National Legislation on Labour and Social Rights
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La commission a pris note des informations contenues dans le rapport du gouvernement en réponse aux commentaires formulés en date du 25 février 1993 par la Confédération des syndicats allemands (DGB). Elle a également pris connaissance des conclusions du Comité de la liberté syndicale dans le cas no 1692 (291e rapport du comité, paragr. 191 à 227, approuvé par le Conseil d'administration à sa 258e session, novembre 1993).
1. Déni du droit d'accès dans les lieux de travail aux délégués syndicaux étrangers à une entreprise. La commission rappelle que la DGB estime que, puisqu'en Allemagne il n'existe pas de syndicats d'entreprise, les intérêts des travailleurs doivent pouvoir être représentés dans les entreprises par des délégués syndicaux étrangers à celles-ci. Le gouvernement, dans ses rapports antérieurs, avait estimé qu'il n'était pas nécessaire de prendre des mesures législatives pour que les délégués syndicaux étrangers à l'entreprise puissent avoir accès à celle-ci étant donné que, selon lui, la question ne constituait pas un point litigieux entre les employeurs et les travailleurs.
Dans ses commentaires de février 1993, la DGB indique que les dispositions de l'article 2, paragraphe 2, de la loi de 1972 sur l'organisation des entreprises, qui prévoient le droit d'accès dans les lieux de travail aux représentants des syndicats représentés dans l'entreprise, sont trop vagues. Elle ajoute que le texte en question ne traite pas du droit d'accès des délégués syndicaux étrangers à l'entreprise dans les établissements dépendant de l'Eglise et d'autres établissements similaires et rappelle que la décision de 1981 de la Cour fédérale constitutionnelle n'accorde pas de droit d'accès aux représentants syndicaux étrangers à l'entreprise. Elle est d'avis que cette situation est contraire à l'article 3 de la convention qui garantit aux travailleurs le droit d'élire librement leurs représentants. Elle explique qu'une grande partie des activités de représentation des intérêts des travailleurs ne peuvent être exercées que par des représentants syndicaux étrangers à l'entreprise, étant donné qu'il serait impossible à un seul membre d'un syndicat travaillant dans l'entreprise d'exercer l'ensemble de ces activités, et elle estime que la question nécessite l'adoption d'une réglementation législative.
La commission note que le gouvernement souligne dans son rapport, pour ce qui est de l'article 2, paragraphe 2, de la loi de 1972 sur l'organisation des entreprises, que la Cour fédérale du travail a précisé, dans une décision du 25 mars 1992, qu'un syndicat est représenté dans une entreprise lorsqu'au moins un travailleur de l'entreprise y est affilié, la preuve de cette affiliation devant être apportée par le syndicat en question. Selon le gouvernement, la question n'a pas encore donné lieu à des différends. Il indique qu'en ce qui concerne, par exemple, les institutions faisant partie des services postaux et des communications, l'article 2 (2) de la loi sur les représentants des personnels fédéraux, qui confère le droit d'accès uniquement aux délégués des syndicats représentés dans ces institutions, est de peu d'importance dans la pratique puisque 92 pour cent des travailleurs concernés sont affiliés aux trois syndicats qui y sont représentés. Il n'est donc pas nécessaire que les délégués syndicaux étrangers à ces institutions aient un droit d'accès dans les lieux de travail.
La commission rappelle à nouveau qu'elle a indiqué à plusieurs reprises que le déni du droit d'accès aux lieux de travail aux délégués syndicaux étrangers à une entreprise, lorsque ceux-ci l'estiment nécessaire, limite le droit des organisations de travailleurs et d'employeurs d'organiser librement leur gestion et leur activité, et que les autorités publiques doivent s'abstenir de toute intervention de nature à limiter ce droit. Tout en reconnaissant que le droit d'accès ne devrait pas affecter indûment les activités de l'entreprise concernée, la commission demande à nouveau au gouvernement d'indiquer dans son prochain rapport les mesures prises pour garantir que les délégués syndicaux, même extérieurs à une entreprise, puissent avoir accès aux lieux de travail s'ils l'estiment nécessaire.
2. Réquisition de fonctionnaires des services des postes (Beamte) pour remplacer des employés ou des ouvriers de l'Etat (Angestellte) grévistes dans les services postaux. Se référant à ses commentaires antérieurs, la commission prend note avec intérêt de l'arrêt de la Cour fédérale constitutionnelle du 5 avril 1993 selon lequel l'affectation de fonctionnaires (Beamte) à des services dans lesquels se déroule une grève des employés et des ouvriers de l'Etat (Angestellte) n'est pas compatible avec la Constitution de l'Allemagne, à moins que cette affectation ne soit régie de manière expresse par la loi. Elle exprime le ferme espoir que, conformément à cette décision, le gouvernement n'aura plus recours à la réquisition de fonctionnaires pour briser une grève.
3. Interdiction du droit de grève dans la fonction publique. La commission note que la DGB fait observer que l'on ne saurait invoquer les caractéristiques des fonctions et la nature de la relation de loyauté par laquelle sont liés les fonctionnaires pour diminuer les droits des parties à la négociation collective prévus à l'article 9 (3) de la Constitution. La DGB estime en conséquence que les fonctionnaires devraient avoir le droit de recourir à la grève, à l'exception de ceux agissant en tant qu'organes de la puissance publique, et qu'il n'est pas possible, en vertu de l'article 33 (5) de la Constitution, d'exclure la totalité des fonctionnaires du droit de grève.
La commission observe avec regret que le gouvernement réitère une fois de plus que l'interdiction de recourir à la grève pour l'ensemble des fonctionnaires, quelles que soient les fonctions qu'ils exercent, ne porte pas atteinte à la convention qui, selon lui, ne s'applique qu'aux travailleurs qui sont liés par un contrat de droit privé. Il ajoute que les fonctionnaires n'ont pas le droit de recourir à la grève en raison de la nature de leur relation de confidentialité et de loyauté régie par le droit public. Cette situation est justifiée en particulier par le fait qu'en vertu de l'article 33 (5) de la Constitution le législateur doit, lors de la détermination des conditions d'emploi, tenir compte des principes et règles de structure de la fonction publique, ainsi que des principes d'assistance à la population et du maintien des services publics. Conformément à l'opinion et à la jurisprudence des tribunaux, le concept des pouvoirs souverains contenus à l'article 33 (4) de la Constitution ne se limite pas aux autorités qui ont un rôle traditionnel d'intervention (police, fisc, système pénal, etc.) mais couvre également des domaines plus étendus dans un Etat moderne qui assume un rôle social et industriel.
La commission se voit obligée de rappeler à nouveau que le principe selon lequel le droit de grève peut être limité, voire interdit, dans la fonction publique ou dans les services essentiels perdrait tout son sens si la législation retenait une définition trop extensive de la fonction publique ou des services essentiels. L'interdiction de la grève devrait dont être limitée aux fonctionnaires qui exercent une autorité au nom de l'Etat ou aux services dont l'interruption mettrait en danger, dans l'ensemble ou dans une partie de la population, la vie, la sécurité ou la santé de la personne (voir Etude d'ensemble de 1994 sur la liberté syndicale et la négociation collective, paragr. 158 et 159).
Elle demande par conséquent au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour garantir aux fonctionnaires qui n'exercent pas d'autorité au nom de l'Etat et à leurs organisations, le droit d'organiser leurs activités et de formuler leur programme d'action pour la défense de leurs intérêts économiques, sociaux et professionnels, y compris par le recours à la grève, sans entrave de la part des pouvoirs publics, conformément aux principes contenus dans les articles 3 et 10 de la convention. Elle prie le gouvernement d'indiquer dans son prochain rapport toute mesure prise à cet égard.
En outre, la commission prend note des commentaires présentés par la DGB en date du 8 février 1994 qui ont été reçus au BIT alors même que la commission avait débuté ses travaux. Elle les examinera quant au fond à sa prochaine session à la lumière du prochain rapport du gouvernement.