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Abolition of Forced Labour Convention, 1957 (No. 105) - Uzbekistan (RATIFICATION: 1997)

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La commission note le rapport du gouvernement reçu le 1er septembre 2014. Elle prend note également des observations de la Confédération syndicale internationale (CSI) et de l’Organisation internationale des employeurs (OIE) reçues respectivement le 31 août et le 1er septembre 2014, ainsi que de la réponse du gouvernement à ces deux communications, reçue le 29 octobre 2014. La commission prend note en outre des observations du Conseil de la Fédération des syndicats de l’Ouzbékistan (CFTUU), reçues le 24 octobre 2014. Ces observations ont été transmises au gouvernement pour commentaires.
Article 1 b) de la convention. Mobilisation et utilisation de main-d’œuvre à des fins de développement économique dans l’agriculture (production de coton). La commission a précédemment noté les allégations formulées par l’OIE et la CSI concernant le recours persistant au travail forcé d’adultes favorisé par l’Etat à des fins de développement économique dans la production de coton. Elle a également noté que le gouvernement rejetait ces allégations, en affirmant que les travailleurs appelés à participer à des travaux agricoles sont engagés sur la base de contrats d’emploi individuels et perçoivent, pour le travail qu’ils effectuent, une rémunération qui vient s’ajouter au salaire de leur travail habituel. La commission a également pris note des informations figurant dans le rapport de novembre 2013 de la mission de haut niveau sur le contrôle du travail des enfants pendant la récolte de coton de 2013. Il était souligné dans ce rapport que, étant donné que le contrôle effectué se limitait aux situations relevant de la convention (no 182) sur les pires formes de travail des enfants, 1999, les résultats obtenus ne pouvaient pas permettre d’établir s’il y avait ou non des pratiques de travail forcé impliquant des adultes. Le rapport souligne néanmoins que les équipes de contrôle avaient été en mesure de prendre note d’autres éléments relevant du mandat de l’OIT, comme ceux concernant le recrutement de main-d’œuvre pour la récolte de coton, les conséquences de la mécanisation sur le marché du travail et la mise en œuvre des droits fondamentaux des travailleurs, y compris le respect et l’application pratique de la présente convention. Compte tenu de ce contexte, la commission a prié instamment le gouvernement de poursuivre sa coopération avec l’OIT et les partenaires sociaux, dans le cadre d’un programme par pays afin d’assurer la pleine application de la convention et l’élimination totale du recours au travail forcé dans la production de coton.
A cet égard, la commission salue l’élaboration et l’adoption, en avril 2014, d’un programme par pays de promotion du travail décent (PPTD). Le PPTD identifie les priorités, objectifs, résultats et indicateurs de performance concrets pour la coopération entre le Bureau, les partenaires sociaux et le gouvernement durant la période 2014-2016. La commission prend note en particulier des mesures proposées dans le contexte de ce programme en vue de s’assurer que les conditions de travail et d’emploi dans l’agriculture, y compris dans la production de coton, sont conformes aux normes fondamentales. A cette fin, la composante du PPTD relative à l’application de la convention no 105 établit quatre indicateurs de performance, à savoir:
  • -une enquête sur les conditions de travail dans l’agriculture, y compris dans l’industrie de la culture du coton, qui contient des recommandations visant à améliorer le recrutement de la main-d’œuvre et les pratiques destinées à la retenir;
  • -la législation et la pratique nationales sont révisées et font l’objet d’un suivi;
  • -un certain nombre d’inspecteurs du travail bénéficient de connaissances et de capacités accrues pour identifier les pratiques de travail forcé;
  • -un certain nombre de tables rondes sont organisées sur le travail forcé, à l’intention aussi bien du monde des affaires que des représentants des gouvernements et administrations locaux, des établissements d’enseignement, des syndicats et des médias.
La commission note également qu’une table ronde a été organisée à Tashkent les 6 et 7 août 2014 pour préparer et élaborer des mesures pratiques en vue de mettre en œuvre les différentes composantes adoptées pour le PPTD, en particulier en ce qui concerne l’assistance du BIT pour le contrôle du travail des enfants durant la récolte de coton de 2014 et la préparation de l’enquête, qui doit être menée dans un proche avenir, sur les pratiques de recrutement et les conditions de travail dans l’agriculture et la culture du coton. La commission salue ces développements démontrant que le gouvernement est prêt à collaborer avec le BIT et les partenaires sociaux.
La commission note que, dans ses observations reçues en août 2014, la CSI déclare que, en dépit d’un certain nombre de mesures prises par le gouvernement, telles que l’adoption du PPTD, le recours systématique à une main-d’œuvre forcée dans la production du coton continue d’affecter des exploitants agricoles; des travailleurs des secteurs public et privé, y compris des enseignants, des médecins et des infirmières; des chômeurs; et des bénéficiaires de l’aide sociale publique. Selon la CSI, les causes profondes du travail forcé dans l’industrie du coton se trouvent dans le système de contrôle intégral que le gouvernement exerce sur ce secteur, qui a un impact négatif sur les exploitants agricoles et sur la main-d’œuvre mobilisée par l’Etat. La CSI allègue en outre que, au cours de la récolte de 2013, le gouvernement a de nouveau assigné des quotas de production de coton qui, au niveau local, ont été imposés aux personnes concernées en fonction du volume de coton se trouvant dans les champs. Les travailleurs et les exploitants agricoles qui ne réussissaient pas à atteindre les quotas assignés ont été menacés d’être licenciés de leur emploi habituel, de perdre leurs terres et de faire l’objet d’enquêtes exceptionnelles. Par exemple, selon la CSI, les administrations hospitalières ont donné pour instruction aux médecins, aux infirmières et aux autres membres de leur personnel de récolter le coton ou de contribuer pour environ la moitié de leur salaire à la récolte de coton, sous peine de licenciement. Les habitants des différentes communautés ont été contraints de récolter du coton sous la menace d’une restriction de leur accès à l’électricité et aux prestations sociales.
Dans ses observations transmises en septembre 2014, l’OIE souligne que, en acceptant l’assistance technique du Bureau en 2013 et en adoptant le PPTD en 2014, le gouvernement et les partenaires sociaux de l’Ouzbékistan ont prouvé leur engagement à renforcer leur coopération avec l’OIT et les autres organisations compétentes aux fins de l’adoption de mesures en faveur d’une pleine application des conventions. A cet égard, l’OIE déclare qu’elle attend du gouvernement et des partenaires sociaux qu’ils continuent de coopérer avec l’OIT pour éliminer le travail forcé. L’OIE salue également la préparation d’une enquête sur les conditions de travail dans l’agriculture, et elle souligne que l’imposition de travail forcé va au-delà de l’emploi obligatoire de fonctionnaires et de travailleurs du secteur privé durant la récolte de coton puisqu’elle comprend également l’obligation pour les exploitants agricoles de suivre des directives en matière de gestion des terres, de technologies agricoles et de systèmes d’exploitation. L’OIE exprime l’espoir que le gouvernement fournira aux partenaires sociaux internationaux et à l’OIT des informations sur les résultats de l’enquête susmentionnée, y compris des statistiques sur le nombre d’adultes travaillant dans l’agriculture, le montant des salaires, les cas dans lesquels des pratiques de travail forcé auraient été identifiées et les sanctions appliquées en la matière.
La commission note en outre que, dans ses observations soumises en septembre 2014, le CFTUU fournit des informations sur un certain nombre de mesures prises par le gouvernement, en coopération avec les partenaires sociaux, dans le but d’appliquer efficacement les conventions de l’OIT en ce qui concerne le travail forcé et le travail des enfants, y compris au moyen du dialogue social, de campagnes de sensibilisation, de mise en place de services téléphoniques spéciaux et d’une coopération technique avec le Bureau. Le CFTUU fournit également des informations sur les mesures prises par les syndicats qui, jusqu’à la récolte de coton de 2014, ont montré la voie à suivre pour améliorer les conditions de travail et de vie des travailleurs employés à cette récolte et s’assurer qu’aucun enfant de moins de 18 ans ne soit engagé dans ce travail. A cet égard, le CFTUU indique que les syndicats ont organisé des ateliers, dans toutes les provinces et tous les districts, pour informer les fonctionnaires, les responsables gouvernementaux, le Conseil des exploitants agricoles, les établissements d’enseignement, les établissements financiers et les associations publiques des exigences des conventions de l’OIT sur le travail forcé et le travail des enfants, et des questions relatives au paiement des salaires et à l’accès à l’alimentation, aux services médicaux et aux activités de loisirs pour les récolteurs de coton.
La commission note que le gouvernement déclare, en se référant également à la définition du travail forcé figurant à l’article 2 de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930, que le recrutement de travailleurs sur une base volontaire pour participer à la récolte du coton ne saurait être considéré comme du travail forcé puisque les travailleurs sont libres de mettre fin à leur emploi à n’importe quel moment, puisse une situation de coercition se produire. De plus, dans sa réponse aux observations de l’OIE du 29 octobre 2014, le gouvernement réitère qu’à son avis les personnes participant à la récolte du coton sont habituellement motivées par la possibilité de compléter leur revenu. Le gouvernement fournit également des informations sur le nombre de mesures prises pour renforcer la coopération avec les partenaires sociaux dans le pays, y compris en ce qui concerne l’application des conventions de l’OIT sur le travail forcé et le travail des enfants. Ces mesures comprennent par exemple l’organisation de séminaires sur l’application des normes internationales du travail, la diffusion d’informations sur les activités menées en vue de résoudre le problème du travail forcé et du travail des enfants, et les campagnes de sensibilisation du grand public, des exploitants agricoles et du monde des affaires à ces questions.
La commission note en outre que le gouvernement indique, dans sa réponse aux observations de la CSI, qu’il a émis une instruction officielle, à l’intention de l’ensemble des organisations concernées, sur l’interdiction de la mobilisation forcée de travailleurs sans leur accord volontaire en vue de leur participation à la récolte du coton. Selon le gouvernement, les violations de cette instruction sont passibles de graves sanctions. Le gouvernement indique également que des mesures sont en train d’être prises pour institutionnaliser le recrutement volontaire des récolteurs de coton par l’intermédiaire des institutions du marché du travail. S’agissant des allégations répétées présentées par la CSI, selon lesquelles des employés du secteur public sont tenus de signer de nouveaux contrats contenant une clause conditionnelle sur leur participation volontaire aux travaux agricoles et d’élevage, le gouvernement nie l’existence d’une ordonnance ou d’un règlement prévoyant une telle condition. Il précise que la législation du travail en vigueur autorise le transfert temporaire d’un travailleur à d’autres activités, sans l’accord de la personne concernée.
Tout en notant les considérations ci-dessus, la commission observe que, aux fins des conventions nos 29 et 105, le terme «travail forcé ou obligatoire» désigne «tout travail ou service exigé d’un individu sous la menace d’une peine quelconque et pour lequel ledit individu ne s’est pas offert de plein gré». Dans ce contexte, le fait de «s’offrir de plein gré» se réfère au consentement libre et éclairé des travailleurs pour s’engager dans une relation d’emploi, ainsi qu’à leur liberté de quitter leur emploi à n’importe quel moment, sans crainte de représailles ou de la perte d’un quelconque privilège. A cet égard, la commission rappelle, se référant également au paragraphe 271 de son étude d’ensemble de 2012 sur les conventions fondamentales, que, même dans les cas où l’emploi est à l’origine le résultat d’un accord conclu librement, le droit des travailleurs au libre choix de leur travail, sans faire l’objet de la menace d’une peine quelconque, reste inaliénable. En conséquence, même si les transferts temporaires d’emploi peuvent être inhérents à certaines professions et activités, la commission considère que l’application dans la pratique de dispositions, ordonnances ou règlements autorisant le transfert systématique de travailleurs pour exercer des activités qui ne sont pas liées à leur profession habituelle (par exemple le transfert d’un professionnel des soins de santé à un emploi agricole) devrait être examinée avec soin pour s’assurer que cette pratique n’ait pas pour effet de transformer une relation contractuelle fondée sur la volonté des parties en un service imposé par la loi. La commission souligne également que, bien que certaines formes de travail ou de service obligatoire (comme le travail faisant partie des obligations civiques normales des citoyens ou les menus travaux de village) soient explicitement exclues du champ d’application des conventions sur le travail forcé, ces exceptions sont limitées à des travaux ou services mineurs exercés dans l’intérêt direct de la population et n’incluent pas un travail dont l’objet est de bénéficier à un groupe plus large ou un travail à des fins de développement économique, ce qui est explicitement interdit par la présente convention.
A la lumière de ces considérations, et pour permettre à la commission de s’assurer que le recrutement et l’engagement de personnes dans la récolte du coton s’effectuent de manière compatible avec la convention, la commission encourage fermement le gouvernement à poursuivre la coopération avec l’OIT et les partenaires sociaux afin que l’enquête sur les pratiques de recrutement et les conditions de travail dans l’agriculture, et en particulier dans la production de coton, soit effectivement menée et que ses résultats soient ensuite diffusés. S’agissant de la référence du gouvernement à une instruction officielle sur l’interdiction de la mobilisation forcée de travailleurs pour la récolte du coton, la commission prie le gouvernement d’indiquer comment cette instruction est appliquée, si des infractions ont été constatées et, dans l’affirmative, de fournir des informations sur les sanctions imposées. La commission prie de nouveau instamment le gouvernement de poursuivre ses efforts pour garantir l’élimination totale du recours au travail obligatoire de travailleurs des secteurs public et privé, ainsi que d’étudiants, pour la récolte du coton, et elle le prie de fournir des informations sur les mesures prises à cette fin et sur les résultats concrets obtenus.
La commission soulève d’autres questions dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.
[Le gouvernement est prié de répondre en détail aux présents commentaires en 2015.]
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