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Faisant suite à ses commentaires concernant la privatisation des prisons et le travail effectué par les prisonniers, la commission prend note des informations communiquées par le gouvernement dans son rapport.
La commission note également les observations du Congrès des syndicats (TUC) sur l'application de la convention, jointes au rapport du gouvernement.
Article 2, paragraphe 2 c), de la convention. La commission a noté précédemment qu'en vertu de la loi du 26 juillet 1991 sur la justice pénale la gestion de certaines prisons peut être privatisée (art. 84), auquel cas elles sont dirigées par un directeur désigné par l'adjudicataire, en accord avec le secrétaire d'Etat, sous la supervision d'un fonctionnaire de la Couronne (art. 85). Le gouvernement a indiqué que la loi lui permet de rechercher des adjudicataires dans le secteur privé pour créer de nouvelles prisons pour prévenus et qu'un premier contrat pour une période de cinq ans a été conclu pour le centre de détention préventive de Wolds, qui accueille des personnes n'ayant pas été jugées ou condamnées. Le gouvernement a également indiqué que le règlement des prisons prévoit que les prisonniers n'ayant pas été reconnus coupables ne sont pas tenus de travailler tandis que les autres le sont. Au centre de Wolds, le travail se limiterait aux tâches d'entretien de l'établissement et à un travail en atelier polyvalent, les prisonniers ayant choisi de participer devant être rémunérés et acquérir une formation. La commission a également noté les indications du gouvernement concernant le contrôle, la discipline, l'inspection et le suivi des prisons et elle lui a demandé de fournir des informations précises sur le nombre de prisons dont la gestion est ainsi privatisée, sur le nombre de prisonniers concernés, les salaires versés comparés aux salaires minima normalement appliqués dans les différents secteurs d'activité ainsi que d'autres précisions concernant les prestations de sécurité sociale et les retenues effectuées sur les salaires.
La commission note, selon ce qu'indique le gouvernement dans son plus récent rapport, que deux prisons ont été ainsi privatisées, le centre de détention préventive de Wolds (qui fonctionne depuis avril 1992) et la prison de Blakenhurst (depuis le 26 mai 1993). A Wolds, au cours d'une semaine ordinaire de mars 1993, sur une population moyenne de 318 personnes non jugées ou condamnées, 122 ont travaillé, accomplissant au total 2.089 heures. A Blakenhurst, le contrat passé avec l'adjudicataire privé prévoit que les prisonniers reconnus coupables et condamnés (environ la moitié des 649 prisonniers escomptés) participent à des programmes de travail et de formation professionnelle (à raison de 35 heures par semaine et de sept heures par jour), tandis que les prévenus ont la faculté de participer s'ils le désirent et sont encouragés à le faire. Le gouvernement ajoute que les possibilités de travail sont prévues dans l'enceinte de l'établissement, et qu'il existe toute une série d'ateliers proposant diverses sections de travail ou de formation, qui recouvrent une buanderie, trois espaces de formation en atelier et deux ateliers de formation en bâtiment assurant des cours pour la peinture, le plâtre et l'aménagement intérieur, le travail dans les ateliers de formation devant déboucher sur des qualifications reconnues à l'échelle nationale.
En ce qui concerne la rémunération, la commission note que le gouvernement se réfère au Manuel sur la rémunération des prisonniers ("Prisoner's Pay Manual"), publié par la direction des prisons en novembre 1992 et communiqué par le gouvernement avec son rapport. Ce système de rémunération s'applique aux prisonniers dans les établissements pénitentiaires (gérés par l'Etat).
Selon ce que le gouvernement indique, ce nouveau système de rémunération définit un cadre, laissant les modalités d'application à la discrétion de chaque directeur de prison, et il n'existe pas de rémunération uniforme pour les différents domaines de travail proposés aux prisonniers dans les établissements. Le directeur fixe les taux de rémunération applicables localement et les prisonniers doivent satisfaire à des niveaux acceptables de qualité, de rendement et d'activité qui sont convenus avec eux par avance, des réductions pouvant être opérées sur la paie lorsque la norme requise n'est pas atteinte. Le gouvernement déclare également que la plupart des prisonniers ne gagnent pas assez pour que des déductions soient opérées sur leur rémunération.
La commission note que le gouvernement déclare qu'il est dans l'intention des adjudicataires, à la fois à Wolds et à Blakenhurst, de se conformer aux principes de rémunération des prisonniers énoncés dans le Manuel sur la rémunération des prisonniers.
La commission note que le système prévoit trois niveaux différents de rémunération: un taux de base (BR), fixé à l'échelle nationale, que le prisonnier désireux d'exercer une activité productive mais ne pouvant pas obtenir un poste devrait percevoir pour couvrir ses besoins essentiels; un taux de rémunération d'activité (ER), égal pour tous dans tous les établissements d'Etat, versé à chaque prisonnier exerçant une activité productive et atteignant un niveau de qualité et d'effort satisfaisant; un taux uniforme (SR) pouvant être fixé localement par le directeur de prison pour rémunérer une activité productive à un taux supérieur au précédent (ER). Aux fins du système de rémunération, l'activité "productive" s'entend du travail (par exemple en atelier, en exploitation agricole ou en jardinerie, en services domestiques, en équipes d'entretien, pour des travaux intéressant la collectivité ou pour un employeur extérieur), la formation professionnelle et l'enseignement pendant la journée.
La commission note que le manuel souligne que dans les établissements pénitentiaires d'Etat la rémunération des prisonniers est traditionnellement fixée à un niveau tel qu'elle équivaut à de l'argent de poche; que les niveaux de rémunération sont inadéquats même pour ce modeste objectif; que des augmentations de rémunération ont été recommandées par plusieurs rapports; et qu'ainsi le rapport "Woolf" propose un salaire hebdomadaire moyen de huit livres; et que le gouvernement, dans un "Livre blanc" (White Paper) intitulé "Custody, Care and Justice", publié en 1991, a accepté ce chiffre comme objectif initial à réaliser dès que les ressources le permettraient.
La commission note les commentaires du Congrès des syndicats (TUC) selon lesquels un programme de privatisation a été adopté, aux termes duquel la gestion de deux prisons, celle de Blakenhurst et celle de Wolds, a été remise à des compagnies privées. Blakenhurst est gérée par "UK Detention Services", un consortium de la "Corrections Corporation of America" et des sociétés du bâtiment "Mowlem Alpine", responsables de la construction de Wolds. Quant à cette dernière, elle est gérée par la "Group 4 Company". En ce qui concerne les fonctions dont est chargé le contrôleur, à savoir connaître et trancher les questions de discipline concernant les prisonniers, le TUC considère que celles-ci n'équivalent pas à une supervision et à un contrôle par les autorités publiques sur le travail dans les prisons, selon ce que prévoit la convention. Le TUC attire l'attention sur l'article 2, paragraphe 2 c), de la convention et sur l'Etude d'ensemble de 1979 sur l'abolition du travail forcé, qui rappelle le rejet (par la Conférence) d'une proposition qui aurait permis la mise à disposition de la main-d'oeuvre pénitentiaire à des entreprises privées réalisant des travaux publics.
Le TUC se réfère plus spécialement à la nature, aux conditions et à la rémunération du travail effectué par les prisonniers dans la prison à gestion privée de Blakenhurst et dans différentes prisons gérées par l'Etat qui ont conclu des contrats de louage de services avec des sociétés privées extérieures. La commission note en particulier que le TUC indique, à propos de la prison de Blakenhurst, que le directeur a fourni des informations selon lesquelles des prisonniers seraient employés aux cuisines, au service des bâtiments, au nettoyage des bâtiments, à l'entretien des installations, aux travaux de jardinage, à des travaux de montage et à des travaux de buanderie, que les barèmes de rémunération se situent en moyenne à 6,50 livres par semaine, ces taux variant selon le travail entrepris, et que les recettes produites par le travail accompli sont utilisées pour rémunérer les prisonniers. Toutefois, de l'avis du TUC, les salaires payés ne sont pas normaux et, s'il est déclaré que les recettes produites par le travail des prisonniers sont employées pour améliorer les moyens mis à leur disposition, le TUC estime que la main-d'oeuvre pénitentiaire est utilisée par une société privée pour réduire les coûts de gestion de la prison et augmenter le profit privé.
La commission note que le gouvernement n'a fourni aucun commentaire en réponse aux observations du TUC.
La commission note également les informations selon lesquelles une autre prison est en voie de privatisation.
La commission rappelle que l'article 2, paragraphe 2 c), de la convention interdit explicitement que les personnes astreintes au travail en conséquence d'une condamnation prononcée par une décision judiciaire soient mises à la disposition de particuliers, compagnies ou personnes morales privées. Comme la commission l'a fait observer dans son Etude d'ensemble de 1979 sur l'abolition du travail forcé, en adoptant cette disposition, la Conférence a rejeté expressément un amendement qui aurait permis de concéder de la main-d'oeuvre pénitentiaire à des entreprises privées réalisant des travaux publics. Il ne suffit donc pas de limiter l'utilisation de la main-d'oeuvre pénitentiaire à des travaux d'intérêt public, puisque de tels travaux peuvent être effectués par des entreprises privées.
La commission a indiqué dans l'étude d'ensemble susmentionnée que l'interdiction de l'article 2, paragraphe 2 c), n'est pas limitée au travail effectué en dehors des établissements pénitentiaires mais s'applique également au travail dans des ateliers que des entreprises privées font fonctionner à l'intérieur des prisons. A fortiori, l'interdiction couvre tout travail organisé par des prisons à gestion privée.
La commission rappelle que partout oû les prisonniers sont mis à la disposition de sociétés privées seul le travail exécuté dans des conditions d'une libre relation de travail peut être considéré comme échappant à l'interdiction inscrite dans la convention. Ceci exige nécessairement le consentement formel de la personne intéressée et, à la lumière des circonstances de ce consentement, des garanties et protections en matière de salaire et de sécurité sociale permettant de considérer qu'il s'agit d'une véritable relation de travail libre.
La commission exprime l'espoir que le gouvernement fournira des informations détaillées sur les mesures prises ou envisagées pour garantir le respect de la convention.