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Le Pérou est lié par les obligations découlant de la convention (no 102) concernant la sécurité sociale (norme minimum), 1952, en ce qui concerne cinq des neuf branches de la sécurité sociale (les soins médicaux, les indemnités de maladie, les prestations de vieillesse, de maternité et d’invalidité), ainsi que par un certain nombre d’autres conventions de sécurité sociale (nos 12, 19, 24, 25, 35 à 40 et 44). Etant donné que les problèmes d’application relevés par la commission dans ses nombreux commentaires sont essentiellement les mêmes pour toutes ces conventions, la commission a jugé opportun de formuler un commentaire général pour l’ensemble des conventions de sécurité sociale ratifiées par le Pérou. Pour ce faire, la commission a eu recours à des études réalisées en 2009 par le BIT relatives au régime de sécurité sociale péruvien ainsi que par le Fonds monétaire international (FMI) en ce qui concerne les effets de la crise financière sur les systèmes d’assurance-pension.

1.        Non-respect des principes de base posés par les conventions internationales de sécurité sociale

Depuis de nombreuses années, la commission met en évidence le fait que les différentes composantes du système de sécurité sociale du Pérou ne donnent pas effet à certains principes communs aux conventions internationales de sécurité sociale ratifiées par le pays, à savoir: i) le financement collectif des prestations; ii) la gestion démocratique et transparente des institutions de sécurité sociale; iii) le service des prestations tout au long de l’éventualité; et iv) la garantie d’un taux minimal des prestations.

Le principe du financement collectif de la sécurité sociale posé par les instruments de l’OIT stipule que le coût des prestations et les frais d’administration de ces prestations doivent être financés collectivement par voie de cotisations et d’impôts (article 71, paragraphe 1, de la convention) et que le total des cotisations à la charge des salariés protégés ne doit pas dépasser 50 pour cent du total des ressources affectées à la protection des employés (article 71, paragraphe 2). Or, tant dans le système privé que dans le système public de pensions du Pérou, hormis le cas des contributions volontaires que la loi autorise les employeurs à effectuer de manière facultative, les assurés contribuent seuls aux comptes individuels de capitalisation et au financement des primes de l’assurance-invalidité et survivants. Les contributions et les frais d’administration sont ainsi placés à la charge exclusive des travailleurs affiliés aux administrateurs privés de fonds de pension (AFP) et à l’Office de normalisation en matière de prévoyance (ONP) contrairement au principe du financement collectif des prestations établi par les conventions de l’OIT. La commission souligne que, en ne respectant pas les principes de solidarité et financement collectif, le régime de comptes individuels de capitalisation n’est pas conforme à l’article 72, paragraphe 2, de la convention.

La convention no 102 requiert également que, lorsque l’administration ne serait pas assurée par une institution réglementée par les autorités publiques ou par un département gouvernemental responsable devant le parlement, les représentants des personnes protégées doivent participer à l’administration ou y être associés avec pouvoir consultatif (article 72, paragraphe 1, de la convention). Cette participation doit être effective et permettre à ces derniers d’influer sur les choix effectués en matière d’investissements et de gestion des organismes concernés. Dans ses derniers rapports, le gouvernement convient qu’en l’état actuel du droit national il n’existe pas de possibilité de participation des affiliés à la gestion des AFP. Il indique néanmoins qu’une discussion sur cette question a eu lieu au sein du Congrès sans toutefois parvenir à une conclusion. Le gouvernement entend examiner la possibilité de créer un Conseil de surveillance, auquel des représentants des assurés seraient amenés à participer et qui serait habilité à recueillir des informations auprès des AFP sur l’administration des fonds de pensions. En ce qui concerne la protection de la santé, tout en reconnaissant que la participation des assurés à l’administration des établissements prestataires de santé (EPS) n’est pas prévue par la loi, le gouvernement indique qu’un organisme public – la Superintendencia de Entidades Prestadoras de Salud (SEPS) – exerce un contrôle tant sur les activités économiques et financières des EPS que sur le versement des prestations.

La commission note cette reconnaissance progressive par le gouvernement de la nécessité de renforcer le contrôle et la surveillance des activités des entités privées de sécurité sociale. Elle prie le gouvernement de fournir dans son prochain rapport des informations relatives aux progrès réalisés en vue d’encadrer les activités des opérateurs privés par des organismes de contrôle et de surveillance au sein desquels participeraient les représentants des assurés. Dans la même logique, compte tenu des faibles taux d’affiliation à la sécurité sociale, la commission prie le gouvernement d’assurer la participation de représentants des assurés aux travaux de l’organisme national chargé du recouvrement de l’impôt et des cotisations sociales – la Superintendencia Nacional des Administracion Tributaria (SUNAT) – et à faire rapport à cet égard.

Les prestations vieillesse gérées dans le cadre du système de gestion privé sont calculées sur la base du capital dont chaque assuré dispose dans son compte individuel de capitalisation (CIC). Lorsque le capital accumulé sur ce compte vient à être épuisé, le droit à pension peut disparaître et l’assuré qui dépasserait l’espérance de vie moyenne risquerait de se trouver dépourvu de son unique source de revenu. Un tel résultat est contraire au principe des conventions internationales selon lequel les prestations doivent être servies tout au long de l’éventualité au taux minimal garanti. Il n’est, ainsi, pas possible de garantir que le taux minimal posé par la convention sera respecté puisque le niveau de la pension versée dans le cadre du système privé ne peut, pour des raisons inhérentes à ce type de pension, pas être connu jusqu’au moment du départ à la retraite. La crise économique et financière a d’ailleurs mis en évidence les carences de ce système comme cela sera démontré dans le cadre du point 3.

En outre, la commission note que, dans une décision rendue en 2005, le Tribunal constitutionnel du Pérou reconnaît que le droit à la sécurité sociale constitue un «droit fondamental de configuration légale» qui dispose d’un «noyau essentiel» dont la violation par le législateur pourra faire l’objet d’un recours constitutionnel (décision no 1417-2005 PATC du 8 juillet 2005). La commission note néanmoins que, alors que le Pérou est partie à la convention no 102 depuis 1961 et que la Constitution péruvienne reconnaît que les traités internationaux relatifs aux droits de la personne font partie du bloc de constitutionnalité, le tribunal constitutionnel ne semble pas inclure les principes et les minima garantis par la convention no 102 au sein du «noyau essentiel» du droit à la sécurité sociale. Cette décision, alors qu’elle affirme le droit à la sécurité sociale en tant que tel, semble le priver du contenu concret garanti par la convention no 102. Au vu des obligations internationales souscrites par le Pérou, la commission considère qu’une reconnaissance des principes de base garantis par les conventions de sécurité sociale de l’OIT contribuerait efficacement à la mise en œuvre au Pérou de l’Etat de droit fondé sur la solidarité, la gouvernance participative et des minima sociaux.

2.        Dysfonctionnement du système public de pensions

La commission note que le système public de pensions géré par l’ONP semble connaître de sérieux dysfonctionnements ayant pour effet d’entraîner de nombreux retards dans la détermination du droit à pension générant à leur tour un contentieux judiciaire considérable. Selon un rapport de juillet 2008 de la Defensoria del Pueblo del Perú, institution publique indépendante créée par la Constitution dans le but de veiller au respect des droits fondamentaux et au bon fonctionnement de l’Etat de droit, environ 100 000 demandes de détermination de droits à pension étaient en attente de décision et l’examen d’un nombre tout aussi important d’affaires contestant les décisions de l’ONP était instruit par les tribunaux. L’ONP est, selon ce rapport, l’institution contre laquelle le plus grand nombre de réclamations est instruit par la Defensoria. Ce nombre prend une importance significative lorsqu’il est rapporté aux quelque 500 000 pensions gérées par l’ONP et autant de contributeurs actifs dans le cadre du système public de pensions. Le rapport de la Defensoria relève, en outre, qu’il n’existe pas de registre à jour concernant les contributions par affilié, que la charge de la preuve des périodes de contribution est placée non sur l’ONP, mais sur les assurés, et que les procédures d’octroi des pensions sont excessivement complexes. Le rapport adresse, enfin, une série de recommandations à l’attention tant du pouvoir exécutif que législatif dans le but de remédier aux graves insuffisances précitées. Eu égard à ces allégations, la commission demande au gouvernement de démontrer dans son prochain rapport comment l’Etat péruvien assume de manière pleine et entière sa responsabilité générale relative au service des prestations et à la bonne administration des institutions de sécurité sociale, conformément aux articles 71 et 72 de la convention.

3.        Effets de la crise économique et financière sur le système
de sécurité sociale péruvien

La commission constate que le gouvernement n’a pas répondu à l’observation générale de 2008 consacrée à l’impact de la crise économique et financière mondiale sur les systèmes de sécurité sociale. Elle note cependant que, d’après des données statistiques de 2009 (FMI), la crise financière a affecté très durement les fonds privés de pensions péruviens qui ont perdu en moyenne 32 pour cent de leur capitalisation. Les conséquences, notamment pour les assurés proches de l’âge de départ à la retraite, s’avèrent très lourdes car la valeur des comptes de capitalisation a fortement diminué, entraînant une baisse du niveau de pensions versées. La crise a été plus dévastatrice là où les placements financiers des régimes de pension privés n’étaient pas suffisamment encadrés et là où il n’y avait pas en complément un volet par répartition fondé sur le principe de solidarité assurant des prestations définies. La commission considère que le gouvernement péruvien a dû prendre conscience de la fragilité inhérente au régime à gestion privée et devrait à présent examiner la possibilité d’instaurer des mécanismes financiers de protection des fonds accumulés de pension, comme des assurances, des fonds de garantie des montants des pensions, ou le transfert automatique des comptes individuels des assurés proches du départ à la retraite vers des fonds où le risque d’investissement est très bas.

La commission note qu’afin de pallier les carences inhérentes au système de pensions d’administration privée le gouvernement a institué, en mars 2007, des pensions minimales accordées aux assurés des fonds de pension privés sous certaines conditions (loi no 28991 concernant la libre desafiliación informada, pensión mínima y complementaria, y régimen especial de jubilación anticipada). Aux termes de cette loi, toute personne affiliée au système à gestion privée qui, au moment de la constitution de ce système, appartenait au système public des pensions (SNP) peut bénéficier d’une prestation minimale égale à celle servie dans le cadre du SNP ou d’une pension complémentaire si la pension versée par leur AFP est inférieure à la pension minimale. La commission observe cependant que la loi précitée ne garantit une pension minimale qu’en faveur d’un nombre restreint d’assurés qui répondaient à certaines conditions d’âge lors de l’introduction du système de pensions administré par les AFP. Elle considère que l’ouverture du système de pensions minimales garanties à l’ensemble de la population âgée de plus d’un certain âge permettrait à l’Etat péruvien de garantir des pensions de vieillesse minimales à tous ceux dont le niveau des pensions risquerait d’être trop bas notamment suite à la crise économique et financière actuelle. La commission invite le gouvernement à explorer plus avant les avantages que présenterait la généralisation du bénéfice de cette pension minimale à l’ensemble des résidents à bas revenu. Le gouvernement pourrait, à cet égard, souhaiter vouloir tirer parti de l’expérience acquise par d’autres pays de la région où une pension sociale de base de nature non contributive a été créée et bénéficie à tous les citoyens âgés de 65 ans ou plus, qui n’ont jamais contribué ou dont les contributions ne suffisent pas pour l’ouverture d’un droit à pension.

La commission note également que, en réponse à ses observations précédentes relatives à la nécessité de réintroduire une pension réduite pour tous les assurés ayant accompli un stage d’au minimum quinze années de cotisation ou d’emploi (article 29, paragraphe 2, de la convention), le gouvernement indique avoir effectué les calculs actuariels nécessaires pour chiffrer le coût de cette mesure pour le système de pension géré par l’ONP. Actuellement, par l’effet rétroactif du décret-loi no 19990, une telle pension n’est, en effet, versée qu’aux assurés ayant eu 60 ans avant l’entrée en vigueur du décret-loi no 25967, c’est-à-dire le 19 décembre 1992 au plus tard. Le gouvernement indique que, compte tenu de l’importance des ressources concernées (environ 70 pour cent d’accroissement dans la participation du Trésor public), il appartiendra au ministère de l’Economie et des Finances d’évaluer et de se prononcer sur la mise en œuvre de cette proposition. Le gouvernement est prié d’attirer l’attention du ministère de l’Economie et des Finances sur l’obligation internationale du Pérou de rétablir le droit à une pension réduite pour les assurés ayant accompli au minimum quinze années de cotisation ou d’emploi, conformément à l’article 29, paragraphe 2, de la convention no 102, et de préciser dans son prochain rapport les progrès réalisés en la matière. La commission invite également le gouvernement à se prévaloir de l’assistance technique du BIT, notamment en ce qui concerne les évaluations actuarielles de l’impact d’une telle mesure sur le système de pensions.

4.        Couverture insuffisante et évasion à l’obligation d’affiliation
au système de sécurité sociale

Selon une étude réalisée par le BIT (Couverture contributive de la sécurité sociale au Pérou, 2009), en 2007 seuls 35 pour cent de la population économiquement active salariée bénéficiait d’une couverture vieillesse, invalidité et survivants, laissant transparaître une importante évasion à l’obligation d’affiliation au système de sécurité sociale au sein de l’économie formelle. L’année précédente, parmi les quelque 2,2 millions de personnes ayant plus de 65 ans, seules 500 000 percevaient des prestations de vieillesse, invalidité ou survivants, ce qui représente un taux de couverture des personnes âgées d’environ 23 pour cent. En ce qui concerne la protection de la santé, seuls 36 pour cent de la population totale bénéficiaient d’une couverture. D’une manière générale, ces chiffres révèlent la situation préoccupante de l’évasion à l’obligation d’affiliation, notamment dans les grandes entreprises du secteur formel, et la nécessité pour l’Etat de renforcer de manière significative le contrôle exercé par l’organisme national chargé du recouvrement de l’impôt et des cotisations sociales – le SUNAT. En vertu des normes internationales de sécurité sociale ratifiées par le Pérou, le gouvernement a, en effet, le devoir d’assurer le respect de l’obligation d’affiliation obligatoire au système de sécurité sociale et de prendre des mesures concrètes en vue d’améliorer la couverture de l’ensemble du système de sécurité sociale. L’article 5 de la convention précise, à cet égard, que les Etats sont tenus de veiller à ce que le pourcentage minimum d’affiliation à chaque branche de sécurité sociale soit effectivement atteint dans la pratique. Pour obtenir ce résultat, il faut, entre autres, donner aux organes responsables du recouvrement des cotisations les moyens de mener à bien leur mission, et prévoir des sanctions qui soient suffisamment dissuasives pour les contrevenants. Dans le cas du Pérou, les mesures de contrôle de l’application de la législation nationale seront grandement facilitées par le fait que la main-d’œuvre urbaine représente 65 pour cent de la main-d’œuvre totale. La commission veut croire que le gouvernement pourra se fixer des objectifs précis en termes de pourcentage de la population auquel la couverture sera étendue dans le temps qui aura été imparti en renforçant sa capacité de faire respecter l’obligation d’affiliation au système de sécurité sociale, notamment en ce qui concerne la main-d’œuvre urbaine. Prière de fournir des statistiques détaillées sur l’étendue de la couverture du système de sécurité sociale dans le pays pour chaque branche de la sécurité sociale, tant dans le système public que privé.

5.        Situation des micro et petites entreprises

La commission rappelle que, lorsque le Pérou a ratifié la convention no 102 en 1961, il s’est prévalu de la faculté laissée par la convention aux Etats dont les économies et les ressources médicales n’ont pas atteint un développement suffisant de n’appliquer ses dispositions qu’à 50 pour cent des travailleurs des entreprises de plus de 20 salariés, au lieu de 50 pour cent de l’ensemble des salariés (article 3 de la convention). Les Etats qui auraient eu recours à la dérogation précitée sont tenus d’indiquer dans leurs rapports périodiques les mesures prises en vue d’étendre de manière progressive le champ des personnes couvertes tout en précisant si les raisons de maintenir un champ d’application réduit existent toujours, ou s’ils renoncent à se prévaloir dans le futur de cette dérogation.

En 2008, afin d’assurer une couverture sociale à une plus grande partie de la population travaillant dans les petites et moyennes entreprises et de combattre l’importante évasion en matière d’affiliation et de paiement des contributions par ces entreprises, le gouvernement a adopté un décret législatif modifiant le régime juridique de ces entreprises au regard de la sécurité sociale (D.L. no 1086). Le nouveau décret définit les microentreprises comme celles qui emploient dix travailleurs au plus, et les petites comme celles employant au maximum 100 travailleurs et ayant un chiffre d’affaires inférieur à un certain montant. Il établit un régime juridique spécial applicable aux microentreprises où les travailleurs ne sont plus tenus de s’affilier de manière obligatoire au système d’assurance-vieillesse et bénéficient d’un régime spécial en ce qui concerne la protection de la santé. Les employeurs sont tenus de verser des contributions mensuelles pour chacun de leurs travailleurs, complétées par une contribution équivalente versée par l’Etat.

La commission note que, contrairement à l’assurance-santé qui demeure obligatoire avec certains aménagements, le décret législatif no 1086 rend volontaire l’affiliation au système de pensions. Compte tenu du nombre très important de travailleurs employés par ces entreprises, elle espère que cette mesure ne devrait représenter qu’une solution de transition applicable exclusivement aux microentreprises nouvellement créées et permettant la conservation des droits acquis sous le régime précédent. La commission attire également l’attention du gouvernement sur les dispositions de l’article 6 de la convention qui établit les principes auxquels doivent répondre les régimes d’assurance volontaire (contrôle par les autorités publiques ou administrations conjointes par les employeurs et les travailleurs, couverture d’une partie substantielle des personnes à faible revenu, etc.). A la lumière de ces considérations, la commission attend du gouvernement qu’il fournisse des informations relatives à l’impact de la réforme sur la couverture des travailleurs des microentreprises.

6.        Introduction de l’assurance-santé universelle

Le système de protection de la santé au Pérou est composé des régimes Seguro Social de Salud (ESSALUD), Seguro Integral de Salud (assurant des prestations significativement réduites par rapport au système ESSALUD à la charge du ministère de la Santé) ainsi que des assurances privées (EPS). En dépit d’une augmentation considérable du taux de couverture contributive du système de sécurité sociale de santé entre 1999 et 2007, seuls quelque 36 pour cent de la population dans son ensemble bénéficiaient en 2007 d’une couverture santé, les 64 pour cent restants ne bénéficiant d’aucune couverture. En 2006, le pourcentage de salariés couverts était de 32 pour cent en moyenne, avec d’importantes disparités entre le secteur public où ce taux était de 68 pour cent et le secteur privé – 24 pour cent. Ces taux font du Pérou l’un des pays de la région où la couverture santé est globalement la plus faible et celui où les inégalités régionales sont les plus marquées.

En reconnaissance de cet état de fait, le gouvernement a adopté en 2009 une loi-cadre sur l’assurance-santé universelle (loi no 29344 du 9 avril 2009) dont l’objectif est d’étendre progressivement à l’ensemble de la population des prestations de santé de caractère préventif, curatif et de réadaptation sur la base d’un plan essentiel pour l’assurance-santé. Ce texte est destiné à mettre en œuvre des droits fondamentaux reconnus par la constitution politique du Pérou, en particulier le droit à la protection de la santé, le droit universel et progressif de toute personne à la sécurité sociale garantissant le libre accès à des prestations de santé fournies par des entités publiques, privées et mixtes, ainsi que le devoir de l’Etat de déterminer la politique nationale de santé. Conformément à la loi-cadre, le droit à l’assurance-santé universelle doit être pleinement et progressivement garanti à chaque étape de la vie et sans discrimination d’aucune sorte à l’ensemble des résidents. Le ministère de la Santé est chargé de préparer ledit plan essentiel et de créer un comité technique pour la mise en œuvre de l’assurance-santé universelle. Selon les dernières informations disponibles, en septembre 2009, la mise en place de l’assurance-santé universelle avait débuté dans certaines régions du pays, notamment celles d’Apurímac, Huancavelica et Ayacucho.

La commission note que l’introduction d’un système d’assurance-santé universelle pourrait, s’il était mis en œuvre efficacement, permettre d’étendre la protection de la santé à une partie de plus en plus large de la population. Elle observe néanmoins que, afin de rendre pleinement opérationnel le dispositif de l’assurance-santé universelle, la loi précitée devrait être complétée par des règlements techniques d’application garantissant le respect de l’obligation d’affiliation et de cotisation, notamment en ce qui concerne les salariés de l’économie formelle où l’évasion à l’obligation de s’affilier semble particulièrement élevée; des progrès pouvant, en outre, être réalisés en ce qui concerne les salariés de l’économie informelle, les travailleurs indépendants et les populations rurales. La commission s’apprête à suivre attentivement la mise en œuvre du système d’assurance-santé universelle et prie, par conséquent, le gouvernement de fournir des informations sur la nature des soins garantis ainsi que les progrès réalisés en termes de couverture de la population par secteur économique et région géographique.

7.        Elaboration d’une stratégie nationale pour le développement
durable de la sécurité sociale

En 2001, la Conférence internationale du Travail (CIT) a réaffirmé le rôle central de la sécurité sociale et réitéré qu’elle restait un défi auquel l’ensemble des Etats Membres devaient s’attaquer de toute urgence. Les conclusions adoptées par la CIT en 2001 reconnaît qu’une «priorité absolue doit être donnée à la conception de politiques et d’initiatives propres à faire bénéficier de la sécurité sociale ceux qui ne sont pas couverts par les systèmes en vigueur». Pour atteindre cet objectif, la Conférence a exhorté chaque pays à définir une stratégie nationale étroitement liée aux autres politiques sociales. Les Etats, comme le Pérou, qui sont parties au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (PIDESC), sont également tenus d’élaborer une stratégie nationale pour la mise en œuvre intégrale du droit à la sécurité sociale et allouer des ressources budgétaires et autres suffisantes au niveau national (observations générales no 19 du Comité des Nations Unies pour les droits économiques, sociaux et culturels (CDESC), formulées en 2007. La commission considère que la nécessité d’élaborer une telle stratégie nationale découle de la responsabilité générale de l’Etat établie par la convention no 102 de garantir la pérennité et le bon fonctionnement du système de sécurité sociale. Le lancement d’une stratégie nationale de consolidation et de développement durable du régime de sécurité sociale permettrait à l’Etat d’exploiter pleinement l’ensemble du potentiel offert par les normes internationales de sécurité sociale en vue d’assurer la bonne administration des régimes et de permettre l’extension progressive de la couverture à l’ensemble de la population. La commission attire l’attention du gouvernement sur la possibilité de se prévaloir de l’assistance technique du BIT à cet égard.

[Le gouvernement est prié de répondre en détail aux présents commentaires en 2010.]

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