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Labour Inspection Convention, 1947 (No. 81) - France (RATIFICATION: 1950)

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La commission prend note de la réponse du gouvernement à ses précédents commentaires. Elle note avec intérêt que, suite à ses demandes réitérées, le gouvernement envisage de prendre des mesures visant à ce que des informations distinctes relatives aux activités d’inspection et à leurs résultats soient fournies dans ses prochains rapports ainsi que dans le rapport annuel pour ce qui concerne la Guadeloupe, la Guyane française, la Martinique, la Réunion, ainsi que Saint-Pierre-et-Miquelon, désormais assimilés à la France métropolitaine au sens de la Constitution de l’OIT, en vertu de l’enregistrement d’une déclaration pertinente datée du 31 août 2009.

Se référant à son observation de 2004, la commission note en outre avec satisfaction la publication, après validation par le Conseil national de l’inspection du travail, d’un ouvrage collectif «Principes de déontologie pour l’inspection du travail» en février 2010, dont les travaux préparatoires avaient été lancés en 2004 sous la direction de la Mission centrale d’appui et de coordination des services extérieurs du travail et de l’emploi (MICAPCOR) et s’étaient poursuivis avec l’appui technique du BIT. Le groupe de travail qui a élaboré cet outil était composé principalement de membres de divers niveaux de l’inspection du travail, mais également d’autres structures du ministère chargé du travail. Le BIT et le Centre national de recherche scientifique (CNRS) y étaient également représentés. La commission note avec intérêt l’affirmation dans la préface de l’ouvrage, par le ministre du Travail, des Relations sociales, de la Famille, de la Solidarité et de la Ville, que «la déontologie renforce la cohérence de l’action des agents à tous les niveaux de la hiérarchie» … «comme elle protège les administrés eux-mêmes des risques d’arbitrage». La commission relève également que, selon le ministre, «le principe d’indépendance de l’inspection du travail n’apparaît pas seulement comme un droit des agents concernés mais bien comme une garantie pour les citoyens de pouvoir bénéficier d’un service public organisé qui n’est soumis à aucune influence extérieure indue».

La commission prend également note du commentaire du Syndicat national unitaire – Travail Emploi Formation – Insertion (SNU-TEF (FSU)) reçu au BIT le 6 juillet 2010 au sujet de l’implication des inspecteurs du travail dans des opérations conjointes de lutte contre le travail illégal en vertu de la «circulaire interministérielle du 2 juin 2010 no NOR-IMIM1000102NC de lutte contre le travail illégal intéressant des ressortissants étrangers – mise en œuvre d’opérations conjointes en 2010». Cette circulaire prévoit le renforcement des mesures de collaboration interinstitutionnelle en matière de lutte contre le travail illégal, qui font l’objet des commentaires antérieurs de la commission. Le gouvernement a communiqué au BIT des informations sur les points soulevés par le SNU-TEF (FSU) en date du 15 novembre 2010.

La commission prend note par ailleurs de la communication en date du 29 juin 2010 de l’intersyndicale CGT-SUD-UNSA exprimant une préoccupation au sujet des effets de l’installation des bureaux de l’inspection du travail dans les locaux de la chambre des métiers de Porto Vecchio (Corse), au regard du principe d’indépendance qui devrait caractériser l’exercice des fonctions d’inspection et à celui de l’accessibilité de ses locaux qui devrait être garanti à l’égard des salariés. La commission note les réponses du gouvernement aux points soulevés.

Articles 3, paragraphes 1 et 2, 5 a), 6, 12, 15 c) et 17 de la convention. Fonctions additionnelles confiées aux inspecteurs du travail. Mobilisation des ressources et incompatibilité au regard des méthodes de contrôle et des objectifs poursuivis. Selon le gouvernement, dans ses réponses aux précédents commentaires de la commission au sujet de l’implication des inspecteurs du travail dans des opérations conjointes, dans les lieux de travail, avec des agents chargés de l’exécution de la politique de lutte contre l’immigration clandestine, l’analyse des allégations du SNU-TEF (FSU) était fondée sur un amalgame d’articles de presse, de communications de syndicats et de la législation applicable en la matière. La commission rappelle qu’elle avait procédé à une analyse minutieuse de la législation, qu’elle en avait conclu que les opérations conjointes de lutte contre les travailleurs étrangers en situation irrégulière au regard du droit de séjour sont menées en contradiction avec les dispositions de la convention, et avait souligné la nécessité de prendre des mesures pour rectifier la situation de manière à permettre aux inspecteurs du travail d’accomplir leurs missions telles que définies par la convention. La commission constate que le gouvernement a, au contraire, pris la circulaire du 2 juin 2010.

La commission note que les circulaires du 20 décembre 2006 et du 7 juillet 2007 mettent l’accent sur la préservation et la valorisation des identités professionnelles pour la détermination du rôle de chaque administration participant aux opérations conjointes de lutte contre le travail illégal. Cela implique que les inspecteurs du travail restent chargés de veiller à l’application des dispositions légales relatives aux conditions de travail et à la protection des travailleurs, à savoir les articles L.341-6-1, L.8258-1 et L.8252-2 du Code du travail, qui assimilent un travailleur étranger employé illégalement à un travailleur régulièrement engagé en ce qui concerne les obligations de l’employeur relatives à la réglementation du travail (salaires, accessoires, indemnités de rupture). Les circonstances et les résultats des opérations conjointes démontrent que, à l’inverse, la coopération des inspecteurs du travail aboutit très précisément dans de nombreux cas à l’exposition de travailleurs à une procédure d’éloignement hors des frontières de la France qui leur confisque de facto tout droit de recours à l’encontre de l’employeur en infraction d’emploi illégal. Ceci est attesté par les circulaires no NOR-IMIM0800047C du 24 décembre 2008 et du 2 juin 2010 au sujet des résultats des opérations conjointes menées en 2007 (sur 992 personnes en situation irrégulière, 295 ont fait l’objet d’expulsion) et en 2009 (sur 1 116 travailleurs interpellés, 680 ont fait l’objet d’arrêtés préfectoraux d’éloignement et 159 travailleurs ont été effectivement expulsés). La commission note les termes de la circulaire du 24 décembre 2008 en vertu desquels, avant même de procéder aux opérations conjointes, «il importe que toutes dispositions soient prises à chacun des niveaux impliqués (service de sécurité intérieure, bureaux des étrangers des préfectures) pour faire en sorte que les interpellations des étrangers en situation irrégulière aboutissent à des éloignements effectifs». La commission regrette que la circulaire du 2 juin 2010 reproduise à l’identique ces termes qui risquent de remettre en question la «préservation et la valorisation de l’identité professionnelle des inspecteurs du travail». La circulaire insiste également sur les dispositions d’ordre logistique à prendre en amont, telles que préréservation de places en centre de rétention administrative si l’opération peut aboutir à de nombreuses interpellations simultanées. La commission note que, si cette circulaire prescrit des mesures assurant une procédure accélérée de poursuite à l’encontre des employeurs en infraction, elle ne contient aucune référence aux dispositions des articles L.8258-1 et L.8252-2 précités du Code du travail garantissant les droits des travailleurs étrangers en situation irrégulière, victimes de l’infraction d’emploi illégal. La commission rappelle que, en vertu de la convention et de la législation nationale, les inspecteurs du travail ont le devoir d’user de leurs pouvoirs d’injonction pour obtenir des employeurs l’exécution de leurs obligations à l’égard des travailleurs. Elle note, par ailleurs, que les circulaires ne font pas référence aux droits des travailleurs visés par les opérations conjointes. Ceci peut avoir pour conséquence le déni du droit de ces travailleurs à un quelconque recours devant les juridictions sociales et ainsi une discrimination à leur encontre.

La commission note que, dans son rapport, le gouvernement mentionne, en relation avec cet aspect des circulaires incriminées, la directive no 2009/52/CE du Parlement européen et du Conseil européen du 18 juin 2009 qui prévoit que les Etats doivent mettre en place des procédures efficaces permettant au travailleur en situation irrégulière ayant fait l’objet d’un retour forcé d’introduire un recours pour faire valoir ses droits ou faire exécuter un jugement reconnaissant ses droits. Dans sa réponse au commentaire du SNU-TEF (FSU), le gouvernement précise que le projet de transposition de la directive européenne prévoit de confier à l’Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII) le recouvrement et l’acheminement des sommes dues, au titre de leur activité professionnelle, aux personnes étrangères ayant été employées illégalement. Ce texte n’étant pas adopté, la commission ne peut qu’espérer qu’il le sera bientôt pour renforcer une législation nationale déjà protectrice et non discriminatoire à l’égard des travailleurs étrangers visés (ceux du bâtiment et des travaux publics (BTP) et ceux qui sont occupés dans les hôtels, cafés et restaurants (HCR), dans l’agriculture et la confection).

Selon le gouvernement, la collaboration des inspecteurs du travail aux opérations conjointes s’inscrirait dans le cadre de la recherche de synergie entre corps de contrôle habilités à intervenir sur le même type d’infraction prévue par le Code du travail, et serait donc en pleine cohérence avec l’article 5 de la convention. Pour ce qui est de l’impact de cette activité au regard de leurs autres missions, le gouvernement affirme que le poids de la verbalisation relative à l’emploi d’étrangers sans titre de travail représente moins de 4 pour cent de la verbalisation totale. La commission note que le gouvernement ne fournit pas d’information sur le niveau des sanctions infligées aux employeurs, pour permettre à la commission d’en évaluer le caractère dissuasif. La commission se doit de rappeler au gouvernement que la coopération visée à l’article 5 a) de la convention a pour objectif le renforcement des moyens d’application des dispositions légales relatives aux conditions de travail et à la protection des travailleurs (articles 2 et 3, paragraphe 1) et que, en vertu de l’article 12, paragraphe 1 c) i), les inspecteurs du travail devraient être autorisés à procéder à leurs investigations seuls ou accompagnés (sous-entendu de personnes qu’ils auront librement désignées). La commission estime qu’ils ne sont pas en mesure d’exercer cette prérogative lors des opérations conjointes, et leur droit de libre entrée dans les établissements de travail (sans nécessité d’autorisation du juge ou d’un ordre du parquet) est utilisé à des fins contraires à leur fonction.

Selon la commission, l’association des forces de police à l’inspection du travail n’est pas favorable à la relation de confiance nécessaire à l’instauration du climat de confiance essentiel à la collaboration des employeurs et des travailleurs avec les inspecteurs du travail. Ces derniers doivent pouvoir être craints pour leur pouvoir de verbalisation mais également respectés et accessibles en tant qu’agents de prévention et conseillers.

La commission demande en conséquence à nouveau au gouvernement de fournir des informations lui permettant d’apprécier la manière dont il est assuré, conformément à l’article L.341-6-1 du Code du travail, que les travailleurs étrangers en situation irrégulière bénéficient de la même protection de l’inspection du travail que les autres travailleurs et de fournir, dans la mesure du possible, des statistiques pertinentes (nombre de plaintes soumises et de condamnations d’employeurs à régulariser leur situation au regard des droits des travailleurs, et état des procédures d’exécution de telles décisions).

La commission prie également à nouveau instamment le gouvernement de prendre des mesures visant à ce que les pouvoirs des inspecteurs d’entrer dans les établissements assujettis à leur contrôle ne soient pas détournés à l’effet de l’exécution d’opérations conjointes de lutte contre l’immigration illégale.

La commission demande au gouvernement de veiller à ce que les cas des immigrants en situation irrégulière appréhendés hors d’un lieu de travail mais qui sont engagés dans une relation de travail couverte par la convention soient notifiés aux inspecteurs du travail.

La commission note la création le 1er décembre 2008 en Guyane française du Service de lutte contre le travail illégal (SLTI) en Guyane française. Elle note avec préoccupation que, en dépit du petit nombre d’agents d’inspection (4,5 pour l’ensemble du département), deux d’entre eux (un inspecteur et un contrôleur du travail) ainsi qu’une secrétaire administrative sont affectés à plein temps à la mise en œuvre de la politique locale de lutte contre le travail illégal élaborée par le Comité restreint de lutte contre le travail illégal (CORELTI), et assurent le secrétariat de ce dernier dont la composition représente les autorités de police, de gendarmerie, des douanes et des services fiscaux.

Bien que le gouvernement affirme que, dans le cadre de la lutte contre le travail illégal, le SLTI est appelé à se concentrer sur les missions d’inspection définies dans le Code du travail, les chiffres qu’il fournit ne sont pas suffisants pour établir la part des contrôles (547 visites) concourant à l’application des dispositions légales relatives aux conditions de travail et à la protection des travailleurs. En effet, l’indication de 28 décisions d’arrêt de chantier, de 295 courriers d’observation et de 36 procès-verbaux ne permet pas de distinguer les actions liées aux constats d’infraction d’emploi illégal de celles liées aux constats d’infraction aux dispositions couvertes par la convention. La commission prie donc le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que l’ensemble du personnel d’inspection du travail de la Guyane française puisse accomplir ses missions en vue de l’application des dispositions légales relatives aux conditions de travail et à la protection des travailleurs dans l’exercice de leur profession. Elle lui saurait gré de fournir à l’appui d’informations pertinentes des statistiques détaillées sur les activités d’inspection du travail sur le territoire du département.

Article 10. Effectif et composition du personnel d’inspection du travail au regard des missions liées au développement et à la complexité de la législation. La commission note avec intérêt que, entre 2006 et 2009, 452 inspecteurs élèves ont été promus et 923 contrôleurs stagiaires formés. Elle note également que, sur les 60 postes d’inspecteurs et 100 postes de contrôleurs créés en 2009, la plupart sont des postes de contrôle.

Articles 5 a) et 7, paragraphe 3. Coopération effective entre les services d’inspection et d’autres services gouvernementaux et des institutions publiques ou privées et formation des agents d’inspection dans le domaine de la prévention des risques professionnels. La commission se réfère à ses commentaires antérieurs concernant la Réunion dans lesquels elle priait le gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises ou envisagées pour réduire la fréquence des accidents du travail et des maladies professionnelles, en particulier dans les activités répertoriées comme présentant un haut potentiel de risques. A cet égard, la commission note que dix agents d’inspection ont bénéficié d’une formation sur les risques chimiques en septembre 2007 et que, en vertu d’une convention de partenariat signée en 2005, la Direction du travail, de l’emploi et de la formation professionnelle (DTEFP) de la Réunion fait partie d’un réseau d’acteurs de la prévention (comprenant notamment l’Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail (ANACT), la Caisse générale de la sécurité sociale, les services de santé au travail). En outre, elle note avec intérêt que l’amélioration de la santé et de la sécurité au travail, notamment dans le secteur du bâtiment et des travaux publics et en matière de risques chimiques, était un des objectifs prioritaires fixés à l’inspection du travail pour l’année 2008, et qu’un plan régional de santé au travail est en cours d’élaboration depuis octobre 2007.

La commission prie le gouvernement de continuer à fournir des informations sur les progrès réalisés grâce à la coopération qui s’est instaurée entre les acteurs de la prévention des risques professionnels susvisés et les sections d’inspection du travail à la Réunion. Le gouvernement est en particulier prié de fournir des informations sur la formation dont les agents d’inspection ont pu bénéficier dans le domaine de la sécurité et de la santé au travail, sur l’état d’avancement du projet de plan régional de santé au travail et les missions et les activités des agents d’inspection réalisées dans ce cadre, ainsi que sur leur impact sur la fréquence des accidents du travail et des maladies professionnelles.

Articles 6, 11 et 15 c). Indépendance des inspecteurs du travail, accessibilité des locaux à tous intéressés. En ce qui concerne la préoccupation exprimée par l’intersyndicale CGT-SUD-UNSA suite à l’installation des bureaux de l’inspection du travail dans les locaux de la chambre des métiers de Porto-Vecchio (Corse), la commission note que, selon l’organisation, la conception des locaux est telle que les travailleurs, par peur d’être vus de leurs employeurs, pourraient renoncer à se rendre à l’inspection du travail. Le gouvernement indique pour sa part que la création de la section d’inspection du travail de Porto-Vecchio est récente et que ce n’est qu’à défaut d’autres possibilités qu’elle a été installée dans les locaux de la chambre des métiers, dont il précise qu’elle est un établissement public. Le gouvernement ajoute que les questions posées au sujet de cette installation font l’objet d’investigations approfondies par la Direction générale du travail, aux termes desquelles une décision sera prise. La commission saurait gré au gouvernement de fournir des informations sur les résultats des investigations auxquelles il se réfère et de prendre, en tout état de cause, les mesures nécessaires pour garantir l’indépendance des inspecteurs du travail à l’égard de toute influence extérieure indue ainsi que le libre accès des travailleurs à la section de Porto-Vecchio.

La commission soulève d’autres points dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.

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