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1. Dans ses précédentes observations, la commission avait exprimé un certain nombre de préoccupations concernant l'application de la convention. Ces préoccupations étaient partagées par la Fédération nationale des syndicats du Pakistan et la Fédération des syndicats du Pakistan dans des commentaires formulés par chaque organisation en 1993, ainsi que par la Commission de la Conférence, dans ses débats de 1995.

2. Discrimination fondée sur la religion. Depuis un certain nombre d'années, la commission appelle l'attention sur l'ordonnance (no XX) de 1984 relative aux activités anti-islamiques du groupe Quadiani, du groupe Lahori et du groupe Ahmadi (interdiction et sanction), qui a ajouté au Code pénal des dispositions prévoyant des peines d'emprisonnement pouvant aller jusqu'à trois ans à l'encontre de tout membre de ces groupes religieux pour, entre autres, propagation de sa foi, verbalement ou par écrit, ou par une représentation visible (art. 298B et 298C). L'article 295C, couramment cité comme la "loi sur le blasphème", a été incorporé dans le Code pénal en 1986: cet article dispose que toute personne coupable de profaner le nom du prophète Mohammed est passible de la peine de mort. Dans son rapport, le gouvernement déclare, comme en de précédentes occasions, que les contraintes imposées aux Ahmadis par l'ordonnance no XX sont loin d'être accablantes puisqu'elles ne touchent que certaines pratiques en public. Le gouvernement réitère que les pratiques religieuses des Ahmadis peuvent être observées à condition qu'elles le soient en privé sans qu'il soit fait affront aux Musulmans. Le gouvernement déclare par ailleurs que, comme l'ordonnance ne disqualifie pas les Ahmadis/Quadianis à l'égard de tout emploi ou profession, il considère cette question sans rapport avec les possibilités d'emploi au regard de la religion ou de la croyance. S'agissant de la déclaration à signer pour la délivrance de passeports musulmans, selon laquelle le fondateur du mouvement Ahmadi était un menteur et un imposteur, le gouvernement persiste à considérer cette déclaration nécessaire pour empêcher les non-Musulmans d'obtenir des passeports les présentant comme Musulmans, précisant que, si un Ahmadi indique sa religion sur le formulaire de demande de passeport, il n'est pas dans l'obligation de signer cette déclaration.

3. Le rapport du gouvernement réitère également les indications fournies précédemment concernant la liberté des personnes de différentes religions à entrer dans les forces armées. Le gouvernement juge donc hors de propos la demande réitérée par la commission de statistiques sur le nombre et le pourcentage d'Ahmadis/Quadianis dans les forces armées. Le rapport fournit d'autres informations détaillées sur la situation des minorités en général, y compris le nombre de sièges réservés à ces minorités à l'Assemblée nationale et dans les législatures provinciales, le soutien financier apporté à ces minorités et les mécanismes institutionnels mis en place pour promouvoir et sauvegarder les droits des minorités.

4. La commission se félicite des initiatives prises par le gouvernement pour promouvoir le bien-être des minorités dans le pays. Elle espère que le gouvernement fournira dans son prochain rapport de plus amples renseignements sur les stratégies réelles mises en oeuvre par la Division des questions relatives aux minorités du gouvernement fédéral et sur les travaux spécifiques de la Commission nationale pour les minorités. Toutefois, la commission reste préoccupée par le fait que la jouissance de l'égalité de chances et de traitement dans l'éducation et l'emploi par certaines de ces minorités, tels les Ahmadis, est nécessairement entravée par les mesures décrites ci-dessus. La commission fait remarquer que la non-discrimination en matière d'emploi ne peut se concevoir dans un espace à part, en marge des autres droits de l'homme. Si une société pardonne une certaine forme d'intolérance, elle offre inévitablement une base sur laquelle la discrimination se manifestera dans d'autres domaines, y compris l'emploi. Malgré l'affirmation réitérée du gouvernement concernant les garanties offertes par les articles 27 et 36 de la Constitution, la commission n'est pas en mesure d'accepter la position selon laquelle l'ordonnance no XX de 1984 et la déclaration requise pour la délivrance d'un passeport ne donnent lieu à aucune discrimination dans l'emploi au sens de la convention. Ce point de vue est corroboré par les débats de la Commission de la Conférence de 1995. En outre, le rapport du Rapporteur spécial de la Commission des droits de l'homme (document des Nations Unies E/CN.4/1995/91, du 22 décembre 1994) déclarait que "... les lois sur le blasphème ... favoriseraient un climat d'intolérance religieuse, voire des actes de violence affectant les minorités Ahmadie et chrétiennes, voire même les Musulmans". La commission avait déjà noté que la Cour suprême, en 1993, avait déclaré l'ordonnance no XX de 1984 statutairement conforme à la Constitution du Pakistan de 1973. Mais elle avait également noté que la Commission des droits de l'homme du Pakistan recommandait que des mesures soient prises pour garantir dans la pratique, à chaque citoyen, le droit constitutionnel de professer, pratiquer et propager sa religion en toute liberté, et que la Cour suprême soit amenée à revoir sa décision rendue à la majorité concernant l'ordonnance no XX. Ces indications illustrent les inquiétudes que les dispositions en question ont suscité à l'intérieur du pays comme au-dehors.

5. En conséquence, la commission espère que le gouvernement révisera les dispositions pertinentes du Code pénal, et plus particulièrement les articles 298B, 298C et 295C, et que des mesures seront prises pour garantir, en droit et en pratique, la liberté contre la discrimination fondée sur la religion pour tous les aspects de l'emploi. En outre, la commission prie instamment le gouvernement de reconsidérer la déclaration requise pour la délivrance de passeports.

6. La commission regrette une fois de plus que le gouvernement ne juge pas utile de fournir des données statistiques sur le nombre et le pourcentage d'Ahmadis dans les forces armées et la fonction publique, car de telles données permettraient de démontrer que l'égalité de chances et de traitement dans l'emploi est effectivement accordée à cette minorité. Notant qu'un vaste projet touchant aux droits de l'homme est en train de se mettre en place dans le pays, dans le courant de l'année 1998, avec la participation du BIT, la commission veut croire que le gouvernement et les partenaires nationaux compétents saisiront cette occasion pour réexaminer et résoudre ce problème qui perdure.

7. Discrimination fondée sur le sexe. La commission note avec intérêt les informations fournies par le gouvernement concernant les mesures proposées pour améliorer la condition des filles et des femmes dans le cadre du huitième Plan quinquennal (1993-1998). Elle note aussi avec intérêt le rapport exhaustif de la Commission d'enquête pour les femmes (août 1997), qui recommande certaines mesures. Notant l'inquiétude exprimée dans ce rapport au sujet de l'analphabétisme des femmes (dont le taux a été estimé à près de 80 pour cent en 1990; à l'heure actuelle, environ 70 pour cent des personnes n'ayant reçu aucune instruction élémentaire sont des filles), la commission demande au gouvernement d'indiquer les mesures prises ou envisagées pour appliquer les recommandations dans ce domaine ainsi que celles concernant l'emploi, qui figurent dans le rapport (chapitre V: loi sur l'emploi et les services). S'agissant de la formation pour l'emploi, la commission note qu'un projet visant la création d'un centre national de formation et de ressources a été finalisé. Le gouvernement est prié de fournir, dans ses futurs rapports, des informations sur les progrès réalisés au titre de cette initiative et sur tout autre progrès concernant la formation des femmes pour l'emploi.

8. Conditions dans les zones industrielles spéciales et les zones industrielles d'exportation. Dans ses précédents commentaires, la commission avait noté que le groupe de travail tripartite examinait la question relative à la non-application, dans les zones industrielles spéciales (SIZ) nouvellement établies, de la législation du travail; elle poursuivait en proposant des moyens de mettre la législation nationale en conformité avec les conventions de l'OIT. La commission se référait également à la situation dans les zones industrielles d'exportation (EPZ), qui sont exclues des effets de la législation du travail, mais où s'applique une législation sociale minimum non obligatoire (adoptée en 1982) qui ne comporte pas de garanties contre la discrimination. Dans ses rapports au titre des conventions nos 87 et 98, le gouvernement a indiqué, une fois de plus, que les recommandations formulées par le groupe de travail au sujet de la non-application dans les SIZ de la législation du travail font l'objet d'un examen attentif de la part du gouvernement. En ce qui concerne uniquement les EPZ de Karachi, qui regroupent 60 000 travailleurs, dont 80 pour cent de femmes, le gouvernement déclare que les avantages perçus par ces travailleurs sont supérieurs à ceux des autres. Il indique également que les tabous sociaux ne favorisent pas la syndicalisation des femmes, en sorte que les travailleuses n'ont pas créé de syndicats, ce qui ne les empêche pas de constituer des associations. Comme le gouvernement n'a pas fourni d'informations sur les mesures prises pour assurer l'application de ce principe de la convention, ainsi qu'il en avait été prié en de nombreuses occasions, la commission veut croire que ces informations seront fournies dans son prochain rapport. Le gouvernement est également prié de préciser combien de travailleurs sont actuellement employés dans les entreprises des SIZ, et de fournir des informations sur les mesures prises pour veiller à ce que, dans la pratique, la convention soit appliquée à ces travailleurs.

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