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Freedom of Association and Protection of the Right to Organise Convention, 1948 (No. 87) - United Kingdom of Great Britain and Northern Ireland (RATIFICATION: 1949)

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La commission prend note des observations de l’Association des pilotes de ligne britanniques (BALPA) en date du 22 octobre 2008, appuyées par la Fédération internationale des ouvriers du transport (ITF) et la centrale Unite the Union, ainsi que de la réponse du gouvernement. Elle note en particulier que la BALPA se réfère à deux décisions récentes de la Cour de justice des Communautés européennes (CJCE): International Transport Workers’Federation and the Finnish Seaman’s Union c. Viking Line ABP (Viking) et Laval un Partneri c. Svenska Byggnadsarbetareforbundet (Laval), dans lesquelles la Cour a considéré que le droit de grève est sujet, en droit syndical européen, à des restrictions lorsque ses effets peuvent affecter de manière disproportionnée la liberté d’établissement d’un employeur ou sa liberté de fournir des services. La BALPA argue que ces jugements ont une incidence négative sur ses droits syndicaux tels que prévus par la convention.

La BALPA explique en particulier qu’elle a décidé de déclencher une grève suite à la décision de l’employeur, British Airways (BA), de constituer une société filiale dans d’autres Etats de l’Union européenne. Bien que des efforts aient été déployés en vue de négocier sur cette question, en particulier sur l’impact que cette décision aurait sur les conditions d’emploi, toutes les tentatives se sont révélées infructueuses, et les membres de la BALPA ont donc voté à une forte majorité en faveur de la grève. Cependant, la grève a été de fait entravée par la décision de BA de solliciter une injonction, en se basant sur l’argument que la grève serait illégale en vertu de la jurisprudence créée par les affaires Viking et Laval. En outre, BA avait menacé, dans le cas où la grève aurait été effectivement déclenchée, de réclamer des dommages et intérêts d’un montant estimé à 100 millions de livres par jour. Devant cette situation, la BALPA n’a pas persisté dans la voie de la grève, faisant valoir qu’elle risquait de se retrouver dans une situation d’insolvabilité dans le cas où il lui serait exigé de tels dommages-intérêts. La BALPA se déclare particulièrement inquiète de la perspective de voir l’application de la jurisprudence Viking et Laval par les tribunaux britanniques se traduire par des injonctions contre des actions de revendication (et par le licenciement de travailleurs) dans le cas où les tribunaux détermineraient que la grève a, pour l’employeur, un impact sans commune mesure avec les avantages à en attendre de la part des travailleurs.

La commission note que le gouvernement indique dans sa réponse que la démarche de la BALPA est mal conçue et se trompe de cible, car tout effet négatif que la jurisprudence Viking et Laval pourrait avoir ne serait qu’une conséquence du droit de l’Union européenne, que le Royaume-Uni est tenu d’appliquer, et non d’une quelconque action unilatérale du Royaume-Uni lui-même. Le gouvernement affirme en outre que l’initiative de la BALPA est prématurée, car on ne saurait déterminer avec certitude quelle incidence aurait la jurisprudence Viking et Laval sur l’application de la législation syndicale au Royaume-Uni, si tant est qu’une telle incidence existe. Il ajoute que cette jurisprudence n’aura vraisemblablement pas beaucoup d’effet sur les droits des syndicats puisqu’elle ne concerne que les cas dans lesquels la liberté d’établissement et la liberté de mouvement des services d’un Etat à l’autre sont en jeu. En plus, l’impact des principes qui se dégagent de cette jurisprudence peut différer considérablement, en fonction des faits dans chaque cas. Il n’y a pas eu par la suite d’affaire analogue devant la CJCE, et il n’y a pas eu non plus de décision des tribunaux du Royaume-Uni abordant la question de la mesure dans laquelle les nouveaux principes pourraient constituer une restriction supplémentaire à la liberté des syndicats d’organiser leurs actions revendicatives au Royaume-Uni. Enfin, le gouvernement indique qu’il n’est pas évident que la limite prévue actuellement en matière de dommages et intérêts se trouverait contournée ou éludée dans une action en justice s’appuyant sur la jurisprudence Viking, étant donné que cette limite se trouve solidement ancrée dans la protection des libertés syndicales, protection qui ne manquerait pas d’être prise en considération dans le cas où cette limite serait contestée devant les tribunaux comme contraire au droit de l’Union européenne.

De manière liminaire, la commission tient à rappeler de façon générale ses précédents commentaires, dans lesquels elle a pris note des limitations affectant l’action revendicative au Royaume-Uni, notamment le principe selon lequel il y a, vu sous l’angle de la common law, rupture de contrat lorsque des travailleurs participent à une action revendicative, et les membres d’un syndicat ne sont protégés des conséquences au regard du droit (le licenciement) que lorsque le syndicat n’est pas susceptible de poursuites, c’est-à-dire lorsqu’il s’avère que la grève se trouve dans la continuité d’un conflit du travail, ce qui n’inclut pas «l’action secondaire» ou la grève de solidarité (art. 224 de la loi (de consolidation) de 1992 sur les syndicats et les relations du travail (TULRA)). A cet égard, la commission a demandé au gouvernement d’indiquer les mesures prises ou envisagées en vue de modifier la TULRA de manière à élargir le champ de la protection prévue pour les travailleurs qui s’engagent officiellement et légalement dans une action revendicative.

S’agissant de la question posée par la BALPA, la commission tient à établir clairement que sa tâche n’est pas de juger le bien-fondé des attendus de la CJCE dans les affaires Viking et Laval, en tant que ces attendus proposent une interprétation du droit de l’Union européenne à partir de droits distincts et variés découlant du Traité européen, mais plutôt d’examiner si l’impact de ces décisions au niveau national est tel qu’il en résulte un déni des droits syndicaux des travailleurs au regard de la convention no 87.

La commission observe que, en élaborant sa position par rapport aux restrictions au droit de grève qui sont admissibles, elle n’a jamais inclus la nécessité d’évaluer la proportionnalité des intérêts en ayant à l’esprit une notion de liberté d’établissement ou de liberté de fournir des services. La commission a seulement suggéré que, dans certains cas, la notion d’un service minimum négocié peut être envisagée, en vue d’éviter un préjudice qui serait irréversible ou hors de toute proportion à l’égard des tiers, et, si un accord n’est pas possible, que la question soit soumise à un organe indépendant (voir étude d’ensemble de 1994 sur la liberté syndicale et la négociation collective, paragr. 160). La commission estime qu’il n’y a aucune raison de revoir sa position sur ce point.

La commission observe avec une grande préoccupation, dans cette affaire, les limites pratiques à l’exercice effectif du droit de grève pour les travailleurs affiliés à la BALPA. La commission est d’avis que la menace omniprésente d’une action en dommages-intérêts comportant le risque de mener le syndicat dans une situation d’insolvabilité, éventualité aujourd’hui fort plausible, compte tenu de la jurisprudence Viking et Laval, crée une situation dans laquelle l’exercice des droits établis par la convention devient impossible. Tout en prenant dûment note de la déclaration du gouvernement selon laquelle il serait prématuré à ce stade de présumer de l’impact que cette jurisprudence aurait sur le jugement que le tribunal aurait rendu dans cette affaire, étant donné que la BALPA s’est désistée, la commission estime au contraire qu’il y avait une réelle menace contre l’existence du syndicat, et que la demande d’injonction et les délais qui s’en seraient suivis nécessairement auraient, selon toute vraisemblance, rendu l’action elle-même sans pertinence et dénuée de sens. Enfin, la commission note que le gouvernement déclare que l’impact des jugements de la CJCE est limité puisque ces jugements ne concernent que des affaires dans lesquelles ce qui est en jeu, c’est la liberté d’établissement et la liberté de mouvement des services d’un Etat Membre à un autre, alors que, dans leur immense majorité, les conflits du travail au Royaume-Uni n’ont qu’une portée purement nationale et ne soulèvent pas de questions transfrontières. La commission observe à cet égard que, dans le contexte actuel de la mondialisation, de telles affaires risquent de devenir plus courantes, notamment dans certains secteurs d’emploi, comme celui des transports aériens, tant est si bien qu’une atteinte à la possibilité des travailleurs de ces secteurs de négocier réellement avec leurs employeurs sur les questions affectant leurs conditions d’emploi pourrait assurément se révéler dévastatrice. Ainsi, la commission considère que la doctrine utilisée dans ces jugements de la CJCE est susceptible d’avoir un effet restrictif quant à l’exercice du droit de grève dans la pratique, d’une manière qui est contraire à la convention.

A la lumière des observations qu’elle formule depuis de nombreuses années quant à la nécessité d’assurer une plus grande protection du droit des travailleurs de recourir, dans la pratique, à une action revendicative légitime et, compte tenu des nouveaux défis auxquels cette protection se trouve confrontée, comme examiné ci-dessus, la commission demande au gouvernement de réviser la TULRA en envisageant les mesures appropriées de protection de la faculté des travailleurs et de leurs organisations de recourir à l’action revendicative, et d’indiquer les mesures prises à cet égard.

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