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La commission prend note du rapport du gouvernement et, en particulier, de son indication selon laquelle il met tout en œuvre pour l’adoption du nouveau projet de Code du travail du secteur privé. A cette fin, a été mise en place une commission tripartite qui, en vertu de l’ordonnance ministérielle no 168/2003, est chargée d’examiner le projet de code et d’assurer le suivi des procédures aux fins de sa promulgation.

Le gouvernement indique qu’il a demandé l’assistance technique du Bureau pour s’assurer de la conformité des dispositions du projet de code avec les normes internationales du travail, et prendre en compte les commentaires du Bureau avant d’adopter le code. Le gouvernement ajoute qu’il a pris en considération les commentaires précédents de la commission d’experts pour élaborer le projet de Code du travail et aligner ses dispositions sur celles des conventions ratifiées. Les dispositions qui ne sont pas conformes aux conventions ont été imposées par les conditions découlant des attaques terroristes qui touchent actuellement le monde. Le gouvernement transmettra copie du code dès qu’il aura été adopté.

La commission prend note avec intérêt des dispositions du projet de Code du travail qui semblent résoudre les nombreuses divergences entre la législation et les dispositions de la convention qu’elle a évoquées dans ses commentaires précédents. En particulier, la commission note que, dans le projet de Code du travail, les dispositions suivantes du Code du travail en vigueur semblent avoir été supprimées: la disposition imposant de réunir au moins 100 travailleurs pour créer un syndicat (art. 71) et dix employeurs pour former une association (art. 86); l’interdiction pour les personnes de moins de 18 ans de se syndiquer (art. 72); les restrictions à la possibilité, pour les travailleurs étrangers, de s’affilier à un syndicat (art. 72); l’obligation d’obtenir du ministre de l’Intérieur une attestation par laquelle il approuve la liste des membres fondateurs d’un syndicat (art. 74); l’interdiction de créer plus d’un syndicat par établissement, entreprise ou activité (art. 71); les restrictions au droit de vote, et au droit d’être élu à des fonctions syndicales, pour les travailleurs étrangers (art. 72); la réversion des biens d’un syndicat au ministère des Affaires sociales et du Travail en cas de dissolution du syndicat (art. 77); la restriction imposée aux syndicats de ne se fédérer que par identité d’activités ou par identité de production ou de services (art. 79).

Toutefois, la commission note qu’il reste dans le projet de Code du travail des dispositions à propos desquelles elle avait formulé des réserves en ce qui concerne leur compatibilité avec les dispositions suivantes de la convention.

Article 2 de la convention. La commission note que l’article 5 du projet de Code du travail maintient l’exclusion des travailleurs domestiques du champ d’application du code et, d’une manière plus générale, de catégories de travailleurs régies par d’autres lois. La commission rappelle que cet article de la convention prévoit que tous les travailleurs, sans distinction d’aucune sorte, ont le droit de constituer des organisations de leur choix et de s’y affilier, à la seule exception éventuelle des forces armées et de la police, comme le prévoit l’article 9. La commission demande donc au gouvernement d’indiquer comment ce droit est garanti aux travailleurs domestiques et de préciser les catégories de travailleurs régies par d’autres lois qui sont exclues du champ d’application du code et dont il est fait mention à l’article 5 du projet de code.

La commission note en outre que l’article 94 prévoit que la partie 5 du projet de Code sur les organisations de travailleurs et d’employeurs et le droit d’organisation s’appliquera au secteur pétrolier et au secteur public dans la mesure où ses dispositions ne sont pas incompatibles avec les lois applicables à ces secteurs. La commission demande au gouvernement de communiquer copie des lois applicables au secteur pétrolier et au secteur public, et d’indiquer comment elles pourraient restreindre l’application de la partie 5 aux travailleurs de ces secteurs.

La commission note que l’article 95 du projet de code prévoit que les employeurs ont le droit de constituer des fédérations, selon les conditions fixées par le ministre. La commission espère que ces conditions ne restreignent pas le droit des employeurs de constituer des organisations et des fédérations de leur choix. Elle demande au gouvernement de la tenir informée de toute réglementation émise par le ministre à cet égard.

La commission note aussi que l’article 98 du projet de code prévoit d’une manière générale la personnalité juridique des organisations de travailleurs ou d’employeurs, après approbation par le ministre de la constitution de ces organisations. La commission rappelle que la législation ne définit clairement ni les procédures des formalités qui doivent être observées, ni les raisons que l’autorité compétente peut donner pour refuser la constitution d’une organisation, et que la disposition qui confère à l’autorité compétente une faculté véritablement discrétionnaire pour accorder ou non l’autorisation de constituer et de gérer une organisation peut équivaloir à la nécessité d’une autorisation préalable, ce qui est contraire à cet article de la convention. La commission demande donc au gouvernement d’envisager de revoir ce projet de disposition afin que la faculté du ministre de ne pas approuver la constitution d’une organisation soit strictement limitée, et de fixer un délai pour prendre cette décision, délai au-delà duquel l’organisation sera enregistrée.

Enfin, la commission note que l’article 101 du projet de code semble avoir supprimé le monopole syndical à l’échelle sectorielle et de l’entreprise mais maintient les dispositions qui prévoient la constitution d’une seule fédération générale. La commission demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que le projet de code garantisse le droit des travailleurs de constituer l’organisation de leur choix à tous les niveaux, y compris la possibilité de constituer plusieurs fédérations générales.

Article 3. La commission note que l’article 100 du projet de code confère au ministre la faculté, excessive, d’examiner la comptabilité et les livres comptables des organisations de travailleurs et d’employeurs, et interdit d’une manière générale à ces organisations de participer à des activités politiques et d’accepter des dons ou des legs sans l’autorisation du ministre. La commission rappelle que le droit des organisations de travailleurs et d’employeurs d’organiser leur gestion en dehors de toute intervention des autorités publiques comprend notamment l’autonomie et l’indépendance financière et la protection des fonds et biens de ces organisations. La commission estime qu’il n’y a pas atteinte au droit des organisations d’organiser leur gestion si, par exemple, le contrôle se borne à une obligation de soumettre des rapports financiers périodiques, ou s’il est effectué parce qu’il existe de sérieuses raisons de considérer que les actions d’une organisation sont contraires à ses statuts ou à la loi (qui de son côté ne devrait pas être en contradiction avec les principes de la liberté syndicale); dans le même ordre d’idées, il n’y a pas atteinte à la convention si la vérification est limitée à des cas exceptionnels, par exemple pour faire enquête sur une plainte, ou s’il y a eu des allégations de malversation. Dans tous les cas, l’autorité judiciaire compétente devrait avoir un droit de réexamen, offrant toutes les garanties d’impartialité et d’objectivité, tant sur les questions de fond que de procédure (voir l’étude d’ensemble de 1994 sur la liberté syndicale et la négociation collective, paragr. 124 et 125).

La commission estime que les facultés conférées au ministre en vertu de l’article 100 du projet de code, à savoir l’accès sans restriction aux livres et documents comptables des organisations d’employeurs et de travailleurs, et le fait que les donations et legs doivent être préalablement autorisés, dépassent les limites établies dans les paragraphes susmentionnés de l’étude d’ensemble. La commission demande au gouvernement d’envisager de revoir cette disposition du projet de code.

A propos de l’interdiction générale des activités politiques, la commission rappelle que la législation qui interdit toute activité politique aux syndicats soulève des difficultés sérieuses par rapport aux principes de la convention. Une certaine souplesse de la législation est donc souhaitable à cet égard, afin de parvenir à un équilibre raisonnable entre, d’une part, l’intérêt légitime des organisations à exprimer leur point de vue sur les questions de politique économique et sociale intéressant leurs membres et les salariés en général et, d’autre part, le degré de séparation voulu entre l’action politique proprement dite et les activités syndicales (voir étude d’ensemble, op. cit., paragr. 133). La commission demande donc au gouvernement d’envisager de revoir l’article 100 du projet de code afin de supprimer l’interdiction totale des activités politiques, conformément aux principes susmentionnés.

La commission note en outre que les articles 116 à 125 du projet de code prévoient un système d’arbitrage obligatoire qui va à l’encontre du droit des organisations de travailleurs d’organiser leur activité et de formuler leurs programmes d’action, sans intervention des autorités publiques. La commission demande donc au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour qu’un arbitrage final et obligatoire ne soit imposé que dans les cas suivants: services essentiels au sens strict du terme, fonctionnaires exerçant une autorité au nom de l’Etat, situation de crise nationale aiguë ou accord entre les deux parties.

La commission veut croire que le gouvernement prendra, dans un proche avenir, les mesures nécessaires afin de rendre les dispositions du projet de Code du travail conformes aux commentaires énoncés ci-dessus et que le code sera adopté d’ici peu afin de garantir une plus grande conformité avec les dispositions de la convention. La commission prie le gouvernement d’indiquer, dans son prochain rapport, les progrès réalisés à cet égard et de transmettre le Code du travail dès qu’il aura été adopté.

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