et sur la possibilité pour les travailleurs d’exercer leurs droits syndicaux. De fait, au-delà des modifications législatives particulières déjà demandées par les organes de contrôle, les informations recueillies par la mission auprès de tous les intéressés, y compris les entreprises visées par le décret et leurs unités de négociation respectives, lui ont permis de comprendre que le décret entrave le fonctionnement normal des syndicats. [...] L’annulation de l’enregistrement de syndicats et l’abrogation de conventions collectives ont été suivies non pas de l’apparition de syndicats d’entreprise, mais plutôt de la création d’unités de négociation dans lesquelles les représentants des salariés doivent créer de nouvelles structures juridiques pour pouvoir collecter les cotisations. Même si les représentants des salariés peuvent consulter des syndicats extérieurs à l’entreprise, ils restent isolés pour négocier avec les représentants de la direction qui, eux, font appel à des avocats beaucoup mieux formés à ce type d’exercice, entraînant ainsi un sérieux déséquilibre entre les parties, sans parler des représailles auxquelles les représentants des salariés à la négociation sont exposés puisqu’ils ont à craindre pour leur emploi. Compte tenu des témoignages établissant que les procédures judiciaires dirigées contre des entreprises auxquelles l’ENID est devenu applicable ont été annulées sur la base des dispositions dudit décret excluant toute procédure de cette nature, la mission considère que de telles craintes sont parfaitement fondées.
La commission note que, selon le rapport de mission, tous les représentants d’une unité de négociation et syndicats concernés ont exprimé leur souhait de voir rétablir la Promulgation sur les relations d’emploi (ERP) et que les employeurs considèrent eux aussi que ladite promulgation constituerait le cadre le plus propice à des relations socioprofessionnelles constructives, même si d’autres amendements à cet instrument seraient appropriés. La commission prie donc instamment le gouvernement d’examiner sérieusement la possibilité d’abroger totalement l’ENID, selon les orientations soutenues par les partenaires sociaux la dernière fois que cette question a été analysée par le sous-comité du Conseil consultatif tripartite des relations d’emploi (ERAB), et de fournir des informations sur tout fait nouveau à cet égard.
S’agissant de l’ERP de 2007, la commission rappelle à nouveau sa requête d’amender les dispositions suivantes de l’instrument afin de le rendre conforme à la convention: l’article 3(2) (interdiction faite aux gardiens de prison de se syndiquer); l’article 125(1)(a) (pouvoir excessif et discrétionnaire conféré au greffier des syndicats de déterminer si un syndicat satisfait aux conditions d’enregistrement établies par l’ERP); l’article 119(2) (impossibilité faite aux travailleurs exerçant plus d’une activité professionnelle de s’affilier à plus d’un syndicat); l’article 127 (obligation faite aux dirigeants syndicaux d’être des salariés de la branche d’activité du secteur ou de la profession correspondante depuis au moins six mois et interdiction faite aux étrangers de siéger dans les instances dirigeantes d’un syndicat); l’article 184 (intervention du gouvernement dans les règlements intérieurs des syndicats); l’article 128 (pouvoirs excessifs conférés au greffier des syndicats d’inspecter à tout moment la comptabilité de ces organisations); les articles 169, 170, 175(3)(b), 180, 181(c) et 191(1)(c) (restrictions excessives affectant l’activité syndicale); et les articles 250 et 256(a) (peines d’emprisonnement prévues à l’encontre des organisateurs d’une grève illégale).
La commission prend note de la synthèse présentée par le gouvernement de la révision de l’ERP par le sous-comité de l’ERAB, qui avait mené à bien ses travaux à la fin de l’année 2013, formulant des propositions d’amendements pour 412 dispositions, dont 98 pour cent avaient été convenus par consensus majoritaire. Le gouvernement indique en outre que le sous-comité a proposé à l’unanimité l’élaboration, la mise au point et la mise en application d’un nouveau règlement pour le Tribunal des relations d’emploi (ERT) de manière à favoriser une évolution des mentalités au sein de cette institution dans un sens conforme à la politique de l’ERP; et que le projet de ce règlement était achevé en février 2014. Le texte final du projet révisé d’ERP a été transmis à l’Office du Sollicitor général le 21 mars 2014. Après examen par cette instance, il sera soumis au Cabinet.
La commission prend note de ces informations avec intérêt et elle exprime le ferme espoir que le projet révisé d’ERP sera soumis au Parlement dans un proche avenir et qu’il s’avérera pleinement conforme à la convention. Elle prie le gouvernement de fournir des informations sur tout progrès réalisé à cet égard.
S’agissant des décrets applicables au secteur public qui suppriment pour les travailleurs de ce secteur toute voie de recours devant les juridictions judiciaires ou administratives et restreignent les droits qui leur sont reconnus par la convention, la commission note que le gouvernement se déclare persuadé que la mission de contacts directs constituera un point de départ favorable à la résolution des problèmes qui se posent à propos de l’ENID et qu’elle permettra au gouvernement nouvellement élu de débattre et trancher ces problèmes devant le nouveau Parlement, guidé en cela par les recommandations du Comité de la liberté syndicale et de la commission d’experts. La commission demande à nouveau que le gouvernement prenne toutes les dispositions nécessaires pour assurer que les fonctionnaires disposent de voies de recours judiciaires véritables et efficaces contre toute décision ou mesure de l’administration affectant leurs conditions d’emploi, notamment l’exercice des droits qui leur sont reconnus par la convention. Elle le prie de communiquer des statistiques et toutes informations pertinentes sur les mécanismes existants de règlement des conflits collectifs. De plus, la commission prie le gouvernement de signaler tout progrès de la révision des décrets relatifs à la fonction publique dans un sens propre à rendre ces décrets conformes aux conventions fondamentales de l’OIT, ou toute mesure qui concernerait leur modification ou leur abrogation.
Enfin, la commission note que, d’après son rapport, la mission de contacts directs a appris la publication d’un nouveau décret électoral (no 11 de 2014) dont l’article 154 prévoit que l’office électoral sera responsable de l’organisation de toutes les élections de tous les syndicats enregistrés. Prenant note des préoccupations exprimées par les organisations d’employeurs et de travailleurs à cet égard, la commission rappelle que l’article 3 de la convention dispose que ces organisations doivent pouvoir élire librement leurs représentants, loin de toute intervention des autorités publiques, et elle exprime le ferme espoir que toute supervision d’élections au sein d’organisations d’employeurs ou de travailleurs sera assurée par une instance indépendante, d’une manière qui ne portera pas atteinte à ce droit. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur tout fait nouveau à cet égard.

Questions soulevées par la CSI

La commission rappelle avoir pris note avec inquiétude dans ses précédents commentaires d’allégations de la CSI concernant: i) les dérogations particulièrement étendues que la nouvelle Constitution prévoit (art. 19 et 20) par rapport aux droits relatifs à la liberté syndicale, dérogations dont l’application porterait atteinte à des principes fondamentaux et entérinerait l’existence de décrets particulièrement préjudiciables; ii) l’interdiction faite par le décret sur les partis politiques aux personnes ayant une fonction au sein d’organisations d’employeurs ou de travailleurs d’appartenir à un parti politique ou d’exercer une activité politique, y compris d’exprimer un simple soutien politique; et iii) les menaces et les intimidations proférées par l’armée et par la direction de l’entreprise publique, Société sucrière de Fidji (FSC), à l’égard des membres du Syndicat des travailleurs de l’industrie sucrière de Fidji (FSGWU) avant, pendant et après la tenue d’un vote sur la grève en juillet 2013. La commission observe que le gouvernement n’a donné aucune précision à propos de ces questions, si ce n’est que de réitérer que les dérogations autorisées par l’article 19 de la Constitution des Fidji permettent d’imposer des limitations au droit fondamental de la liberté syndicale «aux fins de la régulation de services essentiels ou d’industries essentielles, dans l’intérêt supérieur de l’économie fidjienne et des citoyens des Fidji». La commission note à cet égard que l’article 19(2) de la Constitution permet d’imposer des limitations aux fins de la régulation de processus syndicaux ou concernant la négociation collective. Considérant que de telles limitations peuvent être interprétées dans un sens autorisant des restrictions particulièrement étendues de ce droit fondamental, la commission prie le gouvernement de fournir des informations sur toute décision d’une juridiction compétente interprétant lesdites dispositions, et elle veut croire que, comme souligné dans le rapport de la mission de contacts directs, lorsqu’ils interpréteront les dispositions de la Constitution, les tribunaux s’appuieront sur le droit international comme cela est prévu à l’article 7(1)(b) de cette dernière. De même, la commission prie à nouveau le gouvernement de communiquer ses commentaires sur les questions soulevées à propos du décret sur les partis politiques et des menaces dirigées contre les membres du FSGWU.
[Le gouvernement est prié de répondre en détail aux présents commentaires en 2015.]
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