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Forced Labour Convention, 1930 (No. 29) - Guatemala (RATIFICATION: 1989)

Other comments on C029

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La commission prend note des commentaires de l’Union syndicale des travailleurs du Guatemala (UNSITRAGUA) des 24 mai et 25 août 2004 et du Syndicat des travailleurs des stations de production, puits et gardiens de l’entreprise municipale de l’eau et de ses annexes du 19 mai 2004. Ces commentaires ont été transmis au gouvernement les 13 juillet et 8 septembre 2004 afin qu’il formule les observations qu’il jugerait opportunes. Les commentaires communiqués par l’UNSITRAGUA les 2 et 3 novembre 2004 ont été transmis au gouvernement et seront examinés par la commission lors de sa prochaine session.

I.  Travail imposé après la journée ordinaire de travail dans les secteurs public et privé, sous la menace d’une peine

a)  Secteur public

Juges de paix - organisme judiciaire

1. Dans son observation antérieure, la commission avait pris note des commentaires formulés par l’UNSITRAGUA selon lesquels, dans la plupart des communes du pays, il existe seulement un juge de paix, à qui il incombe de rester en service 24 heures sur 24, tous les jours de l’année. Le personnel auxiliaire du juge doit assurer les tours de service par rotation sous la forme de travail supplémentaire qui s’ajoute à la journée ordinaire de travail. Les permanences assurées les jours fériés, les samedis et les dimanches sont compensées en temps, mais celles réalisées après la fin de la journée ordinaire de travail ne sont ni compensées en temps ni rémunérées. Le refus d’accomplir les tours de service susvisés constitue une infraction qui peut être sanctionnée par le licenciement. La commission traite de cette question au paragraphe 9 de cette observation.

Entreprise municipale des services des eaux (EMPAGUA) - Municipalité
de la Capitale du Guatemala

2. Les travailleurs de l’EMPAGUA doivent travailler 24 heures consécutives suivies de 48 heures de repos. Selon l’UNSITRAGUA, cette organisation du travail évite le paiement des heures effectuées au-delà de la journée ordinaire de travail, et le refus d’effectuer ces heures peut donner lieu à un licenciement et même à des poursuites pénales dans la mesure où les travailleurs concernés ont le statut de fonctionnaires publics. En ce qui concerne les conditions de la prestation d’heures supplémentaires et leurs limites, la commission renvoie à son observation sur la convention (nº 1) sur la durée du travail (industrie), 1919. La commission se réfère également aux paragraphes 123, 142 et suivants et 317 de son étude d’ensemble de 2004 sur les conventions relatives au temps de travail, dans lesquels elle indique que, compte tenu de l’esprit des conventions nos 1 et 30 et au regard des travaux préparatoires, il convient de conclure que la faculté laissée aux autorités compétentes de fixer les limites au nombre total d’heures additionnelles n’est pas illimitée et que ces limites doivent être «raisonnables» et être prescrites dans le respect de l’objectif général des deux instruments, qui est de faire de la journée de huit heures une norme légale qui protège les travailleurs contre une fatigue excessive. La commission indique en outre que la limitation de la durée maximale du travail est également nécessaire du point de vue des «droits de l’homme». Enfin, elle souligne l’importance de la consultation des organisations d’employeurs et de travailleurs pour déterminer les dérogations permanentes et temporaires au principe de la journée des huit heures.

Police nationale civile

3. Selon l’UNSITRAGUA, dans beaucoup de cas, les agents de la Police nationale civile voient leur temps de repos et leurs congés suspendus. Ils doivent ainsi assurer les tours de service au-delà de la journée ordinaire de travail, sans rémunération supplémentaire et sous la menace de sanctions, y compris de sanctions pénales lorsqu’ils ne respectent pas les instructions. Dans les cas où une sanction autre que le licenciement est imposée, conformément au règlement de cette institution, cette sanction empêche l’agent d’obtenir une promotion.

Travailleurs de l’Etat (catégorie 029)

4. Dans ses précédents commentaires, l’UNSITRAGUA avait également évoqué la situation des travailleurs de l’Etat appartenant à la catégorie 029. La condition des employés de l’Etat se définit par la catégorie budgétaire à laquelle ils appartiennent. Cette catégorie 029 a été créée pour permettre d’engager du personnel professionnel et technique qualifié pour des prestations définies et temporaires, sans pour autant que ces travailleurs ne bénéficient du statut d’employés publics. Leurs contrats sont renouvelés tant que des crédits sont alloués pour cela, et ils n’ont pas droit aux prestations reconnues de droit au personnel permanent. L’UNSITRAGUA a allégué que les travailleurs recrutés selon ce système ne perçoivent pas de rémunération pour le travail effectué au-delà de la journée de travail ordinaire et que tout refus de leur part de travailler en plus de la journée ordinaire a une incidence sur l’évaluation de leur rendement et peut entraîner la rupture de leur contrat sans que la responsabilité de l’Etat ne soit engagée.

5. La commission prend note de la réponse du gouvernement selon laquelle les personnes dont la prestation de service est financée par la ligne budgétaire  029 du budget général de la Nation ne sont pas dans une relation de travail mais sont liées par un contrat civil. Ainsi, ces personnes n’ont pas la qualité de travailleurs mais de prestataires de services. Le gouvernement ajoute que, si ces personnes considèrent que la relation juridique qui les lie à l’Etat est une relation de travail, elles doivent initier l’action judiciaire susceptible de reconnaître cette situation. A cet égard, la commission constate, en ce qui concerne l’application de la convention, que le type de relation juridique, y compris l’absence de relation juridique, n’a pas d’incidence. En effet, la convention protège de l’imposition de travail forcé dans tout type de relations de travail, y compris celle qui ne découle pas d’un contrat de travail.

b)  Secteur privé

Plantations

6. Dans sa précédente observation, la commission avait noté les commentaires de l’UNSITRAGUA concernant les entreprises qui fixent à leurs travailleurs des objectifs de production tels que ceux-ci doivent, afin de percevoir le salaire minimum, travailler au-delà des limites de la journée ordinaire de travail, le temps de travail en plus n’étant pas rémunéré. Selon l’organisation, ces cas se rencontrent le plus fréquemment dans les exploitations qui, en tant que producteurs indépendants, produisent des bananes pour la multinationale fruitière américaine «Chiquita», présente dans les exploitations de la commune de Morales, département d’Izabal, et sur la côte sud du Guatemala. L’UNSITRAGUA cite en outre comme exemple les exploitations El Real et El Atlántico, situées dans le district de Bogos, commune de Morales, département d’Izabal, où les exploitants refusent de négocier si leur interlocuteur n’admet pas comme préalable que le travail à la pièce n’est pas soumis à la journée de travail [ordinaire], ceci au mépris des dispositions en vigueur. La commission avait pris note des rapports sur la responsabilité sociale de Chiquita Brands International selon lesquels au Guatemala les travailleurs rémunérés à l’heure et les administrateurs travaillent parfois plus de 60 heures (par semaine) et les travailleurs excèdent le nombre maximum d’heures supplémentaires.

7. Le rapport du gouvernement ne contient pas d’informations pertinentes à ce sujet et se limite à indiquer que l’inspection du travail est chargée d’autoriser le recrutement des travailleurs ruraux.

8. Dans ses commentaires plus récents, l’UNSITRAGUA allègue que le ministère du Travail, par le biais de l’Inspection générale du travail, n’a pas mené ni même tenté de mener des investigations afin de vérifier ces cas et de constater quelles sont les entreprises productrices indépendantes qui utilisent le salaire à la pièce ou la fixation d’objectifs de production comme un mécanisme permettant d’augmenter la journée ordinaire de travail sans rémunération. A cet égard, la commission renvoie à l’observation qu’elle formule au sujet de la convention (nº 129) sur l’inspection du travail (agriculture), 1969. Elle renvoie également au paragraphe 92 de son étude d’ensemble de 1958 sur les conventions nos 26 et 99 relatives à la fixation des salaires minima, où elle indique que: «il convient, lorsqu’un système de salaires minima repose essentiellement sur les taux aux pièces, de veiller à ce que, dans des conditions normales, un travailleur puisse gagner assez pour jouir d’un niveau de vie suffisant et que son rendement, et par conséquent ses gains, ne soit pas indûment limité par des facteurs indépendants de ses propres efforts».

Travail imposé après la journée de travail ordinaire et définition du travail forcé aux fins de la convention

9. La commission a pris note des informations relatives aux cas des travailleurs licenciés pour avoir refusé de travailler 24 heures continues pour un organisme judiciaire et pour le ministère de la Santé publique et de l’Assistance sociale. Dans ses derniers commentaires, l’UNSITRAGUA cite, à titre d’exemple, le cas d’un travailleur licencié pour avoir refusé de continuer à assurer les tours de service. Ce cas a été jugé devant la première et la troisième salle de la Cour d’appel du travail et de la prévoyance sociale (procès 353-2003 et jugement no 25-2004). La commission note que le rapport du gouvernement ne contient pas d’information sur ce cas et le prie de communiquer copie des décisions judiciaires y relatives. L’UNSITRAGUA a également communiqué des informations sur le cas d’un travailleur du Centre de santé numéro quatre, zone sept, de la capitale du Guatemala, licencié le 4 avril 2002. L’accord no 9158 du 8 novembre 2002 du ministère de la Santé publique et de l’Assistance sociale a établi que ce travailleur avait été licencié pour avoir été absent trois jours de travail complets le même mois. Dans sa décision, le tribunal cinquième du travail et de la prévoyance sociale a établi que «le travailleur avait effectivement été licencié pour juste motif pour avoir été absent à son travail le 23 septembre 2001, jour où il devait travailler 24 heures ininterrompues, absence qui équivalait à trois jours de travail complets». L’UNSITRAGUA précise que la salle troisième de la Cour d’appel du travail et de la prévoyance sociale examine l’appel interjeté contre cette décision (jugement no 566-2003).

10. Aux fins de la convention, l’expression «travail forcé ou obligatoire» désigne tout travail ou service exigé d’un individu sous la menace d’une peine quelconque et pour lequel ledit individu ne s’est pas offert de plein gré. La commission relève que, dans le cas des travailleurs du secteur public, tout refus d’accomplir du travail en sus de la journée ordinaire de travail justifie la perte de l’emploi. Dans le secteur privé, dans le cas des entreprises qui conviennent d’une rémunération en contrepartie de l’exécution d’un objectif de production, l’obligation de travailler au-delà de la journée ordinaire de travail dérive de la nécessité d’accomplir ce travail pour pouvoir obtenir le salaire minimum. Dans les deux cas, le dénominateur commun est l’imposition d’un travail ou d’un service dont le travailleur ne peut «se libérer» qu’en quittant l’emploi ou en étant licencié, licenciement qui sanctionne son refus. La commission a constaté dans son observation de l’année dernière sur cette question que le travailleur a théoriquement la possibilité de ne pas travailler au-delà de la journée ordinaire de travail mais, dans la pratique, il ne s’agit pas d’un vrai choix, compte tenu de la nécessité qu’il a de gagner au moins le salaire minimum ou de conserver son emploi, ou des deux. La commission considère que, dans ces cas, le travail ou service est imposé sous la menace d’une peine: le licenciement ou une rémunération inférieure au salaire minimum. La commission espère que le gouvernement fournira des informations sur les mesures prises ou envisagées pour assurer le respect de la convention à cet égard.

II.  Pratiques de recrutement (enganche) et de déplacement des travailleurs, et autres formes de recrutement de la main-d’œuvre indigène

11. Dans son observation précédente, la commission avait pris note du rapport du Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme et des libertés fondamentales des populations autochtones, consécutif à une mission au Guatemala (document E/CN.4/2003/90/Add.2, en date du 10 février 2003). Le Rapporteur spécial indique que l’on constate «une persistance des pratiques d’«enganche» (embauche entachée de tromperie) et de transferts d’indigènes utilisés comme main-d’œuvre dans des plantations traditionnelles ou nouvelles, et aussi d’autres formes de mainmise sur cette main-d’œuvre, qui est soumise à des conditions précaires, avec des salaires inférieurs aux minimums légaux, sans couverture sociale, au mépris des normes les plus élémentaires en ce qui concerne la rémunération, la stabilité de l’emploi et les conditions de travail». Le gouvernement se réfère dans son rapport à l’article 4 de la Constitution selon lequel aucune personne ne peut être soumise à l’esclavage ou tout autre pratique portant atteinte à sa dignité. La commission espère que le gouvernement fournira des informations sur ces pratiques d’«enganche» et de déplacement ou autres formes de recrutement de la main-d’œuvre indigène ainsi que sur les mesures prises ou envisagées pour assurer le respect de la Constitution et de la convention. La commission renvoie également à ses précédents commentaires sur l’application de la convention (nº 169) relative aux peuples indigènes et tribaux, 1989.

III.  Traite des personnes

12. Dans son observation précédente, la commission avait noté les commentaires de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) selon lesquels, bien que la Constitution interdise le travail forcé, la traite des personnes existe, en particulier des enfants, en vue de leur prostitution. Selon la CISL, dans leur majorité, les enfants victimes de cette traite viennent de pays voisins du Guatemala, et ce phénomène est évident dans les régions frontalières avec le Mexique et le Salvador. A cet égard, la commission considère que le problème de la traite des enfants en vue de leur exploitation sexuelle peut être examiné plus spécifiquement sous la convention (nº 182) sur les pires formes de travail des enfants, 1999, et renvoie en conséquence aux commentaires qu’elle formule sous cette convention.

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