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Forced Labour Convention, 1930 (No. 29) - Thailand (RATIFICATION: 1969)
Protocol of 2014 to the Forced Labour Convention, 1930 - Thailand (RATIFICATION: 2018)

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La commission note que le rapport du gouvernement n'a pas été reçu. La commission a toutefois pris note de la discussion tenue à la Commission de la Conférence en 1992 au sujet de l'application de la convention, ainsi que du rapport de la mission de contacts directs qui, à la demande du gouvernement de la Thaïlande, s'est rendue dans ce pays du 4 au 11 septembre 1993.

Dans des commentaires antérieurs, la commission avait noté les allégations présentées devant la Sous-Commission des Nations Unies de la lutte contre les mesures discriminatoires et de la protection des minorités, selon lesquelles, en Thaïlande, des enfants étaient achetés et vendus pour travailler dans des maisons privées, des restaurants, des fabriques ou des maisons closes, que des magasins s'étaient spécialisés dans la vente d'enfants et d'adolescents, que des trafiquants ou des recruteurs sévissaient dans le pays et que, bien que des lois tendant à protéger les enfants fussent en vigueur, la police ne veillait guère à leur application. Ayant pris note des informations fournies par le gouvernement sur les inspections effectuées et les mesures prises à l'encontre des employeurs pour des infractions commises à l'égard d'enfants, la commission a considéré que ces mesures avaient une portée limitée et que les sanctions prises n'étaient pas proportionnées au préjudice physique et moral subi par les enfants.

En 1992, la commission relevait la déclaration faite par le Premier Ministre devant la Onzième Conférence régionale asienne (novembre 1991), dans laquelle celui-ci exprimait sa ferme conviction que la place d'un enfant est à l'école et non dans une usine et qu'il ne suffit pas d'attendre le redressement économique pour lutter contre l'exploitation du travail des enfants, et se déclarait déterminé à faire disparaître le travail des enfants et à préserver l'avenir des enfants défavorisés du pays. La commission avait noté les indications du gouvernement concernant les mesures adoptées ou envisagées en vue de réviser la législation et assurer son respect, organiser la prévention et l'éveil des consciences, et étendre l'enseignement primaire. Elle a prié le gouvernement de fournir des informations spécifiques sur un certain nombre de points, notamment en ce qui concerne les mesures législatives, l'action de l'inspection et de la police, les plaintes, les poursuites, les sanctions et les programmes de réadaptation. La commission a souligné que l'exploitation des enfants par le travail forcé, qu'il s'agisse de forcer des enfants au travail, à la prostitution, à la pornographie, que ce soit dans des usines, des ateliers clandestins, des maisons closes, des habitations privées ou d'autres lieux, constitue l'une des formes les plus odieuses de travail forcé. Elle doit être combattue énergiquement et punie sévèrement.

La commission prend note des informations contenues dans le rapport de la mission de contacts directs au sujet de l'application de la convention. La commission note qu'en 1988 le gouvernement a adopté une décision concernant "une politique et des mesures de lutte contre l'exploitation du travail des enfants"; en novembre 1992, le gouvernement a adopté une "résolution concernant des mesures de lutte contre l'exploitation du travail des enfants". En 1990, l'âge minimum d'admission à l'emploi a été relevé de 12 et 13 ans; toutefois, la scolarité obligatoire se termine à la sixième classe, normalement à l'âge de 12 ans. Selon les statistiques officielles, quatre millions d'enfants sont au travail; parmi eux, 600.000 ont entre 13 à 14 ans. La commission constate d'après les informations recueillies par la mission de contacts directs que les établissements illégaux existent par milliers. C'est précisément parmi les enfants au travail non pris en considération dans les statistiques (en particulier ceux de moins de 13 ans), engagés illégalement et travaillant dans des établissements illégaux, que l'exploitation du travail forcé est la plus répandue.

Recrutement

La commission constate, à la lecture du rapport de la mission de contacts directs, que le recrutement d'enfants par la force ou par des manoeuvres frauduleuses pour les faire travailler dans des usines, des ateliers clandestins ou des maisons closes continue notamment aux abords de la gare centrale et des gares routières ainsi que dans les provinces, en particulier dans le nord et le nord-est du pays et au-delà de la frontière. Ces procédés consistent à leurrer les victimes par des promesses fallacieuses quant au salaire et aux autres conditions de vie et de travail ou à les enlever. Des organisations non gouvernementales, comme l'Association des femmes juristes, qui déploie son action à la gare centrale pour essayer de protéger les enfants, doivent faire preuve d'une extrême vigilance pour déjouer ces recruteurs.

La commission note également que la mission de contacts directs a été informée de certaines pratiques de recrutement par des intermédiaires pour les plantations de canne à sucre, concentrées dans la province de Kanchanaburi. Les recruteurs rassemblent des personnes du nord-est, parmi lesquelles des enfants, les acheminent jusqu'aux lieux de travail dans des camions surchargés et leur prêtent de l'argent pour les attirer en servitude. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises ou envisagées pour protéger ces travailleurs contre le travail forcé.

Exploitation du travail des enfants

La commission note que les autorités ont fourni à la mission de contacts directs un exemplaire de la première étude systématique et officielle réalisée par le Bureau national de la jeunesse, Cabinet du Premier ministre, sur le travail des enfants dans les industries manufacturières pour étudier leurs conditions de travail, leurs conditions de vie et leurs possibilités d'épanouissement ainsi que le respect, par les employeurs, de la législation sur la protection du travail. Cette étude a permis de constater, entre autres, des violations de la législation par restriction des droits individuels; elle note en particulier que "la plupart des enfants n'ont pas la possibilité de retourner chez eux en visite ni même de se mettre en rapport avec leur famille; certains enfants, qui avaient reçu un paiement à titre d'avance, n'étaient pas autorisés à sortir de leur lieu de travail ... De nombreux enfants logeant chez l'employeur étaient enfermés et faisaient l'objet de sévices physiques et psychologiques". Alors que cette étude a été réalisée en 1986, la commission note que la mission de contacts directs a été informée que ces pratiques persistent, ce qui a été confirmé en particulier par le témoignage donné par un garçon qui avait été sauvé: après avoir été kidnappé à la gare, il fut forcé, avec d'autres enfants, à travailler pendant de très longues heures par jour, fut battu et séquestré, avec interdiction même de regarder par la fenêtre. L'usine en question, comme bien d'autres établissements illégaux, était constituée de deux ateliers clandestins adjacents dont toutes les fenêtres avaient été aveuglées et l'unique corridor barricadé. La Division de la répression du crime de la police, qui a investi cette usine, a été obligée de franchir la clôture à l'aide d'échelles pour s'introduire dans les locaux.

Dans une note intitulée "Résoudre le problème du travail des enfants en Thaïlande" communiquée à la mission par le Département de la protection et du bien-être des travailleurs, le gouvernement déclare que "en raison de la pénurie d'emplois dans leur province d'origine, les enfants en quête de travail se rendent des zones rurales à Bangkok et dans les provinces avoisinantes. C'est la raison pour laquelle ils sont trompés et exploités. De nombreuses affaires d'emploi illégal d'enfants font ressortir que les enfants travaillent trop, manquent de périodes de repos et sont engagés dans des travaux dangereux. La négligence des employeurs ou des contremaîtres et les conditions de travail portent atteinte à la santé et à l'épanouissement de ces enfants."

Le phénomène de sous-traitance, très répandu, contribue à l'exploitation des enfants, notamment en contribuant à diluer les responsabilités (l'employeur qui donne du travail à un sous-traitant ne contrôle pas les procédures de recrutement, les salaires ou les conditions de travail des personnes engagées par le sous-traitant) et en faisant obstacle au syndicalisme.

Respect de la législation

La commission note que la faiblesse des mécanismes chargés de faire respecter la loi a été soulignée par plusieurs personnes et groupes de personnes; de légères améliorations ont toutefois été constatées ces derniers mois en rapport avec la répression de l'exploitation des enfants par la prostitution.

La mission a été informée que l'inspection du travail était en sous-effectif et était sous-équipée, au point que pour une des zones industrielles autour de Bangkok, on ne comptait que dix inspecteurs pour 6.000 à 7.000 usines.

Dans la documentation fournie à la mission, le gouvernement a indiqué que, pour la période du 1er octobre 1992 au 31 juillet 1993, le Département de la protection et du bien-être des travailleurs a inspecté 28.281 entreprises et constaté que 4.550 d'entre elles employaient des enfants; 17.987 enfants ainsi employés ont passé l'inspection. Ces chiffres globaux n'apportent pas d'information spécifique sur l'inspection des établissements soupçonnés de recourir au travail forcé des enfants.

Le gouvernement a indiqué que le ministère de l'Intérieur a désigné et habilité certains de ses fonctionnaires et ceux d'autres organismes compétents à inspecter les entreprises, afin d'accélérer l'inspection du travail des enfants. La commission note que cette déclaration semble avoir rapport avec le "rôle du ministère de l'Intérieur en ce qui concerne l'inspection des lieux de travail et l'engagement des poursuites pénales contre les contrevenants" (Journal officiel, 26 janvier 1993). Les fonctionnaires compétents du Département de la protection et du bien-être des travailleurs peuvent inspecter les lieux de travail et adresser des avis ou des avertissements aux employeurs sur des questions ayant trait au respect de la législation et procéder à un suivi pour constater les cas dans lesquels les employeurs persistent à ne pas respecter la loi. S'il est constaté que des enfants de 13 à 15 ans travaillent sans autorisation, le fonctionnaire enjoint à l'employeur de faire une demande d'autorisation d'emploi de l'enfant; le fonctionnaire compétent aura l'autorité pour décider l'octroi du permis.

En ce qui concerne la police, des documents dont les Nations Unies avaient été saisies en 1982 faisaient état de corruption de la police locale, laquelle devrait normalement savoir oû des enfants sont employés illégalement. Il était indiqué que des descentes dans les usines et les maisons closes étaient réalisées par une force de police spéciale, la Division de la répression du crime, sur des informations données par des membres de la population, des organisations humanitaires ou des enfants ayant réussi à s'échapper.

La commission note que, d'après la mission de contacts directs, la situation à cet égard n'a guère évolué: la corruption persiste; le travail d'investigation suscite peu d'intérêt étant donné qu'il est pénible et ne rapporte pas suffisamment de revenus "annexes". Dans la police, les femmes sont peu nombreuses et accomplissent essentiellement un travail de bureau. La mission de contacts directs a été informée que la formation professionnelle des personnels chargés de faire respecter la loi est insuffisante. Le gouvernement a mentionné une réunion organisée à l'intention des gouverneurs, des commandants de bureaux de police provinciaux et des directeurs provinciaux de la protection et du bien-être des travailleurs afin de mettre l'accent sur la mise en oeuvre d'une politique et de mesures concernant le travail des enfants et son intention de former plus de 2.500 inspecteurs du travail.

En ce qui concerne les poursuites pénales et décisions de justice, la commission note que la police a signalé à la mission cinq poursuites. Ce chiffre relativement faible tiendrait au fait que les affaires se règlent souvent par négociation, les victimes étant découragées à déclencher une procédure qui peut se révéler longue. Le garçon secouru en novembre 1991 a déclaré à la mission que depuis cette époque le propriétaire de l'usine était en prison mais son partenaire en liberté sous caution, tandis que le procès est en cours. En revanche, le gouvernement a indiqué, dans la note mentionnée antérieurement, que 58 employeurs ont été poursuivis pour pratiques de travail déloyales et exploitation du travail des enfants; que deux employeurs ont été punis d'emprisonnement et que les amendes infligées se sont élevées à 134.300 baths. Il a déclaré également que le ministère de l'Intérieur a annoncé des poursuites immédiates à l'encontre des employeurs qui emprisonnent les enfants, les mettent au secret ou se rendent coupables de sévices.

La commission note que le règlement susmentionné du ministère de l'Intérieur prévoit que lorsque le fonctionnaire compétent est d'avis que des poursuites pénales doivent être engagées, ces poursuites sont exercées comme suit: les affaires touchant à des questions de travail sont examinées selon la procédure prévue pour le règlement à l'amiable des actes délictuels, ou bien une action pénale est engagée, conformément au Code de procédure pénale (s'il n'y a pas de règlement à l'amiable, en raison de l'opposition de la personne incriminée, de la victime ou du comité). Si une procédure pénale est déclenchée parce qu'un enfant a été détenu, emprisonné ou a subi des sévices, et s'il apparaît en outre que l'employeur est coupable d'une infraction à la législation du travail pour exploitation du travail des enfants, le Département de la police et les fonctionnaires compétents exercent conjointement des poursuites pénales.

Le gouvernement a cité au nombre des autres mesures de contrôle l'enregistrement des enfants travaillant hors de leur zone d'origine et l'institution de comités et groupes de travail chargés de protéger les enfants au travail. Une ligne de communication directe a été créée par le gouvernement en 1991; cette ligne est bien connue du public et a permis de dénoncer un nombre appréciable de cas de mauvais traitement d'enfants.

Réadaptation

La commission note que le gouvernement fournit à titre de mesures d'urgence un abri, de la nourriture et des vêtements aux enfants secourus, ainsi qu'une aide familiale en espèces (capital destiné à la formation professionnelle) et en nature (fournitures scolaires). Des fonctionnaires ont déclaré à la mission de contacts directs qu'une aide avait été fournie à quelque 112 enfants secourus. La commission relève néanmoins que, selon des critiques officielles et non gouvernementales, il n'existerait pas de programme efficace de réadaptation, un tel programme devant couvrir tous les aspects de la réadaptation des enfants.

Sensibilisation du public et mobilisation

La commission note, à la lecture du rapport de la mission de contacts directs, qu'un grand nombre des personnes interrogées ont souligné l'importance d'une sensibilisation et d'une mobilisation du public pour prévenir l'exploitation des enfants et débusquer les exploiteurs en vue de les punir ("vigilance de la collectivité").

Il a été signalé que des émissions de radio et de télévision sont consacrées à l'information sur l'éducation et le développement; que des systèmes de sonorisation ou des réseaux radio de village diffusent à travers le pays des messages sur le bien-être et le développement des villages. On a estimé que les autorités devraient inciter la population, par des subsides et des moyens, à intervenir au nom des enfants, par l'intermédiaire des organisations non gouvernementales, des chefs de communautés et des grands moyens de communication. On a souligné qu'une mobilisation des parlementaires, des édiles locaux, des militaires ainsi que de la communauté religieuse bouddhiste serait nécessaire.

La commission note que le gouvernement, pour sa part, a mentionné les mesures suivantes: lancement d'une campagne de prévention de l'exploitation du travail des enfants et des pratiques déloyales par l'intermédiaire des mass media, accompagnée d'une diffusion d'affiches dans les communautés et d'une émission de timbres (mesures qui, selon le gouvernement, ont été mises en oeuvre dans 60 provinces); diffusion de quelque 100.000 brochures sur le travail des enfants auprès de dirigeants locaux, d'étudiants et du grand public; organisation de quelque 214 réunions, à l'adresse de près de 10.000 employeurs, à Bangkok et dans les zones rurales.

Initiatives législatives

La commission note que la mission de contacts directs a été informée de certaines initiatives sur le plan législatif:

- un amendement du Code pénal tendant à alourdir les peines prévues à l'encontre des personnes coupables d'avoir emprisonné des enfants, d'avoir forcé des enfants à travailler, ou d'avoir infligé à des enfants des sévices corporels ou mentaux ayant entraîné leur mort est déjà passé en première lecture au Parlement (trois lectures sont nécessaires pour qu'un amendement soit adopté);

- le ministère de l'Intérieur a proposé un amendement à la législation sur la protection du travail qui abaisserait le nombre d'heures de travail demandées aux enfants de 13 à 15 ans, qui est actuellement de 48 heures par semaine dans l'industrie et 54 heures par semaine dans le commerce, à 36 heures par semaine et 6 heures par jour. Cet amendement prévoit également un alourdissement des sanctions en cas d'infraction;

- deux projets de loi tendant à modifier la législation interdisant la vente et le trafic des femmes et des enfants et la loi de 1928 sur le contrôle de la prostitution ont été soumis au Parlement. Les modifications à ce dernier instrument tendraient à renforcer les sanctions applicables et à étendre les responsabilités pénales;

- le Département public du bien-être des travailleurs a indiqué qu'un projet de loi modifiant l'annonce no 294 relative aux conditions de vie et à la protection des enfants défavorisés serait en cours d'élaboration.

Exploitation sexuelle des enfants

La commission constate que l'exploitation sexuelle des enfants est un problème extrêmement grave tant en raison de son ampleur que de sa complexité. Il est aussi difficile d'en apprécier exactement l'étendue, comme c'est le cas pour le travail forcé des enfants; l'exploitation sexuelle des enfants est cachée des regards; elle en appelle aux perversions les plus abjectes des humains et est "protégée" par des gangs et des mafias. La Division de la lutte contre les maladies sexuellement transmissibles du ministère de la Santé a indiqué en 1990 que le nombre d'enfants en prostitution s'élevait à 86.000; les données du Département de la police indiquent que, sur un chiffre estimatif de 400.000 prostitués, 40 pour cent auraient moins de 16 ans (soit 160.000). Les estimations des organisations non gouvernementales (ONG) oscillent entre 200-300.000 et 800.000 enfants en prostitution. La situation s'est aggravée avec l'arrivée d'enfants victimes d'un trafic en provenance de pays comme le Cambodge, la Chine, le Laos et Myanmar. Les clients préfèrent les jeunes enfants pour éviter la contamination par le SIDA et c'est ainsi que des enfants de plus en plus jeunes sont entraînés dans le piège, séquestrés, définitivement marqués physiquement et psychologiquement. Beaucoup sont séropositifs et vivent sous la menace permanente d'être frappés par le SIDA.

Les mesures de prévention et de protection indispensables à la lutte contre le travail forcé des enfants seront également valables dans la lutte contre l'exploitation sexuelle des enfants.

La commission note que la Thaïlande a connu, ces dernières années, un énorme taux de croissance, émergeant comme un nouveau pays industrialisé. Toutefois, de profondes enclaves de pauvreté et des disparités marquées demeurent, voire s'élargissent, entre riches et pauvres. Si la pauvreté est l'un des facteurs contribuant au travail des enfants, elle ne saurait être invoquée comme prétexte pour perpétuer le travail des enfants et encore moins l'exploitation des enfants par le travail forcé. Des politiques et mesures efficaces pour renforcer la justice sociale et l'équité peuvent beaucoup faire pour aider les enfants et les familles laissés en marge du développement et pour contribuer à protéger les enfants.

La commission constate que nombre d'enfants continuent à travailler sous la contrainte ou dans des conditions d'exploitation n'ayant aucun rapport avec une relation libre de travail. La situation est souvent liée au recrutement forcé ou fallacieux, la tromperie et le trafic. Des enfants sont exploités parce qu'ils sont jeunes et sans défense. Ils sont privés du droit à une enfance normale, privés d'éducation, privés d'un avenir.

Les gouvernements qui se sont succédé ont exprimé de bonnes intentions, ont formulé des politiques et annoncé des mesures de lutte contre l'exploitation des enfants. Le gouvernement actuel a annoncé sa politique, en particulier en ce qui concerne l'exploitation sexuelle des enfants, voici plus d'un an. Il a commencé à prendre certaines mesures et engagé certaines réformes législatives. Une action concrète et efficace est désormais attendue.

Ce qu'il faut, c'est la formulation d'objectifs clairs et de stratégies bien définies pour atteindre ces buts.

Le gouvernement pourrait envisager de mettre en oeuvre un programme national global d'action contre l'exploitation des enfants par le travail forcé. Ce programme pourrait s'inspirer du programme d'action contre la servitude des enfants, adopté en novembre 1992 par le Séminaire régional asien sur la servitude des enfants, à l'élaboration et à l'adoption duquel la Thaïlande a participé. Il faudrait qu'un tel programme soit mis en oeuvre de manière prioritaire, le travail forcé des enfants, fléau intolérable, appelant une action d'urgence.

La commission considère que l'instauration dans un avenir immédiat d'un cadre juridique complet de lutte contre l'exploitation des enfants par le travail forcé est indispensable.

S'agissant des différents projets de loi soumis au Parlement ou actuellement examinés par le gouvernement, la commission exprime l'espoir que le gouvernement sera en mesure d'accélérer le processus de leur adoption, étant donné qu'il a la possibilité de faire inscrire en priorité à l'ordre du jour du Parlement l'examen d'un projet de texte. Elle espère aussi que des dispositions renforçant l'action et les sanctions contre l'exploitation des enfants par le travail forcé seront adoptées dans un proche avenir.

En ce qui concerne le respect de la législation, qui revêt une importance déterminante, la commission note que, s'il existe des lois sur la protection des enfants et si l'on envisage d'en adopter d'autres pour renforcer les sanctions contre les exploiteurs, ces instruments doivent néanmoins être appliqués dans la pratique. On reconnaît d'une manière générale la nécessité d'améliorer la qualité de l'application de la législation, d'augmenter le nombre des inspecteurs du travail, de lutter contre la corruption, en particulier dans la police. La commission note qu'il a été suggéré que des policiers femmes pourraient être chargées des enquêtes sur des cas touchant les femmes et les enfants. Le respect de la législation nécessite essentiellement une volonté politique, de la part du gouvernement, pour fournir les moyens nécessaires à une action efficace.

La commission considère que le gouvernement pourrait également encourager le système de "vigilance de la population" et faire mieux connaître la législation par le public, afin que l'exploitation du travail des enfants soit perçue comme inacceptable. Il pourrait donner à nouveau consigne aux hôpitaux de signaler les cas de mauvais traitements à enfants portés à leur attention.

S'agissant de la réadaptation, il n'existe apparemment aucun programme cohérent. La réadaptation étant une composante déterminante de toute action contre l'exploitation des enfants par le travail forcé, un effort sérieux des autorités compétentes est nécessaire dans ce domaine. Les ONG ont apporté et continuent d'apporter une contribution essentielle dans l'aide à la réadaptation des enfants arrachés au travail forcé. Le gouvernement devrait coopérer avec les ONG pour élaborer et mettre en oeuvre des mesures d'adaptation.

Réadaptation et éducation sont étroitement liées. L'éducation est l'un des moyens essentiels de prévention de l'exploitation des enfants par le travail forcé et de réinsertion des enfants secourus. Il y a quelques années, le gouvernement a pris la décision politique de prolonger la scolarité obligatoire de la classe 6 à la classe 9, en précisant qu'il prévoyait, pour le moment, d'étendre la scolarité obligatoire jusqu'à la classe sept. Ceci voudrait dire que les enfants (pourvu qu'ils restent scolarisés) ne quitteraient l'école qu'à l'âge de 13 ans, ce qui correspondrait à l'âge minimum actuel d'admission à l'emploi. La commission espère que cette intention trouvera son expression dans les faits dans un proche avenir et qu'elle sera assortie de mesures d'aide aux familles afin de limiter les abandons scolaires et que le gouvernement étendra progressivement la scolarisation obligatoire jusqu'à la classe 9.

La commission note que la mission de contacts directs a eu nettement l'impression qu'il n'existe qu'une coordination insuffisante entre les divers organismes de l'Etat s'occupant de l'emploi des enfants et donc un manque d'évaluation de la part des autorités de la véritable ampleur du problème de l'exploitation des enfants par le travail forcé. Une collaboration étroite entre des organismes tels que le Bureau national à la jeunesse, le Département de la protection et du bien-être des travailleurs et le Département du bien-être public ainsi que de la police est importante. En outre, en raison de l'étroite relation entre les questions concernant les enfants et les femmes, une coopération entre des institutions telles que la Commission nationale à la jeunesse et la Commission nationale aux affaires féminines serait assurément très utile.

La commission note que la mission de contacts directs a décelé, lors de sa visite de septembre 1993, des signes d'un certain éveil des consciences et d'un certain engagement. La commission exprime l'espoir que ces signes se traduiront par une action effective et que le gouvernement fournira des informations détaillées sur les mesures adoptées en vue d'éliminer l'exploitation des enfants par le travail forcé et sur les différents points soulevés ci-dessus, en particulier sur les mesures tendant à des réformes législatives, l'application de la législation, les sanctions prises et les programmes de réadaptation.

Une demande est adressée directement au gouvernement au sujet de certains points et, notamment, de l'affiliation syndicale des enfants qui travaillent, ainsi que sur un certain nombre d'autres points soulevés dans ses précédents commentaires.

[Le gouvernement est prié de communiquer un rapport détaillé pour la période se terminant le 30 juin 1994.]

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